Les principes derrière l’agilité et l’amélioration continue constituent de bons leviers pour améliorer l’efficacité des réunions et les rendre plus productives. 

La méthode agile a d’abord été utilisée dans le domaine du développement de logiciels. Plutôt que de prendre plusieurs mois — voire plusieurs années — pour proposer une solution technologique complète, les programmeurs ont décidé de lancer rapidement une version bêta pour la tester, l’améliorer et la parfaire dans un second temps. «Ce qui signifie que, pour être agile, il faut se centrer sur les besoins des clients, être ouvert à la rétroaction et prêt à se remettre en question», explique Julie Carignan, conseillère en ressources humaines agréée (CRHA), psychologue organisationnelle et associée, Développement des leaders et des équipes, chez Humance.

Si cette méthode s’avère fort utile pour créer un nouveau produit, elle peut tout aussi bien servir à optimiser… les rencontres d’équipe, analyse-t-elle. «On oublie souvent le niveau macro, mais je pense qu’il faut se faire un point d’honneur d’améliorer en continu les réunions. Pour cela, on peut tout simplement demander une rétroaction après la rencontre. Est-ce que les participants estiment que c’était pertinent? Est-ce qu’ils comprennent ce qui est attendu d’eux? Ont-ils tout ce qu’il faut en main pour y arriver?» De quoi nourrir la réflexion pour éviter les discussions inutiles et rectifier le tir au besoin, fait-elle valoir.

Rencontres éclairs

Pour être plus efficace, pourquoi ne pas faire le point rapidement et régulièrement sur l’évolution d’un projet? C’est l’idée derrière plusieurs méthodes d’amélioration continue. «De façon générale, quand il est question d’amélioration des opérations, on parle souvent de fluidité dans les processus. C’est cette même idée qu’on veut amener dans les réunions, en se rencontrant plus souvent, mais moins longtemps. Par exemple, on pourrait faire le point 15 minutes chaque jour», explique Sylvain Landry, professeur titulaire au Département de gestion des opérations et de la logistique à HEC Montréal.

Ces rencontres éclairs devraient servir à mettre de l’avant ce que l’équipe a fait la veille et la journée même et ce qu’elle prévoit exécuter le lendemain. Ainsi, les employés peuvent rapidement prendre conscience des retards et agir en conséquence. «Si certains sujets plus complexes sont amenés par les participants, on pourra en discuter en-dehors de ces rencontres», ajoute-t-il. Ce type de réunion permet donc de s’assurer que les opérations se déroulent bien de façon brève et proactive.

Se réunir autour d’une station visuelle

Les rencontres pourraient aussi se tenir autour de stations visuelles, un autre concept emprunté au domaine de l’amélioration continue. Sur un tableau, on affiche différents points qui permettent d’organiser efficacement la réunion, tels que les objectifs, les indicateurs de performance et les billets d’amélioration, explique Sylvain Landry. «Quand les gens rencontrent un obstacle, ils le prennent en note sur un Post-it et viennent le coller sur la station.»

L’équipe décide ensuite sur quelle priorité elle veut se pencher, en fonction de l’effort que cela demande et de son impact. «Cela augmente la capacité à mener de petites actions apportant des gains rapides. L’équipe peut choisir à quelle initiative, à quel caillou dans le soulier, elle veut s’attaquer», explique-t-il.

Penser rétroaction

Avec la méthode agile, les membres de l’équipe se réunissent après chaque itération, rappelle Miguel Hernandez, maître d’enseignement au Département de management de HEC Montréal. «Ce sont de petites rencontres qui s’organisent à la fin de chaque étape où on parle des vraies affaires. On détermine ce qu’on peut améliorer ensemble. C’est une occasion en or de trouver des façons de progresser.»

Il ne s’agit pas de pointer du doigt ses collègues, mais de regarder ce qui a bien et parfois moins bien fonctionné, pour apprendre et avancer. «On devrait aussi se poser quelques questions précises pour établir la suite. Quel est le problème? Quelle est la solution? Qui s’en occupe? À quel moment? L’objectif n’est pas de parler du résultat, mais du processus», explique-t-il. Une méthode dont peuvent s’inspirer les gestionnaires pour créer un plan de match précis et répartir les responsabilités entre les employés. Toutefois, pour que cela fonctionne, il est nécessaire de se centrer sur des objectifs à court terme.

«Ce genre de rencontre s’accompagne d’un tableau de suivi, que chaque membre de l’équipe est appelé à mettre à jour, explique Miguel Hernandez. Cela permet d’être transparent, et c’est aussi encourageant, puisqu’on peut voir les résultats.»

Miser sur l’intelligence collective

Tant l’amélioration continue que l’agilité dépendent de l’intelligence collective. Si bien que les réunions de travail qui abordent des questions plus complexes devraient mettre la table aux échanges d’idées et à la collaboration, estime Philippe Mast, CRHA, cofondateur de CORTO.REV, cabinet de conseil et de recrutement de cadres. «Il faut que les entreprises cessent d’organiser des rencontres qui ne servent qu’à partager de l’information, ce qui ne crée pas de valeur. Cela devrait plutôt servir à résoudre des problèmes. C’est pourquoi je suggère plutôt de présenter trois problématiques, par exemple, et de faire appel à l’équipe pour la recherche de solutions et la prise de décisions.» Un complément enrichissant aux réunions opérationnelles.

Toujours selon Philippe Mast, pour stimuler la créativité des troupes, mieux vaut éviter les rencontres à distance. «Une recherche récente publiée par la revue Nature montre une régression spectaculaire de la créativité pendant et après les visioconférences, cite-t-il. Cela s’explique par le rétrécissement du périmètre cognitif dû à l’écran, le temps excessif consacré aux pairs plutôt qu’à l’environnement et la diminution du divertissement qui est essentiel à la créativité.» En effet, rappelle-t-il, c’est souvent quand une personne se laisse distraire par un chat qui joue ou qu’elle regarde le bleu du ciel que la créativité se pointe. «Une équipe agile, qui apporte des idées nouvelles, ne travaillera donc pas à distance, mais en présentiel.», résume-t-il.