Changer de carrière ou se réorienter professionnellement est une démarche qui nécessite beaucoup d’efforts et génère son lot d’incertitude. Si le jeu peut en valoir la chandelle, il faut toutefois s’assurer de faire le bon choix.

Vous manquez de stimulation au travail? Vous avez l’impression d’avoir fait le tour du jardin, non seulement dans votre emploi, mais aussi à l’échelle de votre secteur d’activité? Si vous pensez à revoir votre orientation professionnelle, sachez que cette décision nécessite une réflexion approfondie et d’établir un solide plan de match.

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S’interroger deux fois plutôt qu’une

Selon Annie Boilard, CRHA, Distinction Fellow et présidente du Réseau Annie RH, la première question à se poser est : pourquoi? «Il faut se demander si ce sentiment d’usure est uniquement relié à notre environnement, si on y peut faire quelque chose, ou s’il s’agit au contraire d’un problème plus profond et d’un réel désir de changement», interroge-t-elle. Quitter un emploi pour une situation professionnelle similaire, c’est du pareil au même, explique Annie Boilard. Cela ne résoudra pas nécessairement le problème initial s’il n’a pas bien été identifié, d’autant plus qu’il faut prendre en compte les efforts inhérents à tout changement de carrière.

Elle met donc en garde contre un virage professionnel motivé par de mauvaises raisons, et rappelle qu’un an après la grande démission engendrée par la pandémie, plus de 80% des travailleurs qui avaient quitté leur emploi disaient regretter leur choix. Une bonne proportion d’entre eux mentionnaient également qu’ils seraient prêts à reprendre leurs fonctions chez leur ancien employeur.

Mais lorsqu’on est sûr de vouloir se réorienter, il est essentiel de bien se connaître pour faire le bon choix,, estime Mario Côté, CRHA, consultant, conférencier et formateur. «Il faut se poser des questions pour déterminer le secteur qui nous correspondrait. Pour nous aider dans cette démarche, on peut se faire accompagner par un conseiller d’orientation», dit-il. Afin de débroussailler le terrain et d’identifier nos forces, il recommande aussi d’effectuer un test basé sur la psychologie positive comme le VIA Characters Strengths Survey.

Ultimement, cet exercice d’exploration permettra de déterminer si le domaine vers lequel on souhaite s’orienter mettra bel et bien nos forces à contribution, et de s’assurer qu’il est en accord avec nos valeurs et nos attentes.

Bien préparer son plan A… et son plan B

«À une certaine étape de sa carrière, on peut avoir envie de faire quelque chose de différent et qu’on a toujours rêvé d’accomplir. Déterminer ce qui nous anime, quels sont nos intérêts et nos passions aide à y voir plus clair dans nos aspirations», fait valoir Richard La Rue, vice-président et coach exécutif, stratège en transition exécutive, Gestion des talents chez Gallagher. Si changer d’orientation professionnelle constitue un risque, il croit que ce risque peut être calculé, notamment en établissant un plan de match réaliste détaillant les étapes qui nous permettront d’atteindre notre objectif. Parmi celles-ci, on retrouvera évidemment la formation visant à acquérir les connaissances nécessaires pour pouvoir œuvrer dans notre domaine d’élection.

Mais attention, car il faut également faire preuve de pragmatisme. «Par exemple, si l’on occupait un poste dans un bureau et que l’on souhaite se diriger vers l’horticulture, il faut être conscient que c’est un secteur qui requiert une bonne forme physique. Est-ce effectivement notre cas?» Mario Côté ajoute que cette réflexion évitera que l’on se «peinture dans un coin» en faisant des choix qui ne nous conviennent pas.

À la question de savoir s’il existe une limite d’âge au-delà de laquelle on devrait abandonner l’idée de se réorienter professionnellement, Richard La Rue répond résolument non. Lui-même a effectué un changement de carrière après avoir été avocat pendant 35 ans et dit avoir d’autres projets sur sa planche à dessin! Grâce à la plasticité du cerveau, l’être humain a en effet la possibilité d’acquérir de nouvelles connaissances et compétences tout au long de sa vie.

Dernier conseil : prévoir un plan B pour amortir la chute en cas d’échec. Si les événements ne tournaient pas en notre faveur, serait-il possible de retrouver un poste chez notre employeur précédent, par exemple? Autrement dit, on envisage d’autres options sans brûler tous ses vaisseaux. «Changer de voie, c’est un peu comme une partie du jeu de serpents et échelles. On doit avoir un plan qui nous sert de guide, mais qui doit aussi être suffisamment flexible si jamais il nous fallait revenir un peu en arrière», conseille Mario Côté. Après tout, ce n’est peut-être que partie remise.