Nous sommes relativement familiers avec la reconnaissance provenant du supérieur hiérarchique, mais on connaît moins celle émanant des collègues et des pairs. Elle joue pourtant un rôle essentiel pour la motivation et le bien-être au travail. Voici ce qu’il faut savoir à son sujet.  

Des études démontrent que la reconnaissance par les pairs est tout aussi importante que celle prodiguée par le patron. Pourquoi? Parce que l’on passe beaucoup de temps avec ses collègues et que l’on interagit constamment avec eux, précise d’emblée Jean-Pierre Brun, professeur émérite de management à l’Université Laval et expert-conseil associé chez Empreinte Humaine. «Des recherches indiquent également que les jeunes générations s’attendent à recevoir tout autant de reconnaissance de la part de leurs collègues que de leur gestionnaire», ajoute-t-il.

Prenant des formes différentes de celle émanant du supérieur hiérarchique, elle ne peut pas non plus se substituer à elle. De plus, ses effets sont très bénéfiques pour l’engagement, la motivation, le sentiment de sécurité psychologique ainsi que la capacité de résolution de problèmes par les équipes. On serait fou de s’en passer!

Reconnaître les qualités et les compétences

La reconnaissance traditionnelle s’attache habituellement à souligner les bons résultats, alors que celle des pairs concerne plutôt la qualité du travail de l’individu. «Elle touche aussi les relations entre employés, si une personne collabore bien avec les autres, qu’elle se montre proactive et propose son aide spontanément ou qu’elle facilite notre travail, par exemple», illustre Jean-Pierre Brun.

Elle prend également des formes variées : un courriel, une mention de vive voix en réunion, un simple Post-it posé sur le bureau peuvent contribuer à donner de la reconnaissance à un collègue. «Si on le fait par écrit, on devrait prendre le temps de rédiger quelques mots plus personnels et pas seulement envoyer un bonhomme sourire», recommande Jean-Pierre Brun. Il existe aussi des applications et des plateformes visant à reconnaître les employés qui se démarquent.

Pour atteindre son but, il faut aussi que le commentaire soit spontané, authentique, et qu’il mette en évidence un bon coup ou les compétences et les qualités de la personne, précise Annie Boilard, présidente du Réseau Annie RH, formatrice et conférencière.

«Au bout du compte, cela permet de créer un sentiment de sécurité psychologique, l’assurance que l’on est accepté et que l’on a de la valeur aux yeux de nos collègues. Cela a aussi un effet positif sur la capacité des équipes à résoudre des problèmes, puisqu’en connaissant les compétences de chacun, on saura à qui confier certaines tâches pour qu’elles soient exécutées de la meilleure façon possible», fait valoir Mario Côté, CRHA, consultant, conférencier et formateur. En plus d’avoir un effet positif sur le bien-être, la motivation et l’engagement des individus, la reconnaissance permet également d’améliorer leur performance.

Le rôle du gestionnaire

Pour aider à faire de la reconnaissance envers les collègues un réflexe, Jean-Pierre Brun estime que les gestionnaires ont un rôle essentiel à jouer. «Il doit former ses équipes à la reconnaissance et les outiller en ce sens. Il pourrait aussi demander aux employés de quelle façon ils souhaiteraient être reconnus, cela donne de bons indices», recommande-t-il.

Mario Côté partage cet avis et ajoute : «Il faut inciter les employés à ‘’s’attraper en flagrant délit de bon coup’’!» Autrement dit, adopter une posture où l’on demeurera attentif à nourrir le besoin de reconnaissance de ses pairs.

Il souligne qu’avoir recours à un jeu comme Totem est une bonne méthode qui permet de partir le bal, puisqu’il consiste à bâtir le totem représentatif de ses collègues de travail en tenant compte de leurs forces et de leurs qualités spécifiques. «Dans ce contexte, j’ai déjà vu des personnes très émues se mettre à pleurer lorsqu’elles constataient qu’elles étaient reconnues», raconte-t-il.

«Le gestionnaire doit stimuler la culture de la reconnaissance, confirme Annie Boilard. On peut créer des activités en ce sens, faire un tour de table en début de réunion d’équipe, mais aussi rappeler à l’employé qui mentionne un élément positif sur un collègue qu’il devrait le lui dire directement.» Il ne faut donc manquer aucune occasion!

Mais c’est aussi un mouvement qui part de l’intérieur de soi, car cela nécessite un travail individuel pour réfléchir en quoi chacun contribue positivement à l’équipe. «Pour assurer la survie de l’espèce, l’être humain est naturellement conditionné à voir d’abord les lacunes et ce qui fait défaut. C’est pourquoi on devrait s’exercer à reconnaître les forces et non pas les faiblesses, mais cela nécessite un effort», note Mario Côté. Toutefois, c’est un effort qui en vaut la peine…