En tant que gestionnaire, quelles compétences émotionnelles clés devriez-vous cultiver au sein de votre équipe pour assurer à la fois son bien-être et sa performance? Réponse : favoriser l’émergence de l’intelligence émotionnelle.

On parle de plus en plus de l’intelligence émotionnelle et de ses bienfaits en milieu de travail. Mais de quoi s’agit-il exactement? Michel Cossette, CRHA et psychologue du travail, professeur agrégé et directeur du Département de gestion des ressources humaines à HEC Montréal, explique qu’elle s’articule autour de quatre compétences clés : la capacité de reconnaître ses émotions, de les gérer, mais aussi de bien comprendre les émotions des autres et d’agir en lien avec celles-ci.

Compétences recherchées

Une bonne connaissance de soi, l’aptitude à s’autoréguler et à exprimer adéquatement ce que l’on ressent, sont en effet des incontournables, affirme Mario Côté, CRHA, consultant, conférencier et formateur. «L’écoute active, autrement dit écouter pour apprendre plutôt que pour répliquer, et la capacité de débattre d’une nouvelle idée plutôt que de la rejeter d’emblée, sont aussi de bons indicateurs du niveau de maturité de l’équipe et de sa capacité à faire preuve d’intelligence émotionnelle», ajoute-t-il.

Paméla Bérubé, CRHA, vice-présidente et cofondatrice de Go RH, abonde dans le même sens et souligne que l’empathie et la bienveillance font aussi partie des qualités à rechercher.

À cet égard, et pour assurer la sécurité psychologique au sein de l’équipe, le gestionnaire devrait donner l’exemple. «Cela commence par l’acceptation de ses propres vulnérabilités afin d’encourager les autres à faire de même. Mais il faut rester attentif, et si des membres de l’équipe s’en prennent à ceux qui ont montré leurs vulnérabilités, le gestionnaire devra intervenir pour préserver cet espace de sécurité psychologique», prévient Mario Côté.

Beaucoup de bienfaits

Favoriser l’intelligence émotionnelle en vaut-il la chandelle? Absolument. «Des études démontrent qu’elle se traduit en efficacité et en capacité à innover. Il existe aussi un rapport direct avec le partage de connaissances : il s’effectue plus facilement lorsqu’il y a une connexion et une bonne communication avec les autres, ce qui se répercute sur la volonté de partager des apprentissages», indique Michel Cossette. L’intelligence émotionnelle serait également reliée à la performance des équipes, car elle agit sur la mobilisation.

«On gagne aussi en agilité, parce qu’on passe moins de temps à gérer les irritants. On peut donc concentrer notre énergie sur nos fonctions et nos objectifs», fait valoir Paméla Bérubé. Mieux équipées pour apprendre de leurs erreurs, les équipes où l’intelligence émotionnelle est à l’honneur sont aussi capables de collaborer efficacement et de s’adapter aux situations changeantes.

Autre avantage notable : une meilleure gestion des conflits. «Lorsqu’on se connaît bien et qu’on comprend les autres, cela a tendance à atténuer les tensions. On les désamorce au fur et à mesure en communiquant mieux les messages et en s’autorégulant», remarque Mario Côté.

Ce n’est pas tant le conflit en soi qui est problématique, mais la façon dont on le traite, note toutefois Michel Cossette. «Il peut en découler des conséquences tant positives que négatives. Si on est davantage en relation avec les autres et qu’on est à l’aise de parler des irritants, alors nommer les conflits peut être gagnant pour tout le monde», fait-il observer.

Mais ce n’est pas tout : Mario Côté rappelle que ce qui distingue tous les grands leaders est leur intelligence émotionnelle. Or, dans certaines organisations, on ne valorise que les chiffres et l’atteinte de résultats, et pas nécessairement l’intelligence émotionnelle ni les interactions positives entre les individus. Un piège qui pourrait causer des dommages dans les équipes et coûter cher à long terme.

Soutenir et accompagner

Comment détecter les compétences reliées à l’intelligence émotionnelle chez de futurs employés? Au moment de l’entrevue d’embauche, on pourrait questionner le candidat sur la façon dont il a réagi dans une situation difficile à gérer par exemple. «Sa réponse nous donnera de bons indices», estime Mario Côté.

Par ailleurs, il est possible de cultiver ces compétences tant au sein de son équipe que de soi-même comme gestionnaire. L’accompagnement, le coaching, les formations sur mesure sont autant de moyens de soutenir cet apprentissage. Par exemple, on retrouve des formations en ligne sous forme de capsules de 15 minutes que l’employé peut facilement inclure dans son horaire.

Paméla Bérubé insiste aussi sur la nécessité de revoir les outils de mesure qui, dans ce contexte, peuvent devenir désuets. «Dans la mesure où l’on s’intéresse aux aspects qualitatifs et pas uniquement quantitatifs, nos systèmes d’appréciation de la contribution des employés ne sont plus adaptés. En revanche, une évaluation 360 pourrait s’avérer très utile en permettant d’obtenir la rétroaction des collègues, des clients, etc.», conclut-elle.