Quand Reed Hastings, cofondateur et dirigeant de Netflix, raconte l’histoire de sa multinationale, il évoque un milieu de travail réactif et innovant au sein duquel un style de management bien particulier peut éclore. Fini, les règles et les contrôles : place à un maximum de franchise!

La règle ? Pas de règles! – Netflix et la culture de la réinvention

Hastings, R., et Meyer, E., La règle? Pas de règles! – Netflix et la culture de la réinvention, Paris, Éditions Buchet Chastel, 2021, 385 pages.

Chez Netflix, la culture de l’entreprise repose sur la liberté et la responsabilité. Dans un dialogue avec Erin Meyer, professeure de management à l’Institut européen d’administration des affaires (INSEAD), Reed Hastings relate les débuts hésitants de son entreprise de location de DVD par Internet à la fin des années 1990, puis sa progression fulgurante pour devenir un géant de la distribution de films et de séries télévisées. Le secret de ce succès? Au-delà d’avoir saisi le potentiel de la révolution numérique, les fondateurs ont su faire évoluer les mentalités.

Les talents d’abord

«Pour avoir un milieu de travail idéal, il faut des collègues remarquables», souligne Reed Hastings. C’est d’ailleurs la priorité numéro un de l’entreprise : créer un environnement de travail composé exclusivement de ce type de collègues, c’est-à-dire de «gens de très grand talent, exceptionnellement créatifs, qui abattent une somme de travail considérable et [qui] collaborent de façon efficace». Le cofondateur de Netflix ne mâche pas ses mots : «Les toxiques, les feignants, les gens adorables aux résultats non éblouissants ou les pessimistes encore présents dans une équipe affaiblissent la performance globale.» Pour générer cette haute densité de talents, pas de compromis! «Nous allions embaucher les meilleurs et les payer mieux que tout le monde sur le marché. Nous allions former nos cadres pour qu’ils aient le courage et la discipline de se défaire de tout employé ayant un comportement indésirable ou n’obtenant pas des résultats exemplaires», raconte-t-il.

Ensuite, plus de franchise

Pour stimuler une culture de la franchise, les gestionnaires chez Netflix ajoutent systématiquement un point «rétroaction» à l’ordre du jour de leurs entretiens. Ce franc-parler exige toutefois le respect de certaines règles : il faut réagir avec gratitude quelle que soit la critique, et surtout signifier aux employés que leur franchise ne nuira pas à leur carrière, mais renforcera plutôt leur place dans l’équipe. Autre précaution utile? Les gestionnaires doivent enseigner à leurs équipes quatre manières d’émettre et de recevoir des critiques :

1- exprimer le fond de sa pensée avec une intention positive sans chercher à blesser ou à nuire ;

2- offrir une rétroaction constructive en précisant ce que la personne ciblée peut améliorer ;

3- recevoir les commentaires en étant ouvert d’esprit ;

4- réfléchir aux remarques et décider de les accepter ou non.

Enfin, éliminer les contrôles!

Reed Hastings invite aussi les organisations à se débarrasser des contrôles : fini, les congés prédéterminés, l’approbation des frais professionnels et de déplacement, les processus de validation. Cette liberté acquise encourage la prise de décision rapide, mais impose des limites : «Quand vous apprenez que certains abusent du système, licenciez-les et discutez ouvertement des excès constatés – même s’il s’agit de personnes de grande qualité par ailleurs. Ceci est nécessaire pour que les autres comprennent bien les conséquences d’un comportement irresponsable.» Une façon de dire à son personnel : «Montrez-vous digne de cette liberté!»

Article publié dans l'édition Été 2022 de Gestion