Il y a de ces rencontres qui ont comme heureux résultat de vous rassurer sur le sort de nos entreprises et de nos organisations. La suite, je l’espère, saura vous en convaincre…

« Avec un tel parcours et un tel niveau de responsabilités, on est en droit de s'interroger sur ce qui a fait de Jonathan Durocher l'homme et le gestionnaire qu'il est aujourd'hui devenu »

C’est jour de congé pour tous, mais Jonathan Durocher, président et chef de la direction de Banque Nationale Investissements inc. est tout de même à pied d’œuvre, épaulé par les quelque 130 personnes qui planchent avec lui à faire fructifier les avoirs de leurs clients. Même lors d’un jour férié, les flux financiers ne s’arrêtent pas! Rien de remarquable à la situation, me direz-vous? Et si je vous disais que le dirigeant en question n’est âgé que de... 36 ans, et qu’il veille sur plus de 47 milliards de dollars d’actifs!


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Un parcours d’exception

Pur produit du baccalauréat en administration des affaires de HEC Montréal, auquel il ajoutera par la suite un MBA de l’Université de Sherbrooke, Jonathan Durocher entre à la Banque Nationale en 2003. Sa montée au sein de l’institution financière sera fulgurante : il touchera successivement aux questions de conformité, à la gestion de patrimoine, en plus d’avoir activement participé à l’acquisition de deux firmes de valeurs mobilières au bénéfice de la Banque. À peine quinze ans plus tard, voilà donc Jonathan Durocher, les rênes de Banque Nationale Investissements bien en main. Avec un tel parcours et un tel niveau de responsabilités, on est en droit de s’interroger sur ce qui a fait de Jonathan Durocher l’homme et le gestionnaire qu’il est aujourd’hui devenu : « Je ne suis pas tellement porté sur la hiérarchie, et c’est une chose que j’ai dû apprendre, nous dit-il en substance. Je suis près du terrain, près des gens et à l’écoute de ces derniers. C’est quelque chose de très important pour moi. »

L’humain, un investissement qui rapporte

Dans un domaine aussi conservateur et, ne nous le cachons pas, parfois aussi froid et cartésien que celui de l’investissement financier, le style de direction de Jonathan Durocher est certes inattendu. Car si le dirigeant a su exploiter avec succès l’hémisphère gauche de son cerveau, le rationnel et le factuel, c’est surtout grâce à l’hémisphère droit, celui axé sur l’émotif, qu’il réussit quotidiennement à mener ses troupes avec le brio que tous lui reconnaissent aujourd’hui. En somme, pour Jonathan Durocher, la gestion des personnes, c’est essentiellement une affaire d’intelligence émotionnelle, un concept développé et popularisé par le psychologue américain Daniel Goleman. « À un point dans une organisation, tout le monde est intelligent et compétent, fait-il valoir. Ce qui fait souvent la différence, c’est l’utilisation que l’on fait de l’intelligence émotionnelle. Ça ne s’apprend pas sur les bancs d’école, et ça vient essentiellement avec l’expérience! », mentionne-t-il.

« ... la gestion des personnes, c'est essentiellement une affaire d'intelligence émotionnelle ... »

Faire preuve d’intelligence émotionnelle, c’est en grande partie développer cette nécessaire empathie à l’égard de son prochain. Mais c’est surtout, dans la perspective de Jonathan Durocher, faire preuve d’un sens affiné de la situation et être conscient de ses propres réactions et de ses propres capacités devant ladite situation. « Tes savoirs et ton savoir-faire vont pouvoir te propulser jusqu’à un certain point. Pour ma part, j’ai toujours aimé être un spécialiste, un expert. Mais plus tu gravis les échelons de l’organisation, moins tu peux être ce spécialiste qui connaît tout. À un moment donné, ça ne fonctionne plus! La situation exige alors de faire beaucoup plus appel à ton savoir-être! », résume avec justesse le financier.


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La marque du bon leader

Cet intérêt à l’égard des personnes qui entourent le dirigeant n’est pas fortuit, pas plus qu’il n’est factice. Si l’institution financière dont Jonathan Durocher a la charge connaît une croissance remarquable, c’est entre autres grâce aux liens de qualité qu’il a su cultiver au fil des ans avec ses collaborateurs. Et la chose ne va pas toujours de soi, son jeune âge amenant inévitablement la question de la crédibilité aux yeux de ses employés, parfois plus âgés et plus expérimentés. Mais la posture d’ouverture qu’il adopte lui permet notamment de surmonter cet écart : « Je ne peux pas prétendre tout connaître. […] Je veux apprendre des autres. Je demande toujours aux gens dans l’organisation de prendre une demi-heure afin de m’expliquer ce qu’ils font, quels sont leurs défis. C’est une discipline que je me suis toujours imposée, que de comprendre ce que les gens font, ce sur quoi ils travaillent. Ça permet de tisser des liens dans l’organisation. » S’intéresser aux autres et faire preuve d’empathie, ça se conjugue au présent, mais également au futur, pour Jonathan Durocher. « Je mets beaucoup d’efforts, voire même d’amour, sur le plan de développement de nos employés. […] J’essaie un peu de sortir mes collaborateurs de leur zone de confort », tout cela étant dit et fait afin d’amener ces derniers à progresser et à se dépasser. N’est-ce pas là le fait d’un bon leader? Il va sans dire que le style de direction adopté par Jonathan Durocher surprend dans un tel milieu. Se sent-il appuyé par ses patrons et par l’organisation? Sans hésitation, oui! « Ça part de Louis Vachon [président et chef de la direction de la Banque Nationale], qui n’a pas peur de faire les choses différemment. Les valeurs de la banque et le leadership de la haute direction y sont pour beaucoup. Il y a toujours de l’ouverture, et l’adhésion au changement est grande ici. » La bonne personne, les bonnes valeurs, le bon milieu… Tout concorde!

Le nécessaire retour sur soi-même

Mais on ne parvient pas au niveau où se situe actuellement Jonathan Durocher sans avoir développé au fil des ans une certaine rigueur. Pour le dirigeant, papa d’un petit garçon âgé de trois ans, la conciliation entre toutes les sphères de sa vie est essentielle : « Pour moi, la discipline, c’est entre autres d’avoir un horaire assez strict, de manière à avoir assez de temps à consacrer à ma famille. Mais c’est également être capable de se donner du temps à soi-même. Pour prendre soin de sa santé, avec l’exercice, mais aussi pour être capable de réfléchir. Je sais que je pourrais consacrer 100 % de mon temps aux réunions. Mais j’essaie de me donner une demi-journée par semaine pour réfléchir, en lisant des articles sur un domaine autre que celui de la finance. J’apprends, et ça me sort également de ma zone de confort. »

« La recherche de défis est une constante chez lui, et rien ne saurait ébranler l'importance et la place prises par les valeurs ... »

Membre de la génération Y, Jonathan Durocher incarne bien certaines des caractéristiques qui animent et transportent les jeunes femmes et les jeunes hommes de sa cohorte. La recherche de défis est une constante chez lui, et rien ne saurait ébranler l’importance et la place prises par les valeurs, tant dans sa vie personnelle que dans sa vie professionnelle. Ces deux éléments peuvent-ils être conjugués? « Il y a beaucoup de changements intéressants qui se passent à l’heure actuelle, que l’on pense à la relation que les jeunes entretiennent par rapport à la propriété ou à la montée de l’économie du partage. La place qu’occupe l’argent est un peu différente, mais il reste que les besoins sont toujours les mêmes. C’est sur les valeurs que l’on doit mettre l’accent avec eux. Comme clients, et aussi comme employés. » À cet effet, le principal intéressé n’est pas peu fier de la gestion de patrimoine par regroupement familial, une perspective unique et originale de gestion de portefeuille développée sous sa gouverne. Ce regroupement permet aux investisseurs et aux membres de leur famille de mettre en commun leurs avoirs, et d’ainsi bénéficier d’honoraires de service dégressifs et de plusieurs avantages exclusifs.

La tête et le cœur bien ancrés à Montréal

Avec un profil comme le sien et les résultats probants qui s’accumulent, on peine à croire que Jonathan Durocher n’ait pas reçu d’offres de la part des poids lourds de la finance mondiale pour occuper un poste prestigieux à Londres ou à New York, une chose que notre dirigeant confirme avec un sourire presque gêné. « Ce qui fait que j’ai du plaisir ici, c’est de réaliser que mon travail fait une différence, de pouvoir toucher à plein de choses, que l’on me permette d’être créatif. Ces ingrédients sont très durs à retrouver ailleurs. » Avec le modèle d’architecture ouverte de Banque Nationale Investissements, l’organisation fait déjà appel aux plus grandes firmes et aux meilleurs experts financiers partout sur le globe afin de gérer certaines catégories d’actifs. Et puis, Montréal, sans prétendre au titre de place financière d’envergure mondiale, est en voie de se forger une intéressante réputation à titre de pôle d’innovation, notamment au chapitre des technologies de l’information et de la communication. « On s’inspire à coup sûr de ces secteurs-là! », souligne le gestionnaire. Quelques minutes passées en compagnie de Jonathan Durocher vous convaincraient de la justesse de caractère du personnage. L’homme est brillant, et surtout sincère, chaleureux et attentif à son prochain. Et à coup sûr, le dirigeant l’est tout autant. Car « on dirige comme on est », avait coutume de dire le professeur émérite Laurent Lapierre, de HEC Montréal. Pour sa part, Jonathan Durocher a compris que la frontière entre la personne et le gestionnaire est souvent plus imaginaire que réelle. La considération pour l’humain, véritable pierre d’assise de sa philosophie de gestion, n’est autre que le prolongement de sa personnalité. Authenticité et cohérence… En faut-il davantage pour réussir, même dans les milieux les plus performants tels celui de la finance?