Ces dernières années, beaucoup a été dit de l’expérience employé, du bien-être et de la santé mentale des travailleurs. De façon assez surprenante, les dirigeants sont invisibilisés quant à ces nouvelles préoccupations fondamentales, ce qui les rend vulnérables aux risques psychosociaux inhérents à la position qu’ils occupent au sein de l’entreprise.

La prévention des risques psychosociaux au travail devrait prendre en compte ceux auxquels sont confrontés les dirigeants. En effet, ces derniers jouent un rôle crucial dans les organisations, et leur conscience des enjeux autant que leurs actions peuvent être déterminantes pour réduire les insatisfactions professionnelles et le mal-être au travail des équipes.

4 catégories de stresseurs

Tout d’abord, il est essentiel que les dirigeants prennent soin d’eux-mêmes et qu’ils portent une attention particulière aux facteurs de stress qui les affectent. Selon la typologie des stresseurs des dirigeants de PME établie par Thomas Lechat et Olivier Torrès, ces facteurs de stress peuvent être regroupés en quatre catégories.

Au sommet des stresseurs :

  • Les enjeux de pérennité de l’organisation en péril;
  • L’enfer du «devoir entrepreneurial» lié à l’imputabilité de la survie et à la prospérité de l’organisation;

Les autres groupes sont plus modérés, bien qu’ils représentent tout autant des facteurs stressants pouvant mener à l’épuisement :

  • Le poids de la pression managériale (gérer le cas par cas des employés);
  • La résignation patronale intériorisée.

Cernés par le stress

Les dirigeants sont constamment soumis à la pression de maintenir la survie et la prospérité de leur entreprise. Cela peut être particulièrement stressant, car le poids de cette imputabilité repose entièrement sur leurs épaules. Le stress peut provenir de diverses sources, telles que la gestion des finances, la satisfaction des clients, le maintien de la qualité des produits ou des services, ou encore la gestion des employés.

En outre, la taille de l’entreprise joue un rôle prépondérant dans le niveau de stress du dirigeant. Plus l’entreprise est petite, plus son équilibre est lié à celui de son dirigeant. En d’autres termes, le dirigeant d’une petite entreprise ou d’un OBNL peut ressentir davantage de pression, car le succès ou l’échec de l’entreprise dépend directement de ses actions et de ses décisions. À partir du moment où les dirigeants doivent concrètement composer avec la pression, ils ont tendance à la déverser au sein de l’organigramme. Donc, plus l’organisation est petite, plus la mauvaise gestion du stress du dirigeant affecte l’ensemble des employés. Les cadres intermédiaires font alors office de tampon et de soutien social, tant auprès des dirigeants que des employés, et se mettent du même coup eux-mêmes à risque de ressentir les effets néfastes de la pression.

Se préserver soi-même pour veiller au bien-être de son entreprise et de son équipe

Il est donc essentiel pour les dirigeants de PME de développer des stratégies efficaces de gestion du stress afin de maintenir non seulement leur santé mentale et physique, mais aussi la santé et la pérennité de leur entreprise.

L’actuelle situation économique VICA (volatile, incertaine, complexe et ambiguë), la forte inflation et la pénurie globale de main-d’œuvre sont autant de facteurs contextuels contribuant à augmenter le stress des dirigeants. Il est donc important de les analyser, de mesurer leur poids et d’agir.

Un dirigeant conscient du péril de son entreprise risque de se résigner et de nuire à la santé psychologique de ses employés. Étant lui-même en effort d’adaptation, pris sous le poids de la pression, il peut difficilement se tenir à distance de l’anxiété et offrir la sécurité psychologique nécessaire à son équipe.

Plus forts ensemble

C’est pourquoi il est important pour la santé de tous de recréer l’alliance entre dirigeants et employés face aux enjeux d’organisation du travail, des relations humaines et de la santé organisationnelle. Le dirigeant peut partager sa réalité et ses facteurs de stress lors de moments d’échanges collectifs organisés afin d’analyser et de prévenir les risques psychosociaux. Ces mécanismes de participation servent à cerner les facteurs de risques dominants, mais aussi à partager ou à construire une réalité commune des enjeux, pour ensuite stimuler la solidarité. Le dirigeant n’a donc pas à être exclu de ces mécanismes, bien au contraire.

Trouver des alliés extérieurs

Il est aussi possible pour le dirigeant de trouver des ressources externes pour lutter contre ses stresseurs. Ce peut être auprès de coachs, de psychologues organisationnels, d’experts de l’enjeu organisationnel (comptabilité, RH, Innovation, etc.) ou encore auprès des chambres de commerce. Partager ses difficultés et prendre du recul est toujours grandement bénéfique.

Éviter de s’isoler au sommet

Faire partie de cercles de dirigeants peut aussi permettre d’aborder des enjeux en toute franchise. Il pourrait être profitable de repenser la mission des comités de direction, afin de mieux répartir les charges et les responsabilités et de partager l’imputabilité.

La force du lien social constitue l’un des meilleurs facteurs de protection, autant pour le dirigeant que pour les employés. Sentir que l’on fait partie d’une équipe sur laquelle on peut compter est le socle du bien-être professionnel et rend le milieu de travail beaucoup plus sain.

En conclusion, pour prévenir les risques psychosociaux du travail, le dirigeant doit prendre soin de lui, identifier les facteurs de stress qui l’affectent et mettre en place des mesures adaptées sur le plan personnel, relationnel et organisationnel. Il contribuera ainsi à créer un environnement de travail assaini, un gage d’équilibre pour lui-même et pour son équipe.