De plus en plus, les entreprises travaillent à mettre sur pied des équipes diversifiées. Mais comment éviter de reproduire des silos et plutôt générer des collaborations fructueuses et des échanges riches?

La diversité et l’inclusion au travail, que ce soit sur la base du genre, de l’âge, de la culture ou de la situation de handicap, sont à l’ordre du jour. D’ailleurs, l’approche EDI (équité, diversité et inclusion) est une tendance lourde qui s’est déployée de façon marquée ces dernières années.

Si des progrès ont été réalisés à cet égard, il n’en reste pas moins que si l’on n’y prend pas garde, la diversité peut finir par ériger des silos au sein de l’organisation. Voici comment éviter de tomber dans les pièges.

Diversité dans toute la structure organisationnelle

Embaucher des employés issus de la diversité ne suffit pas, estime Jean-Pierre Dupuis, professeur honoraire au Département de management de HEC Montréal. «Si ces employés se retrouvent systématiquement au bas de l’échelle par exemple, on va créer des ghettos. Il faut les répartir tout au long de la structure, jusqu’aux postes de gestionnaires», mentionne-t-il.

Il souligne qu’il n’est pas ici question de remplacer les gestionnaires déjà en poste, mais plutôt d’orienter les nouvelles embauches. «Si la diversité est présente dans toute la structure, les réseaux informels seront naturellement plus inclusifs, ce qui évite du même coup le sentiment d’exclusion», explique-t-il. Il ajoute que la politique en matière de ressources humaines, de recrutement ou de promotion se doit aussi d’être équitable et transparente.

Pour sa part, Émilie Ruffin, consultante principale et leader EDI chez Humance, signale que l’implantation d’une culture inclusive passe aussi par  une bonne communication. «Il faut valoriser les façons de faire différentes et mettre en place des pratiques de rencontres inclusives afin que le potentiel de chacun puisse être mis à profit», recommande-t-elle.

Elle précise que les leaders devraient également se comporter en modèles authentiques et inclusifs. «Il faut répéter les messages, inviter des personnes différentes dans la prise de décisions, et lorsque l’on observe sur le terrain des comportements ou des idées non inclusives, on intervient avec doigté pour rectifier le tir, de préférence devant tout le monde et non pas de façon individuelle», poursuit Émilie Ruffin.

Elle affirme que lorsque les idées et les apports de personnes différentes sont soulignés et mis de l’avant, cela a pour effet de les encourager à s’impliquer. Des plans de relève inclusifs, du mentorat et du parrainage visant à améliorer la diversité sont aussi d’excellentes pratiques à mettre en place.

Sensibiliser et conscientiser

Émilie Ruffin nous met également en garde contre les biais de perception. Car si une équipe diversifiée va contribuer à leur tenir tête, une prise de conscience s’avère malgré tout nécessaire.

À cet égard, Jean-Pierre Dupuis recommande de miser sur les activités de sensibilisation. «Les personnes issues de la diversité peuvent avoir connu des trajectoires difficiles, leurs collègues ne sont pas nécessairement au courant. De plus, nombreux sont ceux qui ont du mal à croire que certains ont encore des comportements déplacés. Or, à peine deux ou trois individus suffisent pour gâcher le climat de travail dans une entreprise», souligne-t-il. Il précise que cette démarche devrait être axée sur l’empathie et non pas sur la culpabilisation, une approche contreproductive qui pousse les gens à se braquer plutôt qu’à ouvrir leurs horizons.

Livrer des témoignages afin de pouvoir donner un visage à cette réalité et de rendre la démarche plus humaine est une bonne façon de sensibiliser. De nombreuses vidéos à cet égard sont d’ailleurs disponibles sur Internet.

La mise en place d’activités constitue une autre piste à explorer. On pense par exemple à des activités culturelles ou culinaires pour découvrir la diversité, ce qui contribue à briser les silos. «Attention à ne pas proposer des activités trop ciblées ou nichées, mais au contraire accessibles à tous comme un barbecue collectif. En revanche, inviter son équipe à jouer au hockey n’est pas nécessairement la meilleure chose à faire, puisque tout ne monde ne sait pas patiner», illustre-t-il.

Émilie Ruffin admet qu’il s’agit d’un travail de longue haleine qui nécessite des efforts. «C’est moins confrontant et plus confortable lorsqu’on est entouré par des gens qui nous ressemblent, qui sont des clones de nous-mêmes…», note-t-elle. Cela dit, le jeu en vaut la chandelle, car les recherches démontrent que les décisions prises par des équipes diversifiées sont souvent novatrices et apportent des réponses plus efficaces aux problématiques.

«Il faut prendre de nouvelles habitudes de travail. C’est plus difficile au début, mais une fois ces pratiques bien implantées, on en voit les bénéfices à long terme», assure-t-elle.