C'est en 2005, dans un appartement de Brooklyn, « berceau international de la créativité »¹, qu'est née Etsy, plateforme internationale de vente d'articles faits main et vintage. Depuis, beaucoup d'eau a coulé sous le pont.

De simple communauté virtuelle rassemblant des créateurs et artisans locaux, Etsy est maintenant cotée en bourse, certifiée « B Corporation »² depuis 2012, et a généré plus de deux milliards de dollars en chiffre d'affaires annuel brut en 2015. Mais au-delà de l'incommensurable succès financier de l'entreprise, ce que nous retenons de la rencontre avec son PDG Chad Dickerson à C2 Montréal, c'est que, plus qu'une entreprise, Etsy est un véritable écosystème.

Connecter les communautés

Chad Dickerson (source : www.etsy.com)

Chad Dickerson (source : www.etsy.com)

Depuis sa création, bien enracinée dans une vision transformative de la chaîne de valeur, Etsy travaille à la réinvention des modèles d'affaires, et elle le fait avec brio. Non seulement repense-t-elle la traditionnelle structure de production, de mise en marché et d'achats de biens, mais elle le fait avec un but unique: changer la société. La dimension sociétale est tissée dans l'ADN même de l'entreprise : de la technologie qui favorise l'établissement de connections (selon Chad Dickerson, coder tiendrait d'ailleurs plus de l'art que la science), jusqu'à la structure de rémunération, tout chez Etsy repose sur une réflexion sociale, voire environnementale. D'ailleurs, si l'entreprise, récemment cotée en bourse, doit générer des profits, c'est dans un esprit de communauté qu'elle le fait : pour tout achat sur Etsy, 3,5 % de la transaction est en effet remis à Etsy et 96,5 % de celle-ci est réinjecté à la société. Comme l'explique Chad Dickerson : « Chez Etsy, nous voulons que tout le monde soit gagnant ». Et c'est là que réside tout le génie de ses fondateurs. L'entreprise nourrit une vue alternative de l'économie : « Nous essayons d'user de notre pouvoir de marché pour représenter les gens et leur faciliter la vie. Dans cet esprit, nous avons d'ailleurs développé un programme de vente où les artisans vendeurs sur Etsy commercialisent leurs produits chez des grands chaînes américaines telles que Macy's et Whole Foods. Nous voulons simplifier la vie de nos artisans.»

Une redéfinition de la notion de valeur

Etsy est un catalyseur de relations d'affaires entre artisans locaux et acheteurs du monde entier, et un supporteur de communautés. De par sa position à la croisée de myriades de communautés à l'échelle internationale, elle est investie d'une mission fondamentale : créer de la valeur pour ses partenaires et actionnaires, mais aussi - et surtout - pour l'humain. Et pour les fondateurs d'Etsy, cette valeur repose sur des principes qui dépassent largement la quête de profit. Comme l'expose Chad Dickerson : « Respecter les individus, leur offrir des opportunités, redonner aux communautés locales, c'est là la définition d'une entreprise florissante. »³

De la parole aux gestes

Tel que nous pouvons le lire sur le site Internet de l'entreprise « Etsy est désormais une entreprise mondiale, dont l'objectif principal est de permettre un changement durable de la société. » Si quelques sceptiques peuvent être tentés de douter de l'authencité de ces propos (qui, ne nous le cachons pas, peuvent être l'apanage d'entreprises en quête de capital de sympathie), la volonté d'Etsy est bien réelle : toutes les décisions, d'affaires ou non, visent le bien-être des communautés et la participation active à la protection et au développement de son écosystème. Du compostage des déchets, jusqu'aux pratiques de recyclage et de gestion des déchets (pour inciter au recyclage, les employés d'Etsy ne possèdent d'ailleurs pas de poubelle individuelle), Etsy incarne véritablement sa mission et constitue un parfait exemple de l'adage « Joindre le geste à la parole ».


Notes

¹ Citation de Stowe Boyd, futuriste et chef de recherche chez Gigaom, et conférencier à C2 Montréal édition 2016.

² Certification émise par B Lab, association à but non lucratif jaugeant les entreprises sur la base de leur manière de traiter leurs employés, des bénéfices apportés par celles-ci à la communauté et à l'environnement, et de la transparence de leurs modes de gestion.

3 « good business »