Durant la pandémie, nous avons tous dû faire preuve de flexibilité. Mais elle faisait déjà partie des habiletés à posséder bien avant que la COVID ne frappe. Maintenant que nous avons pu prendre du recul, que signifie être flexible en 2023?

Durant les trois dernières années, employés et gestionnaires ont démontré une flexibilité hors du commun pour s’adapter aux contraintes générées par la pandémie. Alors que l’on revient progressivement «à la normale», la souplesse est encore de mise.

Sarah Berkane, directrice des programmes Santé et mieux-être en milieu de travail au Groupe entreprises en santé, souligne toutefois que l’on observe une fatigue généralisée des employés, essoufflés d’être en constante adaptation. «Après avoir dû s’habituer au télétravail, on est ensuite passé au mode hybride et actuellement, c’est le retour au bureau, imposé dans bien des cas», remarque-t-elle.

Or, lorsque la flexibilité est utilisée à bon escient, il est possible d’en faire une alliée qui facilite les transitions. Lorsqu’on est en période de turbulences, elle aide à retrouver un équilibre et contribue à assurer une relative stabilité.

Une responsabilité partagée

Mais d’abord, qu’est-ce que la flexibilité? Pour les employés, on peut la définir comme la capacité de s’adapter à un environnement en mutation et à des demandes changeantes. Du côté des employeurs, elle consiste à offrir la possibilité aux travailleurs de gérer certaines de leurs conditions de travail (horaires, dates de vacances, etc.), mais aussi d’avoir leur mot à dire sur leurs délais et échéanciers, sur les moyens et ressources à utiliser pour accomplir leurs tâches… «C’est une forme d’autonomie qui nécessite néanmoins de l’ouverture et de la maturité de la part des entreprises», indique Shanelle Pascal, directrice talents chez Brio, Boutique de management.

Sa collègue Alexandra Corbeil, associée et responsable des opérations, relève d’ailleurs que certains employeurs ou écosystèmes de travail ont de la difficulté à ce chapitre. «Dans les environnements plus rigides, on gère en fonction des heures de travail effectuées et non pas des résultats et des livrables», note-t-elle, ce qui peut nuire à l’établissement d’un climat de confiance.

Elles insistent d’ailleurs pour dire qu’il devrait s’agir d’une responsabilité partagée et d’un engagement commun. «Pour créer une formule gagnante, la flexibilité devrait aller dans les deux sens, tant chez les employés que les employeurs», estime Alexandra Corbeil.

Instaurer une politique claire

La flexibilité n’exclut pas pour autant les balises, précise Pierre Lainey, maître d’enseignement au Département de management à HEC Montréal. C’est d’ailleurs l’une des clés du succès. Le gestionnaire pourrait décider, par exemple, que certaines tâches devront obligatoirement être réalisées au bureau, en mode présentiel. «En l’absence de politiques claires, cela peut créer de la confusion, mais aussi un sentiment d’iniquité entre les employés», prévient-il.

L’inclusivité est un autre élément à considérer. «Implanter des mesures facilitant la conciliation travail-famille pour ceux qui ont des enfants pourrait être perçu comme une forme d’injustice pour ceux qui n’en ont pas. Afin d’éviter cet écueil, on pourrait tout simplement demander aux travailleurs à quelles mesures ils souhaiteraient avoir accès en matière de flexibilité», suggère Pierre Lainey.

«Il faut instaurer un cadre pour éviter qu’un sentiment d’inégalité se développe. Le gestionnaire doit être très clair sur ses intentions, ses priorités et les principes de collaboration à respecter», renchérit Shanelle Pascal. Par exemple, au niveau des règles à suivre en matière de télétravail ou encore de réunions d’équipe.

Faciliter le retour au bureau

Alors que plusieurs entreprises exigent désormais de leurs employés de revenir au bureau quelques jours par semaine ou par mois, Sarah Berkane note que faire preuve de flexibilité peut leur faciliter la tâche. «Le changement doit avoir du sens, il faut expliquer les raisons pour lesquelles on demande le retour en présentiel. Sans cela, c’est le stress et l’incompréhension qui s’installent, et des employés pourraient démissionner plutôt que de se voir imposer des conditions dont ils ne saisissent pas la nécessité», souligne-t-elle.

Elle ajoute que l’on a pu voir de nettes différences en termes de santé et de bien-être chez les employés d’entreprises faisant preuve de souplesse dans la gestion du retour au bureau.

Pour s’assurer de mettre en place les conditions gagnantes, Sarah Berkane recommande de miser sur l’écoute et la consultation afin de mieux cerner les besoins des travailleurs. La façon de communiquer sur les changements attendus est également importante, tout comme les mesures d’accompagnement pour atteindre les résultats souhaités.

Il faut aussi se rappeler que la même recette ne conviendra pas nécessairement à tous. Ce qui fera le bonheur de l’un risque de déplaire à l’autre, d’où la nécessité de rester ouvert au dialogue et de faire preuve de créativité dans sa flexibilité!