Combien de temps passez-vous en réunion? Êtes-vous satisfaits à la fin de ces rencontres ou avez-vous l’impression d’avoir gaspillé un temps précieux? Rendre vos réunions plus participatives, voilà une solution qui pourrait vous permettre de sauver un temps fou... et de mobiliser vos équipes.  

Une part non négligeable de notre temps de travail est consacrée aux réunions. Selon une enquête menée par Barco et Circle Research auprès de 3 000 salariés de bureau dans huit pays, les employés assisteraient à dix réunions par semaine, pour une moyenne de huit heures. 56 % de ces salariés considèreraient ces réunions inutiles et 57 % les souhaiteraient moins nombreuses et plus courtes. Ces chiffres sont d’autant plus intéressants que l’amélioration du déroulement d’une seule réunion par semaine aurait de nets avantages quant à la santé et à la motivation des travailleurs1.

Les réunions sont le miroir de notre culture organisationnelle2 et notre façon de les mener, une manifestation du fonctionnement de notre organisation. Elles représentent une pratique formelle d’échange, de cocréation et de prise de décision. Comment créer les conditions favorables pour que chacun puisse s’exprimer et qu’une dynamique de collaboration créative, audacieuse et courageuse s’installe, même dans une réunion virtuelle?


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La pandémie de la COVID-19 a généré des transformations urgentes et à grande échelle dans le monde du travail, notamment avec le déploiement du télétravail. Auparavant, ce type de travail délocalisé, bien souvent à domicile, apparaissait comme une occasion de réduire les déplacements et la pollution, d’améliorer la qualité de vie en favorisant une meilleure organisation du travail et la conciliation avec la famille. Aujourd’hui, la pandémie a entraîné la nécessité de recourir davantage à la technologie soutenant le télétravail, dont celle mise en place pour tenir des réunions virtuelles. Or, les bonnes pratiques de réunion sont encore plus importantes pour les réunions virtuelles afin de contrer le phénomène de la « fatigue Zoom ».

Trois principes peuvent faciliter la tenue des réunions et y apporter davantage de fluidité : 

  1. une intention commune;
  2. des responsabilités partagées;
  3. une conscience du temps comme ressource commune.

L’intention commune

Prendre un moment pour clarifier l’intention commune permet à tous les membres du groupe de travailler en harmonie. Lorsque les personnes partagent une intention claire, celle-ci agit comme un leader invisible au cours de la réunion. L’intention peut être d’ordre général (gouvernance, opérations, évaluation, planification) ou spécifique, si elle porte sur une question ou un enjeu particulier (sur comment améliorer le recrutement, par exemple). 

Habituellement, nous présentons des sujets à l’ordre du jour de nos réunions sans clarifier au préalable ce que nous attendons de nos collègues. En catégorisant chacun de ces sujets en fonction de nos besoins de collaboration, nous assumons une intention. Ce que nous souhaitons avec nos collègues, c’est informer, consulter, cocréer ou décider. Cette intentionnalité préalable est une pratique qui catalyse l’intelligence collective. En répartissant les sujets selon ces quatre intentions, nos collègues savent quel type de participation est attendu d’eux : 

  • informer ou annoncer : vous souhaitez seulement que les personnes vous écoutent, qu’elles prennent connaissance de l’information; 
  • consulter ou recevoir de la rétroaction : vous désirez écouter les autres, recevoir leur avis;
  • cocréer ou discuter : vous aimeriez approfondir un sujet avec vos collègues;
  • décider ou proposer : vous jugez important d’en arriver à une décision collective sur un sujet.

Les responsabilités partagées

Une réunion est mise en place pour profiter de la contribution de l’ensemble des personnes présentes. Le leadership de la réunion provient ainsi de tous les participants. Chaque groupe peut se mettre d’accord sur les rôles qui paraissent nécessaires. Les rôles contribuant à faciliter le bon déroulement de la réunion peuvent se répartir ainsi :

  • le facilitateur aide le groupe à garder le cap, à libérer la créativité et favorise le discernement des participants;
  • le gardien du temps soutient la responsabilité collective de la gestion du temps;
  • le responsable de l’information maintient un système cohérent et accessible qui conserve toutes les informations nécessaires pour collaborer. Il collige les extrants de la rencontre et rend visible le travail accompli par le groupe; 
  • le responsable technique (pour les réunions virtuelles) s’assure que les outils virtuels sont au service de la collaboration;
  • l’hôte de la réunion assume la responsabilité de l’organisation des réunions, des ateliers, etc.

 Ces rôles sont assumés de façon rotative, ce qui permet d'apprécier les différents styles de leadership. En comprenant mieux la difficulté et le doigté nécessaire pour réaliser chacun des rôles avec brio, les membres de l'équipe deviennent plus bienveillants lorsqu'ils se présentent comme participants. La confiance augmente d'autant.

La conscience du temps comme ressource commune

Le temps est un bien commun et les personnes sont responsables d’en prendre soin ensemble. Trop souvent, les réunions s’étirent et notre engagement décroît. 

La capacité moyenne d’attention des gestionnaires en réunion serait de 52 minutes, alors que les rencontres durent en moyenne 80 minutes. Si nous ne maîtrisons pas ce temps ensemble avec conscience et précision, nous nuisons à l’engagement de tout le groupe. À l’inverse, en gérant adéquatement le temps de nos réunions, nous aurons un pouvoir significatif sur l’efficacité de celles-ci. Se poser la question  « Combien de temps ai-je besoin pour tel sujet? » peut sensibiliser chacun à assumer sa responsabilité quant au temps comme ressource commune.

Le canevas de la réunion participative

Les trois principes (intention, responsabilités partagées et temps comme ressource commune) fonctionnent en synergie et se déploient plus concrètement en utilisant un canevas. Ce canevas peut être un tableau dans une salle de réunion ou un document partagé lors d’une réunion virtuelle. Chaque participant indique, au début de celle-ci, le sujet qu’il souhaite aborder et la durée nécessaire. Lorsque son point sera abordé, il peut préciser quel processus il propose.

Exemple de canevas de réunion participative complété

Intention de la réunion : Apprendre de notre travail
Intention des sujets Sujet Porteur (nom) Durée (minutes) Nb participants
Ouverture

Compléter le gabarit de réunion

Distribuer les rôles 

Tour d’accueil

Tous

15

 

5

Tous
Informer/ Annoncer Présentation en Suisse Mira 5 Tous
Consulter/ Rétroaction Stratégie de marque : revue du projet avec Acme Robert 10 2
Cocréer/ Travailler ensemble Publicité sur l’espace de cotravail Dimitri 20 4
Proposer/ Décider Nouveau processus de réunion Liu 15 Tous
Clôture Tour de clôture   10  
  Durée totale   80  

Source : Slade, S., Le Leadership horizontal – Instaurer une organisation non hiérarchique, une pratique à la fois, Éditions de l’Homme, 2020, 256 pages.

 

Après avoir complété ce gabarit et réparti les rôles de la réunion, les participants, avec l’aide du facilitateur, se mettent d’accord quant aux points qu’ils souhaitent prioriser. Il n’est pas nécessaire de suivre l’ordre dans lequel les sujets sont inscrits dans le canevas. Chaque personne qui amène un sujet (la stratégie de marque, par exemple) doit en même temps proposer un processus pour échanger (réflexion deux par deux, suivie d’un échange de groupe, remue-méninges, jeu). Le travail en sous-groupe peut permettre d’aller plus loin et plus vite en matière d’intelligence collective.


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Le travail en sous-groupe est d’ailleurs l’une des caractéristiques spécifiques de la réunion participative, qui se distingue ainsi d’une réunion de type plus hiérarchique. Le tableau qui suit résume les différences entre ces deux pratiques.

 

Pratique de réunion hiérarchique Pratique de réunion participative 
L’ordre du jour est défini auparavant par une personne, souvent le gestionnaire, qui sollicite parfois les contributions de ses collègues pour le compléter. L’ordre du jour est complété par tous les membres de la réunion quelques minutes avant celle-ci. Il peut aussi être préparé au préalable.
Il n’y a pas de catégorie dans l’ordre du jour. Les informations sont surtout partagées de manière descendante : le gestionnaire vers les employés.

L’ordre du jour est décliné en quatre catégories (informer, consulter, cocréer ou décider) qui indiquent quelle est l’intention au sujet des pratiques collaboratives.

L’information et les échanges sont circulaires.
Une personne anime le déroulement. Une personne facilite le déroulement.
La parole est prise majoritairement par quelques personnes.  Les processus collaboratifs proposés permettent à chacun de s’exprimer. On partage ainsi équitablement les prises de parole au sein du groupe. 
Les responsabilités sont peu partagées : un animateur, un secrétaire, le plus souvent.  Les responsabilités sont clairement partagées : un facilitateur, un gardien du temps, un responsable de l’information et, lorsqu’il s’agit de réunion virtuelle, un responsable technique.
Chacun des points présentés à l’ordre du jour est discuté. Il y a rarement une durée précise pour chacun de ces points. La réunion consiste en une série de processus collaboratifs qui permettent d’aborder les points à l’ordre du jour de manière spontanée. Il y a toujours une durée précise pour chacun.
Il y a peu ou pas de place formelle pour l’expression des émotions. Le tour d’accueil et de clôture sont des invitations à nommer ses émotions et ses préoccupations. Une question posée au groupe, au début et à la fin de la rencontre, permet de créer un moment d’écoute, d’expression et de bienveillance. 
Il n’y a pas de travail en sous-groupe.

Le travail en sous-groupe est souvent utilisé.

 

Observer ce qui est généré par chacune de ces pratiques permet de choisir ce que nous souhaitons vivre dans notre milieu de travail. Au cours de la réunion participative, le groupe assume une responsabilité partagée sur ce qui est abordé, comment on l’aborde et pendant combien de temps. Les réunions deviennent des espaces vivifiants, démocratiques et propices à la cocréation. Il n’y est pas question de hiérarchie, d’ordre du jour statique et linéaire appartenant seulement à une ou deux personnes, mais plutôt de pratiques, de rituels qui sont proposés pour permettre aux personnes de construire des projets collectifs.

Et vous, de quelle façon souhaitez-vous vivre vos réunions?


Notes

1 Rogelberg, S. G., Scott, C., et Kello J., « The science and fiction of meetings », MIT Sloan Management Review, vol. 48, no 2, Hiver 2007, p. 18-21.

2 Lire à ce sujet : Slade, S., Le Leadership horizontal – Instaurer une organisation non hiérarchique, une pratique à la fois, Éditions de l’Homme, 2020, 256 pages.