Besoin de repères pour mieux affronter le monde du travail actuel et anticiper le futur? La revue Gestion décrypte les nouvelles idées, les grandes études, les faits saillants et les tendances du management.

L’expérientiel au service des détaillants et des marques

Associée au Web3 qui se profile à l’horizon, l’économie de l’expérientiel transforme la manière dont les entreprises connectent avec leurs clients et les fidélisent. Des expériences bien conçues donnent accès à des données précieuses. En voici deux exemples éclairants :

  1. La chaîne de magasins de matériel d’art et d’artisanat Michaels a décidé de miser sur une plateforme qui propose des cours d’art offerts par des professeurs indépendants. Le détaillant a ainsi réussi à bâtir une communauté d’un million d’élèves et de 20 000 enseignants. Au détour, elle a eu accès à une foule de données rattachées aux interactions sur la plateforme.
  2. Purina, la marque de nourriture pour animaux appartenant à Nestlé, voulait entrer en contact avec les nouveaux propriétaires de chiots pendant la pandémie. L’entreprise a créé une plateforme permettant aux Américains de trouver des dresseurs et de suivre des cours via Zoom. L’argent récolté était entièrement versé aux dresseurs, mais la multinationale a obtenu des données sur des millions de nouveaux propriétaires de chiots!

Source: MIT Sloan

 

Des données en échange d’une expérience personnalisée? 

L’utilisation des données est de plus en plus acceptée, comme en témoigne le plus récent sondage de Salesforce effectué auprès de 17 000 personnes dans 29 pays. Un nombre croissant de clients s’attend en effet à ce que les marques personnalisent leur relation en utilisant les technologies numériques.

88% estiment que l’expérience offerte par une entreprise est aussi importante que ses produits ou ses services.

73% s’attendent des entreprises qu’elles anticipent et comprennent leurs attentes et leurs besoins personnels.

69% sont ouverts à l’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) pour améliorer leur expérience client.

60% feraient davantage confiance à l’IA s’ils avaient plus de contrôle sur la façon dont elle est utilisée.

79% feraient plus confiance à une entreprise si l’utilisation de leurs données personnelles était clairement expliquée.

Source: Salesforce

 

L’avenir est-il aux robots dans les centres de service à la clientèle?

Depuis dix ans, les robots conversationnels et les assistants virtuels ont pris davantage de place au sein des entreprises de services. Dans une enquête de Gartner réalisée auprès de 50 leaders dans le domaine du service à la clientèle, plus de la moitié des répondants ont indiqué que leur organisation utilisait déjà des technologies fondées sur l’IA.

Le quart des entreprises sondées estimaient d’ailleurs que d’ici 2027 les robots conversationnels seraient le principal canal de communication de leur centre de service à la clientèle. «Lorsqu’ils sont conçus correctement, les robots peuvent changer l’expérience client de manière positive, à un coût inférieur aux relations interpersonnelles. Mais il est toujours difficile de comparer la performance des robots, puisque la conception et la complexité de ces technologies varient considérablement d’une organisation à une autre», mentionnait Uma Challa, directeur principal, groupe de recherche, chez Gartner.

Une étude de Customer Contact Week a mené à des conclusions similaires. La majorité des organisations qui utilisent des robots ou des assistants basés sur l’intelligence artificielle n’ont pas encore remarqué de retour notable sur leur investissement.

Ces organisations prévoient tout de même une hausse de l’adoption des technologies fondées sur l’IA d’ici 2025.

26% pensent que l’IA sera utilisée pour toutes les activités de soutien. Dans les organisations, les vraies personnes occuperont donc d’autres rôles que ceux tenus par le soutien à la clientèle.

26% croient que l’IA sera mise de l’avant pour les problèmes simples et modérément complexes. Les problèmes plus difficiles à résoudre nécessiteront généralement l’intervention d’une personne.

19% sont d’avis que l’IA restera une option secondaire. La plupart des interactions impliqueront toujours une personne.

Sources: Gartner et Customer Contact Week

 

Transparence, confiance et sécurité

La société Deloitte propose une démarche en quatre étapes pour bien concevoir une expérience basée sur les données.

  1. Construisez d’abord votre relation. Avant de vous lancer dans l’acquisition massive de données personnelles, vos clients doivent vous faire confiance.
  2. Accordez du pouvoir aux utilisateurs. En leur offrant des options, vos clients se sentiront plus en contrôle des données qu’ils partagent avec vous. Ils vous feront aussi plus confiance.
  3. Ne négligez jamais les questions de sécurité. Cela signifie d’inclure les équipes de cybersécurité dès le début de la conception d’un programme.
  4. Évitez les politiques trop longues à lire. Formulez en langage clair et simple pourquoi et comment vous utiliserez les données. Faites preuve de transparence et permettez à vos clients de refuser le partage de leurs renseignements personnels.

Source: Deloitte

 

De plus en plus d’emplois hautement qualifiés

La polarisation de l’emploi qui s’observe depuis trois décennies s’est accélérée depuis quelques années dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Le nombre d’emplois situés au sommet et au bas de l’échelle des compétences requises a augmenté, alors que la part des métiers moyennement qualifiés a diminué.

L’écart se creuse aussi entre les catégories d’emplois disponibles et les groupes susceptibles de les occuper.

Les innovations technologiques combinées à la mondialisation et au passage d’une économie de production de biens à une économie de services contribuent au phénomène.

Au Canada, la tendance semble toutefois moins prononcée, selon un rapport du Forum des politiques publiques. Comme ailleurs dans les pays de l’OCDE, les emplois moyennement qualifiés sont en baisse et ceux hautement qualifiés, en hausse. Cependant, la part des emplois faiblement qualifiés n’a pratiquement pas augmenté au cours des 30 dernières années.

Source : Forum des politiques publique

 

Prêtes pour l’avenir, les entreprises?

 Une recherche sur les pratiques des grandes entreprises suggère que les organisations qui seront en mesure de relever les prochains défis partagent trois caractéristiques :

  1. Elles savent qui elles sont et ce qu’elles représentent.
  2. Elles misent sur la rapidité et la simplicité d’exécution.
  3. Elles se développent grâce à leur capacité d’apprentissage et d’innovation.

Les organisations semblent en général loin de répondre à ce profil. Les auteurs évaluent que seulement 7% des grandes entreprises seraient «prêtes pour l’avenir».

Source : Rotman Management Magazine

 

Compétences du futur 

Si les emplois hautement qualifiés augmentent, quelles compétences est-il nécessaire de détenir à partir d’aujourd’hui pour réussir demain? Selon le Référentiel québécois des compétences du futur, le marché du travail est caractérisé par cinq grands changements : diminution du travail de routine, dégroupement des tâches, besoin d’adaptabilité et de résilience, capacité à travailler avec la technologie, accent sur les compétences difficiles à automatiser.

Pour répondre à ces changements, le référentiel cible les dix compétences du futur :

Source : Commission des partenaires du marché du travail

 

Parcours sinueux recherchés

Les parcours professionnels sont loin d’être tous en ligne droite. De plus en plus d’études montrent que les travailleurs d’aujourd’hui veulent être vus, écoutés et valorisés, et qu’ils cherchent à obtenir mieux (ou tout simplement du nouveau). Comment les entreprises peuvent-elles gagner la «guerre des talents» dans ce contexte? En offrant plus que des plans de carrière unidirectionnels dans lesquels le personnel compétent doit gravir des échelons.

Dans un article publié dans la Harvard Business Review, la conférencière et autrice April Rinne juge qu’il est temps de traiter les parcours professionnels comme des portfolios. «Pensez à un employé exceptionnel qui construit délibérément sa carrière en segments de cinq ans. Son but est de rester ouvert aux options, de maximiser son apprentissage et de contribuer à l’essor de son organisation de multiples façons, toutes significatives. Souvent, cette personne estimera devoir changer d’employeur ou lancer sa propre entreprise afin d’atteindre ses objectifs à long terme.»

Résultat?

Les organisations perdent périodiquement des gens de talent.

Solution?

Comprendre ces employés et faire preuve de créativité afin de promouvoir une mobilité interne non linéaire.

Comment?

  • En favorisant le partage des compétences et des intérêts au-delà des responsabilités professionnelles officielles des employés.
  • En soutenant les employés qui veulent acquérir de nouvelles compétences sans oublier d’adapter les parcours et les objectifs professionnels en conséquence.
  • En cherchant à découvrir les compétences cachées au sein de ses équipes.

Source: Harvard Business Review

 

L’art du changement de voie

La professeure Winnie Jiang de l’école de commerce INSEAD étudie la création de sens au travail, la mobilité et les transitions de carrière. Avec Claire Harbour et Antoine Tirard, des experts en recherche de talents, elle a documenté le parcours de personnes qui ont choisi de faire un pas de côté ou de prendre du recul pour s’orienter vers une carrière plus épanouissante.

Les auteurs ont formulé huit conseils pour effectuer ce changement avec succès.

  1. Vous êtes attiré par une nouvelle avenue? Écoutez-vous et passez à l’action.
  2. Pour voir comment une passion peut s’intégrer à votre carrière, apprenez à évaluer vos options sous plusieurs angles.
  3. Choisissez le moment opportun pour vous lancer dans une telle démarche, en tenant compte de vos finances, de la logistique et du soutien nécessaire pour réussir.
  4. Des études supplémentaires seront incontournables? Gardez la conviction que ce que vous commencez tard dans la vie aura de la valeur.
  5. Ne dites jamais non à une conversation au sujet d’une possible occasion. Vous pourrez refuser ensuite si ce qu’on vous offre ne vous convient pas!
  6. Préparez-vous à faire des compromis et acceptez l’inattendu. Soyez humble et demandez de l’aide.
  7. Pratiquez la pensée latérale dans tous les aspects de votre vie, pas uniquement dans la sphère professionnelle.
  8. Soyez à l’écoute de vos valeurs, de vos priorités, et apprenez à suivre votre cœur aussi bien que votre raison.

Source : INSEAD

Article publié dans l’édition Hiver 2023 de Gestion