On parle beaucoup des humains! Quid du gestionnaire?

La tendance est lourde, très lourde même! Le big data est devenu la condition sine qua non au succès des entreprises et des organisations du XXIe siècle, nous dit-on! Soit! Mais bien au-delà des zettaoctets de données stockées dans les serveurs et des algorithmes qui en tireront la substantifique moelle, quel sera désormais le rôle du gestionnaire, pris au cœoeur de ce dense magma de données?

Voilà la question à laquelle la professeure Monideepa Tarafdar, de la Lancaster University Management School (Royaume-Uni), a tenté de répondre dans son article « The Three New Skills Managers Need », publié dans la dernière édition automnale de la MIT Sloan Management Review. Pour la spécialiste des relations entre les technologies de l'’information et l'’humain, le gestionnaire du troisième millénaire devra impérativement développer trois habiletés s'’il entend tirer son épingle du jeu à l'’égard de l'’omniprésence et de l'’omnipotence des mégadonnées dans les processus et les procédés des entreprises et des organisations. Quelles sont ces habiletés?

Dans un premier temps, le gestionnaire du futur devra être en mesure d’'établir des liens riches et significatifs avec ce que Monideepa Tarafdar appelle les « collègues numériques » (digital coworkers), à savoir les algorithmes. Et, surtout, faire preuve d’'une bonne dose d'’humilité dans la relation établie avec ces collègues! Car, on doit le reconnaître d'’emblée, la puissance de calcul de la machine surpasse de loin celle de notre cervelle! Mais, rassurons-nous, l'’humain possède encore un avantage sur l'artificiel : l’'instinct! Certes, les algorithmes fourniront une pléthore d’'analyses et de recommandations au gestionnaire. Mais c'’est à ce dernier que reviendra la lourde tâche d’'en vérifier la plausibilité et, in fine, de trancher quant au chemin à emprunter. On le voit bien ici : le processus de prise de décision, véritable cœoeur de métier du gestionnaire, deviendra encore plus important dans les années et les décennies à venir.

N’'en déplaise aux apologistes de la stricte séparation entre la sphère privée et la sphère professionnelle, la machine est progressivement en voie d'’abolir les minces frontières entre ces deux univers. « [...…] Technologies will only increase in flexibility, richness, and seamlessness, and that will lead to their greater use at home for work and vice versa », prédit la professeure Tarafdar. C’est un fait pratiquement irréversible. Le gestionnaire de demain sera celui qui aura développé cette « pleine conscience numérique » (digital mindfulness), cette flexibilité qui lui permettra de concilier à la fois le processus ininterrompu de récolte des données et d'’analyse de ces dernières à son emploi général du temps. Bonne ou mauvaise nouvelle?...

En dernier lieu, le gestionnaire des temps nouveaux sera celui qui saura également faire preuve de compromis et d’'ouverture à l'’égard des choix et des préférences technologiques de ses collègues de travail. Parce que la concurrence est féroce, parce que le temps est compté, parce que l’'univers des mégadonnées, dont on saisit encore à peine l'’étendue et les ramifications, instille un certain degré d’'incertitude, la fluidité dans les processus et les procédés des entreprises et des organisations est désormais de mise! Une bonne compréhension de la part du gestionnaire quant au choix des outils technologiques employés par ses collègues et ses subordonnés, que ce soit en termes de logiciels de communication ou d’analyse des données par exemple, ne pourra que contribuer à l’'établissement de cette fluidité tant souhaitée.

Il y a urgence d’agir! Le gestionnaire de demain (et demain, c’est pratiquement aujourd’hui!) doit revoir son rôle et les compétences qu’il possède déjà, tout comme celles qu’il doit développer, s'’il entend ne pas devenir ce naufragé qui, sur son frêle esquif, navigue péniblement au milieu de ce vaste océan numérique!