Un nouveau contexte d'entrepreneuriat peut s'appréhender à distance! 

Les immigrants sont naturellement entrepreneurs. D’ailleurs, l’acte de migration constitue un des principaux indicateurs de la propension des personnes à entreprendre. Un des défis majeurs rencontrés par les immigrants est la méconnaissance ou le manque de compréhension du nouvel environnement d’accueil et là, nous faisons allusion aux pratiques en vigueur, aux valeurs, aux réseaux, au fonctionnement des institutions, etc., des éléments qui s’apprivoisent par le vécu et qui sont difficiles à saisir par les médias traditionnels.


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Les formations en ligne ouvertes à tous (ou MOOC pour « Massive Open Online Courses ») constituent une solution de rechange intéressante pour soutenir les entrepreneurs immigrants en les aidant à se bâtir, bien entendu, une solide base de connaissances, mais surtout à avoir un aperçu des enjeux culturels et d’affaires auxquels ils pourraient faire face s’ils veulent se lancer en affaires (par exemple au Québec). Dans ce sens, HEC Montréal a relevé ce défi grâce à sa plateforme de formation en ligne Edulib et notamment avec le cours Esprit entrepreneurial qui a été suivi par près de 15 000 candidats lors des deux dernières diffusions (voir la vidéo en tête d'article).

« Des participants installés au Québec et au Canada l’ont suivi, mais également plusieurs candidats étrangers », explique Luis Felipe Cisneros, directeur du pôle entrepreneuriat, repreneuriat et familles en affaires à HEC Montréal, qui a contribué au développement de ce cours. Ce dernier a été suivi par des candidats de plus de 180 pays, dont une majorité francophone.

Le cours a bénéficié de la reconnaissance des médias internationaux, ce qui a probablement incité plusieurs candidats étrangers à le suivre. « Une autre raison, rapporte Luis Felipe Cisneros, est que certains participants-étudiants ont l’intention de venir habiter au Québec. » Cette formation prépare principalement l’étudiant à se connaître et à évaluer son profil entrepreneurial, des facteurs qui constituent la pierre angulaire d’un bon projet d’entreprise. Le cours prépare aussi l’étudiant ou l’entrepreneur en devenir au monde des affaires québécois. Pour y arriver, des capsules vidéo présentent des entrepreneurs locaux issus de différentes communautés – francophone, anglophone, haïtienne, maghrébine.

Une chose est sûre, les immigrants ont dès le départ certaines caractéristiques qui font d’eux de bons entrepreneurs : ils ont une forte tolérance au risque, mais surtout, ils ne voient pas la vente de façon péjorative.

« Ici, on peut insulter quelqu’un en le traitant de vendeur de voitures, dit Luis Felipe Cisneros. Mais au Mexique, si on me dit que je suis un vendeur de tapis, ce n’est pas une insulte. Être vendeur est aussi noble qu’être professeur. »

Pour familiariser l’étudiant ou le futur entrepreneur immigrant au contexte d’affaires québécois, la formation présente aussi les différents éléments et caractéristiques de l’écosystème entrepreneurial local, comme les sources de financement gouvernemental et leur légitimité.

« C’est important parce que les gens des pays émergents se méfient parfois des gouvernements. Ils ne veulent pas aller chercher d’aide. Les entrepreneurs craignent qu’il s’agisse d’un masque pour leur soutirer des informations et aller les chercher sur le plan fiscal », dit Luis Felipe Cisneros.

L’esprit entrepreneurial présente d’autres éléments de base de la culture québécoise, du réseautage aux meilleures pratiques locales en affaires. Par exemple, HEC prépare actuellement une capsule sur la ponctualité. De tels éléments peuvent paraître anodins, mais ils ont pourtant une grande importance.

Le cours aborde par ailleurs une variété de thèmes qui vont de la curiosité à la créativité, en passant par la vision, le travail d’équipe et la compréhension de ses ressources. On s’y penche également sur l’importance du réseau local dans le développement et la pérennisation d’un projet entrepreneurial. « C’est un petit monde, dit Luis Felipe Cisneros. En une semaine, je peux voir Serge Beauchemin deux fois et LP Maurice trois fois. Si tu te grilles avec quelqu’un, tu te grilles avec tout le monde. »

Pour assurer la crédibilité de la formation, les responsables du cours ont recruté des experts de renom pour certaines de leurs capsules vidéo.

La formation semble avoir gagné son pari de soutenir l’entrepreneuriat immigrant. Le 4 avril dernier, Khadija El Bouhali a participé à l’émission Dans l’oeil du dragon après avoir suivi le cours L'esprit entrepreneurial, en 2014. Fondatrice de Cousmos, une entreprise spécialisée dans la production de couscous prêt à manger pour le secteur du détail, elle a réussi à obtenir le soutien de quatre des cinq dragons (lire le récit de son passage à cette émission, dans notre article « Femmes entrepreneures, réussite et accompagnement »).

« Ça fonctionne, dit Luis Felipe Cisneros. C’est pour des cas inspirants comme celui de Khadija El Bouhali qu’on fait ce que l’on fait. »