Toutes les personnes sur le marché du travail vivront un jour ou l’autre un échec professionnel, à divers degrés. Bien qu’on entende souvent dire que celui-ci ne doit pas nous définir, comment arriver à le voir positivement et à en tirer profit?

Pouvant aller d’une faillite à une promotion refusée, en passant par une présentation insatisfaisante ou des résultats non atteints, l’échec reste subjectif pour chaque individu en fonction de ce qu’il représente pour elle ou lui. Pour rebondir de celui-ci, nous devons en premier lieu l’accepter avec indulgence.

«Il faut d’abord regarder son échec avec un certain recul et une bienveillance envers soi-même, souligne Julie Carignan, CRHA, psychologue organisationnelle et associée, Développement des leaders et des équipes, chez Humance. On peut avoir tendance à se culpabiliser ou à rejeter la faute sur notre environnement. C’est important – et normal – de laisser place à ces émotions, mais ni l’une ni l’autre ne nous amènent dans une zone optimale. Un échec est bien géré quand il devient une façon d’apprendre sur soi et sur son environnement.»

Grandir par l’échec

Andreea Gavrila et Florence Jauvin, doctorantes en psychologie à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), abondent dans le même sens : «La clé est de ne pas voir l’échec comme un événement qui nous définit en tant qu’individu, mais comme une source d’apprentissage pour pouvoir grandir à partir de cet enjeu.»

Pour ce faire, il est pertinent de procéder à une introspection, de cerner les causes que l’on contrôle, de nous interroger sur nos limites et sur des pistes d’amélioration, pour être alors dans une mentalité de croissance*. «Et de faire preuve d’autocompassion dans ce processus en n’oubliant pas que nous ne sommes pas responsables de tout ce qui a conduit à notre échec», ajoute Julie Cloutier, professeure au Département d’organisation et ressources humaines de l’UQAM. 

On peut ainsi apprendre grandement de nos erreurs, souvent même davantage que de nos succès. Plus on en tire des leçons, plus on s’entraîne à échouer et à rebondir, et ainsi à la résilience. Il ne faut donc pas craindre cette épreuve : «Se laisser trop envahir par la peur de l’échec brime tout l’espace qu’on pourrait donner à notre motivation, affirme Julie Carignan. Or, pour réaliser tout son potentiel, on doit prendre des risques et accepter que, dans le chemin hors de notre zone de confort, il y ait possibilité d’échec. Mais ressentir une fierté d’avoir au moins essayé et d’évoluer grâce à cela.»

En parler ou pas?

En considérant l’échec comme un pas vers l’avant, il peut être des plus bénéfiques d’en discuter avec ses collègues, son ou sa gestionnaire, voire une recruteuse ou un recruteur. «Lors d’une entrevue, si une personne mentionne n’avoir jamais eu d’échec, soit elle dit vrai, ce qui signifie qu’elle n’est jamais sortie de sa zone de confort, soit elle en a eu un, mais ne l’assume pas ou n’a rien retiré de celui-ci, exprime Julie Carignan. Dans les deux cas, c’est perdant.»

Les deux doctorantes de l’UQAM mettent aussi l’accent sur cette pertinence de ne pas enfouir cela sous le tapis : «Dans un monde idéal, l’échec ne serait pas un tabou ou quelque chose de négatif en soi. D’en parler avec sa ou son gestionnaire peut amener à trouver des outils ou formations, même à fixer de nouveaux objectifs pour ne pas le reproduire. Cela peut seulement être bénéfique à partir du moment où on mise sur le développement des forces.»

Mais cette vision doit également être embrassée par la culture organisationnelle, comme le précise Julie Carignan : «Les organisations se doivent d’instaurer des cultures où on a le droit d’expérimenter. En témoignant de mon échec, celui-ci n’aura pas juste servi à me renforcer, mais il permettra à plusieurs gens d’en tirer une leçon, ce qui multiplie la portée positive.»

Et si ça ne fonctionne pas?

Il arrive aussi que, malgré tout cela, l’échec nous atteigne plus profondément. «On veut pouvoir en rebondir, mais parfois, ça nous semble impossible, conclut Julie Carignan. Il peut s’agir d’un ancrage dans notre façon de l’aborder, dans notre passé. N’hésitez pas à consulter une ou un spécialiste pour ainsi avoir le recul nécessaire; cela peut vous offrir la possibilité de faire la paix avec cette épreuve pour évoluer comme individu personnellement et professionnellement.» Car consulter est loin d’être synonyme d’échouer.           


* Concept développé en 1988 par la professeure Carol S. Dweck de l’Université Stanford, la mentalité de croissance est l’opinion selon laquelle vos capacités sont malléables ou modifiables, contrairement à la mentalité fixe qui est l’idée que vos capacités sont élevées ou faibles, et qu’il n’y a pas grand-chose que vous puissiez faire pour les changer.