Le célèbre test est loin d'être garant de succès dans une école de commerce!

Son nom seul prononcé suffit à déclencher de violentes poussées d'urticaire chez certains aspirants à un programme universitaire d'études supérieures de gestion... De qui parle-t-on? Il faudrait davantage reformuler en « De quoi parle-t-on? », puisqu'il est ici question du célèbre Graduate Management Admission Test (abrégé en GMAT) et de son équivalent francophone, le TAGE MAGE (Test d'aptitude aux études de gestion). Depuis plusieurs années, l'un de ces deux tests constitue la condition sine qua non à l'admission tant souhaitée aux programmes supérieurs des écoles de gestion. À tort ou à raison? Peu importe la réponse que l'on apporte à cette interrogation, il n'en demeure pas moins que l'investissement, en argent¹ et en temps, est significatif pour ceux qui décident de passer l'épreuve.

Un outil bien imparfait

Comme bien des tests, le GMAT n'est certes pas exempt de controverses. De fait, si cet outil mesure relativement bien les habiletés de raisonnement ou les capacités d'analyse quantitative d'un postulant, le test peut-il prédisposer à une meilleure réussite in fine? Dans la mesure où certains éléments plus intangibles (notamment les habiletés interpersonnelles, la motivation, la créativité, pour n'en nommer que certains) sont sciemment évacués du test, le GMAT représente-t-il tout ce qu'il faut être et avoir pour bien performer dans un programme de gestion et, par la suite, dans la jungle du monde des affaires?

Avec toute la prudence que requiert une telle analyse, la tendance lourde montre, probablement sans grande surprise, que le GMAT ou le TAGE MAGE ne peuvent expliquer ni prédire en entier la performance future des candidats à un programme d'études supérieures en gestion. Voilà la conclusion à laquelle en sont arrivés les professeurs Greet Fastre, Wim H. Gijselaers et Mien Segers dans leur étude² portant sur un échantillonnage d'étudiants européens admis à un programme de maîtrise en gestion (M.Sc.). Ces derniers ont constaté que la combinaison de la moyenne cumulative d'un étudiant au baccalauréat et certaines parties du GMAT, notamment celles évaluant les capacités d'analyse quantitative et les habiletés de rédaction, ne prédisaient que modérément le succès futur d'un étudiant aux études supérieures. Les professeures Ainin Sulaiman et Suhana Mohezar en arrivent elles aussi, dans leur étude³ portant sur des étudiants malais au programme de maîtrise en administration des affaires (MBA), à la même conclusion. De fait, et selon les universitaires, des critères tels que l'expérience professionnelle, l'âge, le genre et l'origine ethnique ne peuvent prédire le succès futur d'une étudiante ou d'un étudiant. Voilà qui nous rassure! Toutefois, des variables telles que la bonne performance aux études de premier cycle et un diplôme obtenu en gestion ou dans un domaine connexe semblent davantage contribuer à la réussite des études de second cycle.

Le GMAT, toujours pertinent?

Pourquoi, dès lors, les institutions d'enseignement s'appuient-elles à ce point sur le résultat du GMAT dans son processus d'admission aux études supérieures? Sans doute faut-il y voir là la volonté de ces dernières à se rabattre sur un outil universel et objectif, question d'éviter toute controverse possible. Mais, on l'a bien vu, l'outil en question possède ses limites, que n'ont d'ailleurs pas manqué de soulever les deux études consultées à ce sujet. Au demeurant, les auteurs de ces études invitent, en guise de suggestion, les universités à se doter de méthodologies qui permettraient d'évaluer des habiletés et des compétences plus difficilement mesurables, comme les habiletés sociales, par exemple. C'est une chose à laquelle bon nombre d'universités se sont ouvertes en incluant, par exemple, des entrevues d'admission.

Mais d'ici à ce que le GMAT et le TAGE MAGE reprennent leur juste place, entendre ici une place plus mesurée, dans les critères d'admission aux programmes d'études supérieures, il faudra continuer à plancher! Bon courage à ceux et celles qui tentent l'aventure en vue des admissions de septembre prochain!


¹ Ces deux tests ont donné naissance à une véritable industrie, plusieurs dizaines de livres, de cahiers préparatoires et de sites Internet leur étant consacrés.

² Fastre, G., Gijselaers, W. H., & Segers, M. (2008). Selection to ensure study success: Looking for multiple criteria in the case of a European master of science program in business. Journal of education for business, 84(1), 47-54.
³ Sulaiman, A., & Mohezar, S. (2006). Student success factors: Identifying key predictors. Journal of Education for Business, 81(6), 328-333.