Dans les organisations, on s’intéresse de plus en plus à la culture et à l’évolution culturelle. On s’y demande comment accroître la responsabilisation et la collaboration des équipes, comment décentraliser la prise de décision et comment faire évoluer son entreprise dans un monde virtuel. Si les modèles de référence sont nombreux, il existe peu de modes d’emploi. Alors, par où commencer?

L’évolution des leaders semble constituer le critère fondamental pour mieux concevoir la transformation culturelle qui s’opère dans les organisations. C’est en s’appropriant, et surtout, en incarnant le changement convoité que ces leaders sauront inspirer les autres à suivre la même direction.

Quand on parle de culture, de quoi parle-t-on exactement?

La culture d’une entreprise représente l’ensemble des croyances, valeurs et symboles qui relient les employés et influencent les comportements. On peut la comparer à un iceberg.

En surface, on retrouve les éléments observables : la structure, les processus, les comportements. Sous l’eau, on retrouve ce qui est invisible ou inconscient : les valeurs, les croyances et les perceptions. 

Ces éléments forment la matière brute d’une culture organisationnelle et son socle dur. Ils témoignent de ce qui est accepté et valorisé au sein de l’organisation. Ils se manifestent dans les comportements des individus et dans leur prise de décisions.

On ne sait pas toujours ce qui nous motive à agir. C’est pour cela que la culture doit souvent être «re-connue» et rendue explicite par les intéressés pour ensuite amorcer la réflexion vers la direction souhaitée. Une évolution culturelle ne peut être imposée, elle se doit d’être reconnue et comprise par le collectif et avoir du sens pour ceux qui auront à la vivre. Elle doit s’inscrire dans une évolution de l’organisation et répondre à des impératifs clairement exprimés.

Parce qu’elle demande de travailler en grande partie sur de l’intangible, une transformation culturelle demande du temps, donc de la patience, dans un monde où tout est attendu pour hier. Adopter de nouveaux comportements dans l’ensemble d’une organisation peut en effet prendre de trois à cinq ans.

Faire preuve d’exemplarité

 Qui dit comportements, dit exemplarité. Le vrai changement de comportement prend ses racines dans une véritable remise en question de ce qui est intangible, tel que décrit plus haut.

Les organisations qui réussissent à se transformer en profondeur sont constituées de leaders qui sont en apprentissage permanent, ouverts à partager les succès et les échecs et vivant avec sincérité les valeurs qu’ils préconisent. À commencer par le PDG et son comité de direction. Ils se questionnent individuellement et collectivement à savoir ce qui les motive à vouloir insuffler une telle évolution culturelle. Que voient-ils d’eux-mêmes qui mérite d’être remis en question? De quoi l’organisation a-t-elle besoin pour réussir, pour incarner sa raison d’être? La qualité de ce questionnement, des choix et des actions qui seront faits en conséquence constituera l’ingrédient numéro 1 dont disposeront les dirigeants pour montrer la voie à suivre. Cela requiert une bonne dose d’humilité.

Cependant, les leaders ne peuvent marcher seuls ni à la place des autres. Le moteur de l’intelligence collective se trouve aussi sous l’eau, dans l’invisible. Faire de beaux discours ne suffira pas. La réflexion, les remises en question et les expérimentations du collectif devront aussi être mises en mouvement.

Pour ce faire, diverses avenues sont possibles, notamment se servir des réunions d’équipe pour approfondir les échanges reliés aux valeurs et aux comportements, se donner de nouveaux indicateurs de succès pour se parler concrètement de l’évolution de la culture, utiliser le coaching individuel et d’équipe pour accélérer les changements souhaités, accompagner les gestionnaires dans un programme sur mesure qui permettra d’avancer concrètement des projets tout en explorant sa posture et son leadership.

Bref, il s’agit de proposer des moyens concrets pour sortir de son propre cadre, de sa zone de confort afin de se «voir aller», individuellement et collectivement. Ce cheminement permet ainsi de remettre en question certains paradigmes et de redéfinir des comportements dans une perspective d’exemplarité.

Deux exemples de leaders modèles inspirés par des expériences terrain

 Voici comment Maude Cloutier et Alain Hade, deux leaders reconnus, ont su implanter avec succès dans leur organisation cette stratégie originale, chacun à leur façon.

Maude Cloutier : l’avantage de jumeler les responsabilités RH et opérationnelles

Avant l’arrivée de la pandémie de coronavirus, Biron Groupe Santé avait entrepris un ambitieux passage au numérique.

Les responsabilités de Maude Cloutier, vice-présidente des ressources humaines et de l’expérience client, forment une combinaison atypique. En plus de ses responsabilités ressources humaines, elle s’est vu proposer la gestion des opérations de première ligne et l’expérience client. Cet alliage en a fait une leader modèle dans la transformation entreprise par Biron Groupe Santé.

«Mon parcours pluridisciplinaire et transversal fait en sorte que je comprends les impératifs des différents secteurs. Ce bagage m’a aussi aidée à concilier les objectifs de la direction avec la réalité du terrain.»

L’alliage de ses responsabilités lui a permis une compréhension plus large et une capacité de gestion transversale, qui ont contribué de manière significative à la transformation culturelle de l’organisation en faisant évoluer les pratiques, au profit de performances accrues.

Alain Hade : les bénéfices d’un nouveau point de vue

Après plus de vingt années consacrées au secteur de la distribution de produits d’assurance de dommages de Desjardins, Alain Hade est devenu vice-président, Marketing et Expérience membres-clients au sein de ce même secteur d’affaires, lequel, à l’image d’autres grandes organisations, est parfois perçu comme un vase clos.

À la suite d’un regroupement des fonctions marketing, Alain s’est retrouvé à occuper, du jour au lendemain, une fonction marketing transversale. Il ne desservait plus seulement l’assurance de dommages, mais bien l’ensemble des services du groupe. Bien qu’exigeante, cette expérience a transformé sa façon d’envisager la collaboration. Après quelques années, il est retourné travailler au secteur d’affaires Desjardins Assurances générales afin d’assurer la croissance du secteur.

Le fait qu’Alain ait assumé des responsabilités différentes dans un poste transversal l’a ouvert à une perspective plus large et a changé sa posture : «Cette expérience m’a permis de mieux comprendre la réalité des autres secteurs de l’organisation. Elle m’a rendu plus empathique à l’endroit de mes collègues et a fait de moi un meilleur joueur d’équipe.» Aujourd’hui, il amène cette perspective aux équipes du secteur Assurances, devenant ainsi un allié de taille pour la transformation culturelle opérée par le Mouvement Desjardins.

Désormais vice-président Croissance et performance chez Desjardins Assurances générales, Alain a mis sur pied des escouades agiles, qui favorisent une plus grande collaboration entre les différentes unités d’affaires. En mettant à contribution des employés de compétences différentes, ces escouades ont généré de meilleures performances, tout en stimulant le sentiment d’appartenance des participants.«La simple volonté de mieux travailler ensemble suffit à améliorer l’atmosphère, le climat de travail et l’état d’esprit du personnel. Cela nous permet aussi de mieux servir nos clients», explique-t-il.

Ces deux cas démontrent que la mobilité s’avère un moyen concret pour remettre en question les paradigmes et faire évoluer les comportements des gestionnaires. Que cette mobilité se concrétise entre secteurs d’affaires différents ou à l’intérieur d’un même secteur, elle permet une plus grande empathie et une meilleure compréhension des problèmes vécus avec un angle différent. 

Investir dans l’intangible pour des résultats tangibles

 Il est important de retenir qu’un changement culturel ne peut être imposé. Un manque de conviction et d’exemplarité sème le doute et empêche l’évolution souhaitée des comportements. À l’inverse, si les gestes des leaders reflètent les valeurs et les comportements souhaités pour la transformation, ils crédibiliseront l’ensemble de la démarche et inciteront les équipes à s’engager dans le virage.

Au-delà des aspects intangibles, il importe que les mécanismes organisationnels soient en harmonie et encouragent les comportements souhaités. Pensons, entre autres, à la façon dont on récompense et qu’on promeut nos talents. Un sujet de blogue en soi…

Les transformations culturelles sont à envisager avec prudence et bienveillance. S’engager à créer plus de sens, plus de liens, plus de cohérence et plus de collaboration est une mission qui doit être partagée par tout un chacun. Il faut savoir créer les environnements favorables et accepter que le chemin soit infini et qu’il exige des efforts permanents.

Osons et soyons créatifs dans nos initiatives afin de faire évoluer nos leaders et polliniser nos équipes!