Article publié dans l'édition Automne 2011 de Gestion

On observe actuellement des phénomènes de pénurie de main-d’œuvre, de pénurie de compétences et de rareté de compétences. Afin de contrer cette situation, de nombreux recruteurs cherchent à soigner le positionnement d’employeur en vue d’attirer les candidats ayant déjà un emploi.

Ainsi, plus l’entreprise est connue et suscite l’intérêt, plus elle reçoit de candidatures spontanées et moins elle a besoin d’investir dans le recrutement. Dans ce contexte, les médias sociaux – les réseaux professionnels comme LinkedIn, les réseaux sociaux comme Facebook et le microblogage comme Twitter – permettent à l’organisation de mettre en œuvre différents plans d’attraction des candidats, selon le niveau de pénurie ou de rareté des profils qu’elle cible.


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Ces stratégies de recrutement doivent être davantage personnalisées afin de convaincre le candidat de postuler. Cet article donne des conseils aux recruteurs pour diffuser efficacement dans les médias sociaux les atouts de l’entreprise et les caractéristiques du poste. Ils pourront alors mieux séduire les candidats en leur proposant l’emploi qui convient à leur profil de carrière et à leurs compétences.

L’évolution des technologies de l’information a permis l’émergence de nouveaux outils plus interactifs, plus personnalisés et plus démocratiques. Nous sommes à l’ère du Web 2.0, celle des réseaux sociaux, des réseaux professionnels et des sites de partage, pour ne nommer que ceux-là.

L’apparition de ces nouvelles plateformes révolutionne non seulement les communications, mais aussi les pratiques de recrutement, en offrant de nouvelles avenues pour communiquer avec les candidats et les convaincre de venir relever de nouveaux défis professionnels.

Cet article propose un tour d’horizon quant à l’utilisation des médias sociaux à des fins de recrutement. Plus précisément, il y est question, tout d’abord, des grands défis de recrutement sur le marché du travail, soit les défis de la pénurie de main-d’œuvre, de la pénurie de compétences et de la rareté de compétences. Par la suite, nous examinons l’évolution du rôle du recruteur qui a changé au cours des 20 dernières années. Puis, nous voyons comment les médias sociaux permettent d’optimiser le recrutement des candidats passifs. Nous décrivons par la suite les trois grands réseaux utilisés dans le contexte du recrutement – les plateformes relationnelles, les plateformes de partage de contenu et les plateformes transactionnelles –, en illustrant nos propos par des exemples concrets. Enfin, nous expliquons de quelle manière l’organisation peut mettre à profit les médias sociaux pour trouver les candidats qu’elle recherche.

Les défis de recrutement sur le marché de l’emploi

Les organisations font face à d’importants défis en matière de recrutement, lesquels sont liés à la diversité des profils des candidats qu’elles tentent de séduire. Les défis de disponibilité de main-d’œuvre pour les entreprises se situent à trois niveaux : la pénurie de main-d’œuvre, la pénurie de compétences et la rareté de compétences (voir le schéma 1).

Le défi de la pénurie de main-d’œuvre

À un premier niveau, certaines entreprises sont à la recherche d’employés, en grand nombre, ne présentant pas de spécialisations professionnelles particulières. C’est le cas des entreprises situées dans la région de Québec où, avec un taux de chômage moyen avoisinant les 5 %, même les postes ne requérant aucune connaissance particulière (employé de production, agent du service à la clientèle, serveur dans un restaurant, etc.) sont extrêmement difficiles à pourvoir.

Le défi de la pénurie de compétences

À un deuxième niveau, des organisations cherchent également des employés ayant des compétences et des connaissances spécifiques, comme des ingénieurs, des comptables ou des programmeurs. Elles font alors face à un niveau de difficulté additionnel associé à la pénurie de ces profils sur le marché, que l’on devrait qualifier plus précisément de pénurie de compétences.Savoir utiliser les médias sociaux pour recruter le personnel

Le défi de la rareté de compétences

À un troisième niveau, les entreprises cherchent des candidats ayant des compétences rares, extrêmement spécialisées (chercheurs, médecins spécialistes, ingénieurs informatiques, etc.) et ayant plusieurs années d’expérience dans leur domaine. Elles doivent pour cela entrer en concurrence avec des entreprises situées partout dans le monde et prêtes à s’engager dans la guerre des talents en recourant à la surenchère de rémunération directe ou globale. Il s’agit alors d’un phénomène de rareté de compétences.

L’évolution du rôle et des pratiques du recruteur

Au cours des 20 dernières années, le marché québécois est passé d’une situation de surplus de travailleurs à une situation de pénurie ou de rareté de compétences et même, dans certaines régions, à une situation de plein emploi. En réaction à ces changements, les pratiques de recrutement ont connu une évolution en quatre phases (voir le schéma 2). Savoir utiliser les médias sociaux pour recruter le personnel

Dans une première phase, les recruteurs n’ont pas pris conscience de la pénurie réelle ou imminente de compétences.

Ils ont continué à exercer leur métier de la façon dont ils l’avaient toujours fait. Ils ne s’occupaient pas du positionnement d’employeur de l’entreprise, ni de l’importance d’avoir une solide stratégie d’attraction. Leur travail se résumait à l’affichage de postes et au tri de curriculum vitæ, pour ensuite procéder à la sélection des candidats. Ils faisaient donc très peu de dépistage de candidats, très peu d’attraction de main-d’œuvre et beaucoup de sélection. Le résultat de cette approche est la diminution draconienne du nombre de curriculum vitæ et de la qualité des candidatures ainsi qu’une augmentation des délais pour les postes à pourvoir.

Dans une deuxième phase, devant la faible disponibilité de la main-d’œuvre, les recruteurs ont mis en œuvre toute une série d’activités de recrutement maximisant les plateformes traditionnelles d’affichage de postes, telles que les sections « Carrières » des journaux, les babillards électroniques d’emplois et les événements de recrutement. Le résultat de cette approche de masse est la réception d’un grand nombre de candidatures, mais très peu correspondant vraiment aux profils recherchés.

Nous en sommes actuellement à la troisième phase, où plusieurs recruteurs ont opté pour une approche beaucoup plus efficiente. Cette approche consiste à travailler davantage sur le positionnement d’employeur afin de réduire les activités de recrutement. Plus l’entreprise est connue et devient une cible d’intérêt pour les candidats potentiels, plus elle reçoit de candidatures spontanées et moins elle a besoin d’investir dans le recrutement. D’autre part, les recruteurs consacrent davantage d’efforts au dépistage proactif de candidats et au positionnement auprès de réservoirs plus segmentés, ce qui a pour effet de réduire le nombre de candidatures mais d’augmenter la qualité de ces dernières. Le résultat est concluant : il y a moins d’investissements dispersés, moins de curriculum vitæ et donc moins de temps de sélection, mais, en proportion, plus de candidats de qualité.

Le processus global de recrutement (positionnement d’employeur, dépistage, recrutement, sélection et embauche) s’est donc transformé, mettant davantage l’accent en amont du processus et moins d’efforts dans le tri des candidatures. Or, il appert que les médias sociaux sont des outils tout à fait appropriés pour ce type d’approche. Ils permettent en effet de se concentrer sur la séduction des candidats, le dialogue avec eux dans une approche fortement segmentée.

Les atouts des médias sociaux comme stratégie de recrutement

En plus des phénomènes de pénurie et de rareté actuelle de main-d’œuvre, les organisations doivent composer avec un marché de l’emploi comprenant un grand nombre de candidats passifs aux profils diversifiés. Dans ce contexte, les réseaux sociaux permettront à une organisation de mener de front différents plans d’attraction, combinant diverses stratégies de communication en matière de ressources humaines, selon le niveau de pénurie ou de rareté des profils qu’elle cible.

Rejoindre des candidats passifs

Compte tenu du très faible taux de chômage, surtout pour les personnes proposant des compétences ou des connaissances très recherchées, la plupart des candidats potentiels sont déjà employés par une organisation et ne sont donc pas en recherche active d’un nouvel emploi. De ce fait, la grande majorité d’entre eux ne consulte pas, sur une base régulière, les médias habituellement destinés aux chercheurs d’emploi. Les babillards électroniques d’emplois, les sections « Carrières » de sites d’entreprises ou encore les sections « Carrières » des journaux (papier ou électroniques) n’atteignent pas ces personnes. Les organisations doivent donc repenser leurs stratégies de positionnement d’employeur et de recrutement pour aller rejoindre les candidats passifs là où ils sont, dans les médias qu’ils consomment, les lieux qu’ils fréquentent.

Cette nouvelle réalité, un marché constitué principalement de candidats passifs, oblige les organisations à repenser leurs modèles de recrutement. Alors qu’auparavant on investissait davantage dans la sélection, il faut aujourd’hui accorder la priorité au positionnement et au recrutement.

De nos jours, lorsqu’une organisation propose un poste, elle doit être consciente qu’il lui faudra trouver des façons de démontrer que cet emploi est supérieur à celui actuellement occupé par le candidat qu’elle veut séduire.

Lorsqu’on s’adresse à un candidat passif, on ne vient plus lui « sauver la vie » en lui offrant un emploi qui lui permettra de subvenir à ses besoins. On doit courtiser les candidats, mais également faire ressortir la valeur ajoutée de l’emploi proposé, et ce, sur les divers plans du positionnement de l’organisation, des atouts de celle-ci et des caractéristiques du poste. Étant donné qu’ils s’estiment d’égal à égal avec les organisations, ils ne souhaitent plus être traités comme des candidats parmi tant d’autres. Les stratégies et outils de communication utilisés doivent être davantage personnalisés pour témoigner au candidat l’intérêt particulier qu’on a pour lui, ses compétences et sa contribution potentielle à l’organisation. C’est pourquoi il importe d’adapter le recrutement à différents profils de candidats, ce que permettent les réseaux sociaux.

Adapter le recrutement à des profils de candidats hétérogènes

Le marché de l’emploi est composé de personnes venant de quatre grands groupes générationnels (les babyboomers, les générations X, Y et Z), ayant des profils psychographiques et des habitudes de consommation de médias différents. Penser pouvoir recruter des candidats issus de ces différents groupes en utilisant un seul et unique média est illusoire. Les entreprises doivent donc segmenter les groupes auxquels elles s’adressent et adapter les outils en fonction des profils de ces derniers.

Le schéma 3 montre à titre d’exemple, le nouveau site web de Hydro-Québec qui a été conçu pour permettre aux candidats potentiels – ceux qui cherchent activement un emploi, tout comme les autres candidats, plus passifs – d’en apprendre davantage sur les emplois susceptibles de les intéresser ainsi que sur l’entreprise, ses valeurs, le processus de sélection et les activités promotionnelles de recrutement. Tel qu’exprimé par Madame Lise Marion, Chef-Centre de recrutement à Hydro-Qébec, « Les générations X et Y, ciblées par nos efforts de recrutement, sont friandes des nouveaux outils technologiques, des réseaux sociaux et du Web 2.0. Comme ces technologies sont aujourd’hui au coeur du marché du recrutement, le site Web Emplois de Hydro-Québec en est le reflet. Toutes les pièces de notre matériel promotionnel incitent les candidats à se rendre sur notre site et à utiliser notre outil de recrutement en ligne pour poser sa candidature. Notre stratégie est donc basée sur le drive to the Web. »Savoir utiliser les médias sociaux pour recruter le personnel

Par ailleurs, dans un même secteur d’activité, on trouve aussi des disparités importantes entre les différents corps de métier ou profession composant ce secteur. Par exemple, on constate des écarts importants dans les habitudes de consommation de médias des préposés aux bénéficiaires, des infirmières et des professionnels de la santé. L’entreprise doit donc segmenter également ses stratégies en fonction des profils professionnels des personnes qu’elle souhaite cibler afin de mieux attirer et recruter des candidats. Le code 2D est apposé sur tout le matériel imprimé. Le candidat peut le lire à l’aide de son téléphone intelligent et accéder ainsi directement à notre site Web Emplois.

Par exemple, dans la refonte de son site web, la société Hydro-Québec a identifié neuf familles d’emplois : techniques et métiers spécialisés, technologies de l’information et télécommunications, sciences et recherche et développement, ingénierie, stages et emplois étudiants, santé et ressources humaines, services à la clientèle et soutien administratif, administration et droits, communication et marketing. Sur le site d’Hydro-Québec, chaque famille ou catégorie d’emplois possède son propre QR, sa propre page

WEB, son propre texte de présentation, des représentants-employés qui donnent des témoignages particuliers à chaque catégorie d’emploi.

Finalement, la dimension géographique a aussi de nombreux impacts en ce qui a trait au choix des outils de recrutement. Le recrutement, selon qu’il est local, provincial, national ou international, commande des pratiques tout à fait différentes en ce qui concerne les outils de même que les messages qui seront utilisés pour courtiser les candidats.

Le besoin de personnalisation des outils de recrutement ainsi que la nécessité d’adapter les outils et leur contenu en fonction de groupes restreints de candidats auxquels on s’adresse prêchent en faveur de l’utilisation des médias sociaux et des nouvelles technologies aux dépens des médias de masse traditionnels. Pour un investissement équivalent, les médias sociaux permettent de rejoindre des groupes diversifiés en personnalisant le message qui leur est destiné. La part la plus importante de l’investissement n’est donc plus attribuée au développement du support communicationnel, mais à l’analyse et à la stratégie permettant de communiquer adéquatement avec les candidats.

Quels réseaux ou plateformes utiliser pour recruter ?

L’univers des médias sociaux est vaste puisqu’il existe plusieurs centaines de plateformes pouvant répondre à la définition de médias sociaux. Avant de présenter les réseaux ou plateformes les plus efficaces dans un contexte de recrutement, nous proposerons une classification permettant de comprendre le rôle que joue chacun des outils pour intéresser les candidats potentiels, les séduire, les convaincre et les amener à passer à l’action. On peut découper l’environnement du Web 2.0 en trois catégories d’outils : les plateformes relationnelles, les plateformes de partage de contenu et les plateformes transactionnelles (voir le schéma 4).

Les plateformes relationnelles

Les plateformes relationnelles ont pour principales fonctions de créer un dialogue avec les candidats potentiels et de les séduire. Adoptant une approche axée fortement sur le marketing, elles visent à susciter l’intérêt de la clientèle cible et à amorcer un processus de séduction. Dans cette catégorie, on trouve principalement les réseaux sociaux (Facebook, Bebo, MySpace, etc.), les réseaux professionnels (LinkedIn, Plaxo, Viadeo, etc.) et les sites de blogage et de microblogage (Twitter, Word Press, etc.). De plus en plus, on voit également apparaître des événements de recrutement virtuels comme les salons de l’emploi virtuels (salon virtuel Technofil de Jobboom et Monster eDays, par exemple), qui permettent de dépister des candidats passifs et d’établir un dialogue avec eux.

Les plateformes de partage de contenu

Les plateformes de partage de contenu sont des sites où l’organisation peut déposer et partager des informations dans différents formats, visant à convaincre le candidat des avantages offerts par l’entreprise comme employeur.Savoir utiliser les médias sociaux pour recruter le personnel

Ces plateformes proposent très peu d’interactions avec les candidats. On y trouve des sites de partage de vidéos (YouTube, Dailymotion, Vimeo, etc.), de photos (Flickr, Picasa, et bientôt Twitter, etc.), de documents (Google Docs, Dropbox, etc.), de diaporamas (SlideShare, présentation Google Docs, etc.), d’articles (Digg, Instapaper, Delicious, etc.) et de billets (Technorati, Social Media Today, etc.).

Les plateformes transactionnelles

Les plateformes transactionnelles sont des sites où les candidats peuvent passer à l’action et soumettre leur candidature.

Ces dernières sont susceptibles de répondre aux besoins des candidats actifs si ces derniers souhaitent avoir accès rapidement à un nouvel emploi. Elles ne font pas partie, à proprement parler, des médias sociaux, mais sont directement imbriquées dans ces derniers dans le processus de conversion visant à séduire, à convaincre et à faire passer à l’action les candidats intéressants.

Cette catégorie comprend les sections « Carrières » des sites Web d’entreprises, avec leur système de gestion de candidatures (Taleo, Njoyn, HRsmart, etc.) le cas échéant, mais aussi les babillards d’emplois généralistes comme Monster, Jobboom ou encore Workopolis. Il existe aussi des babillards spécialisés tels que JobWings ou les sections « Emplois » des associations ou des sites d’ordres professionnels.

Les salons virtuels et certaines fonctionnalités de Facebook (comme Work4 labs) permettent également aux candidats de soumettre leur candidature.

Notons qu’une stratégie d’attraction numérique efficace devrait donc pouvoir miser sur une habile combinaison de ces différentes plateformes, étant donné que chacune a son utilité. Plusieurs personnes déplorent le faible taux de rendement des investissements des médias sociaux, sans prendre la peine d’analyser la manière dont les entreprises y ont recours. Trop souvent, les organisations utilisent les réseaux sociaux comme des plateformes transactionnelles, et affichent des postes sur Facebook comme elles le feraient sur un babillard d’emplois. C’est bien mal comprendre le fonctionnement des plateformes du Web 2.0.

Quelles étapes franchir pour susciter des candidatures par les médias sociaux ?

Les médias sociaux sont tout à fait adaptés au contexte actuel de pénurie ou de rareté de compétences parce qu’ils permettent à l’organisation de séduire progressivement des candidats passifs qui sont déjà en emploi et qu’un affichage de postes ne suffit pas à convaincre. Il faut tout d’abord dialoguer avec eux et leur fournir des informations pertinentes pour leur processus de réflexion. En fait, il faut passer de la conversation à la conversion. Pour cela, il y a plusieurs étapes à franchir, sans lesquelles les mesures mises en avant pourraient s’avérer infructueuses (voir le schéma 5).

La première étape repose sur des outils n’appartenant pas à la grande famille des médias sociaux, mais à leur écosystème : les outils de communication traditionnels. En effet, malgré la force et l’ampleur que les médias sociaux ont prises dans les activités de recrutement, ils ne peuvent pas encore s’autosuffire. Pour avoir un volume intéressant de fans sur une page Facebook ou encore un nombre de relations intéressant sur LinkedIn, on peut avoir recours aux médias traditionnels. Si les gens ne sont pas au courant de la présence du candidat dans les médias sociaux, ils ne s’y retrouveront pas par miracle ou accident, il faut les y mener.

La carte professionnelle, la signature de courriel, les affiches dans les salons et même les publicités dans les revues spécialisées sont quelques-uns des outils qui permettent de se faire connaître dans les médias sociaux et d’y attirer des candidats. Il est donc nécessaire que la campagne de communication repose dans un premier temps sur des médias traditionnels, lesquels serviront de guide vers le « Web ».

La deuxième étape se déroule sur les plateformes relationnelles.

Bien qu’ils appartiennent tous à la même famille, les réseaux sociaux, les réseaux professionnels, le blogage et le microblogage commandent des stratégies très différentes.

Quant à la troisième étape, elle consiste à susciter le désir du candidat en lui transmettant des informations stimulantes sur l’organisation. Bien que cela se fasse sur les plateformes relationnelles, l’organisation pourra utiliser les plateformes de partage de contenu pour héberger le contenu pertinent.

Finalement, la conversion doit, par définition, amener le candidat à soumettre sa candidature. Cela pourra se faire sur des plateformes transactionnelles, pourvu que l’organisation se soit assurée d’y mener le candidat.

Comment utiliser les médias sociaux pour recruter le personnel ?

Dans l’univers quasi infini des médias sociaux, trois plateformes se démarquent par leur popularité, mais également par les occasions qu’elles offrent. Nous examinerons donc les réseaux professionnels, les réseaux sociaux et le microblogage, puis donnerons des conseils pour en optimiser les retombées.

Comment utiliser les réseaux professionnels ?

Les réseaux professionnels tels que LinkedIn, Viadeo ou Xing sont probablement les plateformes les plus autonomes. En effet, bien que la plupart des médias sociaux doivent recourir à d’autres médias pour bâtir un auditoire, on pourrait, dans le cas de LinkedIn, passer outre à cette première étape. En effet, LinkedIn est à la fois une plateforme conversationnelle et une plateforme de dépistage.

Plus de 99 % de ses membres (aujourd’hui évalués à plus de 100 millions) ont indiqué qu’ils ne voyaient pas d’inconvénient à recevoir des offres d’emplois. LinkedIn constitue donc la plus grosse base de données de candidats passifs du monde. Contrairement à Facebook où l’on doit stimuler les personnes pour qu’elles viennent d’elles-mêmes se joindre au réseau, sur LinkedIn on peut solliciter directement les personnes.

LinkedIn est aussi une plateforme extrêmement intéressante pour faire connaître l’organisation en tant qu’employeur, pour annoncer des postes et pour constituer des réservoirs de candidats potentiels. De nombreux outils de recrutement payants sont offerts par la plateforme, mais nous verrons que la meilleure stratégie demeure de maximiser ce site Web 2.0 en fonction de ce qu’il est, soit un réseau professionnel. Une stratégie efficace sur une plateforme comme LinkedIn comprend trois composantes : solliciter des candidats, présenter les atouts de l’organisation et diffuser les postes à combler.

Solliciter des candidats de manière directe ou par association. La première composante d’une stratégie est le recours à l’approche directe, c’est-à-dire la sollicitation des candidats un par un. L’entreprise peut tirer profit de cette approche de dépistage des meilleurs candidats en utilisant les fonctions payantes telles que la licence « Recruiter » ou encore les outils de recrutement fournis par la plateforme.

Cette approche consiste à utiliser le moteur de recherche intégré dans LinkedIn ou à maximiser l’exploration des réseaux de relations de l’entreprise. Dans un premier temps, le moteur de recherche permet de repérer les membres ayant un profil intéressant pour l’organisation. Les recherches peuvent être menées au moyen de nombreux critères tels que l’établissement où la personne a obtenu son diplôme, les entreprises pour lesquelles elle a déjà travaillé, l’entreprise pour laquelle elle travaille actuellement, le titre de son emploi, les domaines d’intérêt ou les compétences.

En plus du moteur de recherche, l’organisation peut dépister les candidats à travers l’approche par association en explorant le réseau de personnes avec qui elle est en contact ou qui agissent comme un aimant vis-à-vis du groupe cible. À ce titre, elle peut explorer principalement :

  • Le réseau de ses employés (qui ont un profil analogue à celui qu’elle recherche) ;
  • Le réseau des candidats avec lesquels elle est en contact ;
  • Le réseau des employés de ses concurrents ;
  • Le réseau des experts dans le domaine où l’organisation cherche des employés ;
  • Le réseau des professeurs ;
  • Le réseau des leaders d’associations étudiantes ;
  • Les groupes d’experts sur LinkedIn dans les domaines pertinents.

Une fois que l’organisation a repéré les candidats, elle doit entrer en contact avec eux. Pour ce faire, elle peut leur demander d’adhérer à son réseau ou d’utiliser des « inMails » (courriels internes de LinkedIn payants, mais permettant de rejoindre n’importe lequel des 100 millions de membres). Elle peut aussi être présentée par l’une de ses relations de premier degré qui est en lien direct avec le candidat. Finalement, l’entreprise peut adhérer à un groupe auquel participe le candidat, ce qui lui octroie le privilège de pouvoir communiquer directement avec ce dernier. Une fois qu’elle est en contact avec le candidat, elle peut passer à la phase de séduction, qui est la deuxième composante d’une bonne stratégie sur LinkedIn.

Présenter les atouts de l’organisation. La deuxième composante d’une stratégie de recrutement sur LinkedIn est la mise en valeur de l’organisation à titre d’employeur à travers la promotion des avantages qu’il y a à travailler pour elle. De prime abord, elle peut utiliser des outils payants comme la page « Carrières » ou des encadrés publicitaires.

Cependant, si les candidats ciblés font partie du réseau de l’organisation ou d’un groupe auquel elle participe, il pourra être intéressant d’y diffuser des contenus sous la forme d’articles ou de nouvelles. Ces messages souligneront les qualités de l’organisation telles que sa croissance dans son secteur d’activité, ses caractéristiques organisationnelles (rémunération, possibilités de carrière, formation, etc.), ses succès d’affaires ou son expertise (brevet, innovation, savoir-faire, etc.).

Cela revient donc à courtiser le candidat en s’assurant que l’organisation fera dorénavant partie des entreprises où il pourrait désirer travailler. Notons qu’il est possible de lier le profil des recruteurs à des plateformes de partage de contenu telles que YouTube, Box.net, SlideShare ou Google Docs. Celles-ci permettent de rendre accessible du contenu dans une multitude de formats (vidéo, PDF, présentation PowerPoint, etc.).

Diffuser des postes à pourvoir. La dernière composante d’une stratégie de recrutement sur LinkedIn, qui est malheureusement la plus utilisée, est la diffusion des postes à pourvoir. Il faut certes parler des postes à pourvoir, car il s’agit du but ultime d’une stratégie sur LinkedIn.

Cependant, le faire sans avoir pris la peine de séduire au préalable le candidat présente peu de valeur ajoutée par rapport à l’affichage sur les babillards d’emplois. La seule différence serait que l’on rejoint davantage de candidats passifs sur Linkedin qu’on ne le ferait sur les babillards d’emplois traditionnels. Il existe des outils payants tels que les « Jobs Slots », les campagnes « InMails » ou l’affichage de postes.

Toutefois, il est possible également pour l’entreprise de diffuser l’affichage en maximisant son réseau. Elle peut, par exemple, demander à ses employés de diffuser l’information parmi leur réseau de relations, ou encore utiliser   groupes pour promouvoir les postes à pourvoir.

En résumé, LinkedIn s’impose comme une plateforme très performante pour le recrutement. Cependant, pour maximiser la conversion des candidats, l’organisation ne devrait pas attendre qu’ils aient pris la décision de changer d’emploi. Elle doit être proactive et prendre les devants en les dépistant, en les séduisant et, finalement, en les invitant à passer à l’action.

Comment utiliser les réseaux sociaux ?

Les réseaux sociaux comme Facebook (avec ses 600 millions de membres), MySpace ou encore Bebo sont aussi des plateformes très intéressantes dans un contexte de recrutement. Comme son nom l’indique, la finalité première de ce type de plateforme n’est pas de bâtir des liens professionnels, mais des liens sociaux avec des amis, de la famille ou des connaissances. On comprendra que la stratégie à appliquer est dès lors totalement différente de celle présentée pour LinkedIn.

À la base, Facebook offre aux personnes la possibilité d’avoir un profil, aux entreprises d’avoir une page et aux personnes qui ont des champs d’intérêt communs d’avoir un groupe d’échange. Ces trois environnements (profil, page et groupe) sont presque similaires quant à l’aspect visuel et aux fonctionnalités offertes. On y trouve donc un « mur » permettant le dialogue avec les amis ou les fans, des onglets pour partager des photos, des vidéos ou des articles ainsi qu’une section permettant de présenter l’individu, l’entreprise ou le groupe.

Contrairement à LinkedIn, les gens ne souhaitent pas que les organisations les sollicitent directement sur Facebook.

Cela est perçu comme une intrusion, une sorte de violation de la sphère privée. Par contre, lorsqu’ils décident de consulter une page d’entreprise, ils souhaitent y trouver des informations directes et précises sur les produits, les services ou les emplois qu’elle offre. Pour bâtir la masse critique de personnes qui permet une propagation virale des informations, l’entreprise doit donc compter sur d’autres stratégies.

En fait, autant les membres de Facebook ne souhaitent pas être sollicités par une entreprise, autant ils iront visiter des pages d’entreprises si c’est un ami qui leur recommande de le faire. Pour établir un réseau, l’entreprise doit ainsi pouvoir compter sur des fans qui seront motivés et qui s’occuperont de stimuler leur réseau à venir visiter sa page. Il importe aussi, d’une part, de trouver des façons d’attirer des personnes sur la page pour constituer une solide base de fans et, d’autre part, de proposer un contenu assez intéressant pour que ces derniers aient le goût de le partager avec leur réseau.

Par conséquent, une bonne stratégie sur Facebook devrait reposer sur trois composantes : constituer une base de fans, élaborer un contenu à valeur ajoutée et inciter les personnes à soumettre leur candidature (stratégie de conversion).

Constituer une base de fans. Pour bâtir une base de fans, l’organisation doit faire connaître sa présence sur Facebook. Comme nous l’avons mentionné, celle-ci doit avoir recours à divers médias traditionnels ou à ses différents outils Web. Elle peut, par exemple, insérer sur son site Web des brochures de recrutement ou encore l’affichage de postes, le logo de Facebook avec la mention « Joignez-vous à nous ». Encore une fois, il faut s’assurer que le fait que les candidats adhèrent à la page leur procure un avantage. À court terme, certaines entreprises optent pour l’utilisation de concours permettant d’accroître rapidement le nombre de fans. Par exemple, certaines firmes proposent le tirage d’un iPad parmi les 1 000 premiers fans.

Cependant, les organisations doivent aussi veiller à maintenir l’intérêt des fans à moyen et à long terme. Pour ce faire, elles doivent disposer d’un contenu à valeur ajoutée pour le groupe qu’elles ciblent et le mettre à jour régulièrement.

Offrir un contenu à valeur ajoutée. Pour stimuler l’intérêt des candidats potentiels et les séduire, l’organisation doit offrir un contenu qui les intéressera. Bien entendu, toutes les informations relatives à l’emploi sont pertinentes pour un candidat potentiel. L’organisation devrait donc rendre disponible un contenu relatif aux atouts qu’elle possède et aux caractéristiques du poste.

Pour rejoindre également les candidats passifs, l’organisation proposera un contenu permettant aux personnes de se développer sur le plan personnel ou sur le plan professionnel.

Ainsi, les innovations dans le domaine d’expertise des personnes, les articles d’experts du domaine ou encore des éléments formatifs pourraient représenter un contenu à valeur ajoutée. Certaines organisations optent pour des contenus amusants ou insolites. À court terme, cela peut sûrement générer un certain intérêt pour la page. À moyen terme, il est peu probable que cela servira la cause de l’organisation en matière de recrutement, à moins que cela ne témoigne de la culture organisationnelle ou de la vocation première de l’organisation (par exemple, le Festival Juste pour rire).

On peut aussi compter sur la dimension virale de Facebook pour favoriser la propagation des messages. D’une part, les informations déposées sur le mur de la page de l’organisation seront par le fait même déposées sur le mur de ses fans, et, d’autre part, si ces derniers considèrent que l’information est digne d’être partagée, ils deviendront des agents multiplicateurs. Si l’organisation compte 500 fans et que chacun redistribue son message à 4 personnes, ce sont 2 000 personnes ayant des profils très segmentés qui recevront la nouvelle. Si, à leur tour, la moitié de ces personnes retransmettent le message à 2 personnes, ce sont 2 000 personnes additionnelles qui recevront le message. Voilà l’effet viral !

Amener des personnes à soumettre leur candidature. Il est important que l’entreprise bâtisse sa base de fans et l’entretienne. Néanmoins, elle ne doit pas perdre de vue l’objectif premier, qui est de générer des candidatures de qualité. Elle doit alors structurer un cheminement de conversion qui guidera le candidat vers un endroit où il sera amené à passer à l’action, c’est-à-dire à soumettre sa candidature. Cela peut prendre différentes formes selon le contenu à partager. Voici deux exemples :

  • Si la nouvelle qui est partagée concerne une innovation dans les conditions de travail, on devrait inclure un lien du type « Pour en savoir plus sur nos conditions de travail, cliquez ici » conduisant la personne dans la section « Carrières ». Une fois celle-ci arrivée dans la section, l’organisation devrait rendre visible un bouton d’appel à l’action pour inciter le candidat à visiter la section des emplois disponibles.
  • Si le document partagé est une vidéo présentant les réalisations des employés, par exemple leur participation à une oeuvre caritative, l’organisation devrait, à la fin, insérer un message du type « Vous souhaitez, vous aussi, faire partie d’une équipe dynamique ? Visitez notre section “Emplois” ! » ainsi qu’un lien vers la section « Carrières » du site Web.

Il ne faut pas oublier que l’objectif de la présence de l’entreprise sur Facebook, dans ce contexte, est de stimuler l’engagement des candidats. Elle doit donc leur montrer le chemin... tout en leur permettant de ne pas le prendre s’ils ne sont pas prêts à le faire. Enfin, mentionnons que certaines applications comme « Work4 labs » permettent d’intégrer une section « Carrières » directement dans la page Facebook. Loin d’être anecdotique, ce type d’application peut faciliter la conversion des candidats en améliorant la proximité entre les pages de « séduction » et les pages de « conversion ». En bref, si l’organisation est capable de proposer au candidat un dialogue, de l’information et une « conversion » sans qu’il ait à quitter la plateforme, pourquoi ne pas le faire !

Comment utiliser le microblogage Twitter pour recruter ?

La plateforme Twitter, en permettant de diffuser des messages de 140 caractères parmi ses abonnés, peut constituer une excellente option pour la diffusion d’informations relatives au recrutement.

Signalons tout d’abord que les utilisateurs de Twitter au Québec représentent moins de 7 % de la population. On est donc loin de Facebook, qui rejoint plus de 60 % de la population active, ou encore de LinkedIn, qui est utilisé par 18 % de la population active. Twitter est très prisé par les professionnels des domaines où l’information doit circuler rapidement (finances, technologies de l’information, journalisme, etc.) et par Monsieur et Madame Tout-le-Monde, pour « suivre » les artistes et les sites de nouvelles.


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Dans un contexte de recrutement, Twitter propose principalement cinq approches :

  • L’utilisation du microblogage à des fins commerciales, pour communiquer avec les clients de l’entreprise et en profiter pour annoncer des possibilités de carrière.
  • La diffusion des postes à pourvoir, l’avantage étant alors uniquement d’offrir aux adeptes de Twitter de communiquer avec eux en utilisant leur plateforme.
  • La communication des nouvelles liées à l’emploi, dans son sens large, comme des offres d’emplois, des annonces de stages, des événements de recrutement et même des nouvelles associées aux caractéristiques de l’organisation ou des postes.
  • La diffusion de l’expertise pour stimuler l’adhésion des publics cibles, et l’insertion du même coup des informations relatives aux possibilités d’emplois.
  • La diffusion des postes, des nouvelles et de l’expertise en permettant le dialogue. Quoique Twitter soit davantage un média de diffusion qu’un média de dialogue, certaines entreprises réussissent habilement à en faire une plateforme conversationnelle (par exemple, Sodexo USA).

Les usagers utilisent alors les 140 caractères pour poser des questions et un gestionnaire de communauté s’assure de leur répondre dans les meilleurs délais.

Conclusion

Les médias sociaux s’avèrent des outils parfaitement adaptés au contexte actuel du marché du travail puisqu’ils permettent de rejoindre les candidats les plus recherchés : les candidats passifs qui ont actuellement un emploi. Ils ne constituent cependant pas une recette miracle contre la pénurie de main-d’œuvre. Comme tous les outils de recrutement, il faut évaluer leur pertinence, compte tenu des réservoirs ciblés, mais aussi les inscrire dans une démarche bien planifiée. Les médias sociaux ne sont pas une roue de secours dans un contexte de recrutement très difficile. Ils sont une gamme d’outils additionnels dont dispose le recruteur pour mieux communiquer avec les candidats potentiels.

Didier Dubois est associé principal chez HRM Groupe, [email protected].

Emilie Pelletier est associée chez HMR Groupe, [email protected].1


Note

1 Ces auteurs ont écrit le livre suivant sur le sujet : RH 2.0 : Guide de survie pour recruter sur le Web, Éditions Yvon Blais - Thomson Reuters, 2010.

Référence

Malo. J. (2011). « Nouvelle stratégie de recrutement : Attirer les meilleurs talents », Hydropresse, juin, no 2, 20-23.