Brésil-Canada

Les Jeux olympiques débutent demain, sur fond de controverses...

N'en déplaise aux fervents de l'olympisme, il y a un je-ne-sais-quoi de malsain qui flotte au-dessus de Rio de Janeiro, ville-hôtesse des Jeux olympiques qui débuteront officiellement demain. Et il n'est pas question ici de la qualité de l'eau de la baie de Guanabara, dont il est grandement question ces jours-ci...

Loin d'être la fête attendue, les jeux de la XXXIe olympiade de l'ère moderne s'ouvrent à Rio sur fond d'immenses controverses, dans une contrée aux prises avec de sérieuses difficultés de tout acabit : croissance économique négative, crise du Zika, allégations de corruptions à la présidence de la fédération, pauvreté et criminalité endémiques, pour n'en nommer que quelques-unes.


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Problemas, problemas... 

Ne perdons pas de vue que l'effort demandé aux Brésiliennes et aux Brésiliens est immense, eux qui ont présenté la Coupe du monde de football il y a deux ans à peine. Car au-delà de cet effort, il y a l'espoir d'un retour sur l'investissement avec Rio 2016. Mais encore là, la controverse n'est jamais bien loin, et au sujet des hypothétiques retombées qui devraient être générées par la présentation des jeux, on voit apparaître des positions bien campées, comme le rapportent Jonathan Watts et Bruce Douglas dans leur article publié dans le quotidien londonien The Guardian (lire leur article « Rio Olympics: who are the real winners and losers? »). Pour les uns, dont le Comité organisateur des jeux, le maire de la ville et les membres de la communauté des affaires, et sans nier les problèmes qui se dressent à l'aube des jeux, ces derniers apporteront une contribution positive au développement de la ville, notamment en termes de rayonnement international et de développement urbain. Pour les autres, dont nombre d'activistes et de défenseurs des plus démunis, Rio 2016 ne profite qu'au mouvement olympique et aux multinationales qui s'y associent par l'entremise des énormes contrats de commandites. Jonathan Watts et Bruce Douglas font mention, au chapitre des problèmes qui sont venus ternir la préparation de la fête olympique, les nombreuses allégations de corruption relatives à la construction des sites, tout comme les évictions permanentes de citoyens de leurs domiciles pour faire place aux jeux. On parle de dizaines de milliers de familles, évidemment pas les plus riches, ainsi chassées des tristement célèbres favelas...

Les jeux en valent-ils la chandelle?

Rio 2016Difficile de donner raison à un camp plus qu'à l'autre, dans un débat qui peut facilement tomber dans l'émotif. Mais on peut toutefois tenter de porter un regard plus objectif sur la question des coûts de l'aventure olympique, un exercice mené par Bent Flyvbjerg et Allison Stewart dans leur étude « Olympic Proportions: Cost and Cost Overrun at the Olympics 1960-2012 ».

À une certaine époque, le défunt maire de Montréal Jean Drapeau (1916-1999) avait déclaré qu'« Il est aussi impossible pour les Jeux olympiques de Montréal de produire un déficit que pour un homme de devenir enceint[e] ». Grand mal lui en prit, lorsque l'on constate les données du tableau ci-contre! De fait, force est de constater, selon Bent Flyvbjerg et Allison Stewart, que les jeux olympiques dépassent systématiquement les prévisions budgétaires, en moyenne de 179 % (252 % pour les jeux d'été et 135 % pour les jeux d'hiver). Quand on sait que ces budgets se chiffrent aujourd'hui en milliards de dollars, la chose a son importance. Et malheureusement pour l'ancien maire Drapeau, Montréal 1976 pointe en tête de ce classement peu glorieux. Bien que les retombées économiques soient difficiles à évaluer et à mesurer, on peut facilement supposer que ces dernières sont en partie grugées par les déficits générés par la tenue des jeux.

Au final, il est déjà acquis que Rio 2016 se dirigera quand même vers un déficit, dont l'ampleur ne sera déterminée que lorsque les comptes auront été bouclés, dans quelques mois. Choisie par les membres du Comité international olympique en octobre 2009, à une époque où le pays voguait sur une vague de croissance et d'espoir, Rio de Janeiro et ses six millions d'habitants vivent aujourd'hui dans un contexte économique, social et politique diamétralement différent. Espérons que le soleil et la joie de vivre des Brésiliennes et des Brésiliens sauront apporter un quelconque baume sur les sacrifices économiques à venir pour combler l'éventuel manque à gagner...