Fragilité et solidarité, voilà deux mots clés qui nous inspirent pour aborder « l'après ».

C’est avec humilité que nous devons recenser les changements que la crise sanitaire nous impose. Il apparaît toutefois indispensable de nous tourner vers les équipes dirigeantes du milieu des affaires afin de les entraîner dans la reconstruction d’un monde plus sûr, plus fraternel, plus sobre.

Les entreprises, notamment les PME, disposent d’un fabuleux capital de confiance sur lequel la société peut et doit compter. Elles sont au cœur de l’action, entre l’État – celui du Québec comme celui du Canada, qui ont une importante feuille de route à accomplir – et les citoyens – qui auront à « se bouger » et à devenir des consommateurs plus responsables et moins passifs.

Les entreprises ont la mission de faire basculer notre économie dans un modèle humaniste, respectueux des équilibres fondamentaux, centré sur le souci du bien commun, sur la vie et le bonheur et beaucoup moins sur l’accumulation des biens et de richesses. Ceci étant énoncé, l’après-pandémie se dessine en deux phases.

Phase 1 : redémarrer l’entreprise

La première phase est celle du redémarrage pur et simple. Les entreprises doivent remettre les moteurs en marche, produire, vendre, livrer et sortir la tête de l’eau. En clair, elles doivent remettre en état leur capacité à créer de la richesse. Et la création de richesse passe par la création d’emplois dignes, rémunérateurs et qui assurent le développement des talents.

Il faut redémarrer sans remise en question fondamentale immédiate, mais avec 100 % d’empathie envers les employés, les clients, les fournisseurs et toutes celles et tous ceux qui ont souffert de la crise. Les entreprises doivent le faire avec équité, justice, sans abuser sur les prix de vente, en aidant les fournisseurs dans leur trésorerie et en communiquant prioritairement au niveau local et, surtout, de façon authentique.

Phase 2 : réinventer l’entreprise

Puis, il y aura la phase de repositionnement de l’entreprise au carrefour de l’économie et de l’humanisme, de la prospérité et de l’utilité sociale. Il faut redevenir des entrepreneurs autour de deux grands changements.

  1. La redéfinition de la mission

D’abord, les entreprises doivent redéfinir leur raison d’être et celle-ci doit mobiliser tout le monde. Il est important d’écrire, avec toutes les parties prenantes, une proposition de valeur avec l’engagement d’être utile à la société et d’avoir une contribution forte et intelligente à la communauté.

  1. L’ouverture aux employés

Puis, les entreprises doivent ouvrir le capital aux employés de façon significative en visant au moins une part de 10 % pour changer la donne! Car c’est avec eux qu’il convient de mettre en œuvre la raison d’être de l’entreprise, de redéfinir sa stratégie, d’imaginer une nouvelle offre dont la chaîne de valeur sera impérativement solide, sans dépendance excessive vis-à-vis de fournisseurs ou de sous-traitants incontrôlables.

Il faut penser à une stratégie où la mutualisation – « Faire avec les voisins » – sera la source de tous les programmes. Il faut travailler avec les entreprises de la région, des associations, des organismes à but non lucratif et, pourquoi pas, des concurrents!

La stratégie doit aussi réinventer l’échelle des rémunérations en réévaluant les métiers de façon équitable, notamment ceux de première ligne. Elle doit également être davantage fondée sur des valeurs humanistes que sur des valeurs liées à l’individualité, l’avidité et la cupidité, afin de donner plus d’ouverture aux autres et à la solidarité. Ces valeurs doivent s’inscrire dans le quotidien.

Avec le concours de l’État

Beaucoup d’entreprises vont solliciter le gouvernement dans les prochains jours, notamment pour garantir les prêts requis par la relance. Cette aide s’annonce massive, mais elle ne doit pas être neutre. Elle doit permettre d’éviter que tout reparte exactement comme avant, voire même qu’il y ait recul. Car certaines entreprises pourraient remettre en question leurs engagements pour le climat.

Il est donc impératif que l’aide de l’État, pour les entreprises de plus de 500 employés, soit conditionnée à la rédaction immédiate de leur raison d’être, avec l’écriture de quatre ou cinq engagements envers la société et les parties prenantes, dont celui d’ouvrir le capital aux salariés. La mise en œuvre de ces engagements se fera en phase 2, mais l’entreprise, pour conserver les garanties de l’État pendant toute la durée du prêt, aurait chaque année à rendre des comptes sur l’avancée de ses engagements.

L’entreprise de l’après-COVID-19 sera différente. Elle sera citoyenne, engagée et n’aura pas le droit de décevoir nos espoirs, de manquer cette formidable opportunité de changement que nous procure cette crise sanitaire.