La rétroaction fait partie intégrante de notre quotidien. Qu’elle émane de notre gestionnaire, de nos collègues, des médias sociaux ou encore de notre famille, nous en  recevons continuellement à la suite de nos actions et de nos décisions. Dans un monde où le besoin de se surpasser est omniprésent et où les attentes de rendement sont élevées, la réflexion sur la mise en place des conditions favorables pour donner ou recevoir une rétroaction devient une pratique de gestion essentielle.

Voici donc quelques pistes de réflexion pour toute personne désirant développer sa capacité à donner ou recevoir un feedback authentique.

La confiance et la relation à l’autre

Il n’est plus à démontrer qu’une relation de confiance entre deux individus favorise la réception d’une critique authentique. La confiance que nous portons envers l’autre crédibilise son feedback à notre égard. C’est comme si nous lui donnions la permission de le faire car nous faisons confiance à son jugement.

Évidemment, plus cette rétroaction cible des éléments qui se situent dans une zone proximale de développement, c’est-à-dire une zone qui se situe à la limite de ce qui est connu de l’autre, plus nous aurons la volonté de mettre en place des actions d’amélioration (Vygotski, 1985). Si elle est trop éloignée de notre conception de nous-même, il est difficile de pouvoir l’utiliser pour se développer.

Pourtant, soyons honnêtes, il arrive souvent que le feedback que nous recevons ne vienne pas nécessairement sous cette forme idéale. Quand il est donné par quelqu’un avec qui nous n’avons peu ou pas d’affinité, nous avons souvent le réflexe de le « boxer » hors de notre zone de confort en nous justifiant de toutes les raisons imaginables et inimaginables.

Dans l’idéal, la personne qui donne ce feedback connaît la zone proximale de développement de l’individu. L’exemple d’un professeur ou mentor qui vous en offre un un jour et où, 10 ans plus tard, vous réalisez enfin la valeur de ce commentaire, nous permet d’apprécier l’importance de bien cibler le feedback pour pouvoir ainsi y récolter ses fruits.

La connaissance de soi

Fenêtre de JohariÉtonnamment, la façon dont nous réagissons à ces critiques (qu’elles soient perçues comme légitimes ou non) est une puissante révélation de notre identité. Sommes-nous agacés par le commentaire du petit nouveau ou alors ouvert, reconnaissant, curieux, calme ? Sommes-nous frustrés du feedback de notre gestionnaire alors qu’il est si peu présent dans notre quotidien ou alors empathique face à sa grande charge de travail ?

La fenêtre de Johari (Luft et Ingham, 1955) qui illustre la nature variée des informations données en situation de rétroaction, démontre que l’autre à souvent une perception de nous que nous ne soupçonnons pas.

Prendre conscience de nos automatismes et mécanismes de défense dans nos façons de réagir nous permettra d’améliorer l’étendue de notre connaissance de soi et devient une forme tout aussi puissante de rétroaction.

L’estime de soi

La relation de confiance et la connaissance de soi, quoi qu’essentielles, ne sont toutefois pas suffisantes pour assurer que cette rétroaction soit reçue de façon constructive et optimale. Pour pouvoir pleinement explorer les angles morts exprimés par la fenêtre de Johari, une estime de soi forte est un facteur déterminant.

Alors que le niveau d’estime de soi détermine notre capacité à prendre des risques, faire des choix, à essayer, à se tromper, il permet aussi à celui qui reçoit un feedback de s’ouvrir sur des facettes encore inconnues de lui-même, et ce, sans risque d’atteindre son droit d’être lui-même.

Si le sentiment général qu'une personne nourrit à l'égard d’elle-même est davantage négatif que positif (et donc une faible estime de soi), la rétroaction pourrait être perçue comme une atteinte à l’identité et devient contre-productive. Dans ce contexte, elle n’est plus porteuse de sens.

Avant de pouvoir ouvrir ce type de conversations, il faut donc permettre à l’autre de développer son estime de soi en expérimentant des réussites, en recevant de la reconnaissance et en nourrissant le sentiment d’avoir de la valeur. Démontrer un sens de l’initiative, entretenir un rapport positif face à l’échec / l’erreur / la déception d’attentes et adopter une attitude d’ouverture face à ce qui est étranger / différent sont des manifestations d’une bonne estime de soi.

L’identification des meilleures conditions pour donner ou recevoir une rétroaction permet d’éviter que les commentaires donnés ou reçus soient inévitablement perçus comme une critique, voir même une menace à notre identité. Au contraire, elles peuvent même permettre de les transformer en opportunité de se révéler et se connaître.

Et vous, quelle posture adoptez-vous face à la rétroaction ?


Références 

Luft, J. and Ingham, H. (1955). The Johari Window: a graphic model for interpersonal relations, University of California Western Training Lab.

Vygotski, L. (1985). « Pensée et Langage », Éditions Sociales, Paris, p. 270.