Le centre de gravité économique de la planète, on s'en doute un peu, est désormais ailleurs qu'en Occident.

Alors que la croissance économique demeure somme toute modeste de ce côté-ci du globe, l'Asie est en voie de s'imposer comme le pivot des affaires à l'échelle mondiale.

On peut aisément se convaincre de la chose en constatant que quatre des cinq plus grosses banques, en termes de capitalisation, sont chinoises, et que l'Asie place cinq de ses institutions bancaires dans ce top 10. Comme le signale The Economist, dans son article « Stressful Times », publié sur son site Internet, plus d'un tiers des banques d'envergure sur la planète ont leur siège social dans un pays émergent. Ainsi va l'Histoire!


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Toutefois, la situation ne va pas sans causer certaines inquiétudes pour les observateurs de la finance internationale. De fait, l'inclusion progressive des banques des pays émergents dans le circuit financier planétaire, de même que la place prépondérante que ces dernières se taillent peu à peu dans le milieu financier, appelle à une certaine prudence, car la croissance du secteur bancaire de ces mêmes pays est indéniable. Mais devant cette croissance effrénée, d'aucuns s'inquiètent de certaines réalités propres à ces institutions bancaires, qui pourraient venir plomber cette croissance et fragiliser le système économique mondial. De quoi est-il question au juste?

  • La répartition des actifs dans le portefeuille de prêts des banques des pays émergents est un sujet d'inquiétude. Même si le prêt personnel est en croissance, l'entreprise demeure la plus grande créancière de ces banques. C'est donc dire que des entreprises œuvrant dans des secteurs tels que l'immobilier (notamment en Chine), les infrastructures (en Inde) et les matières premières (au Brésil et au Nigéria, par exemple) ont contracté au cours des dernières années d'importantes dettes. Toutefois, ces secteurs ont aussi connu un ralentissement significatif...
  • Ce qui nous amène aux mauvaises créances, qui pourraient aussi causer d'éventuels problèmes au système bancaire des pays émergents. À titre d'exemple, le secteur bancaire indien, dont les trois-quarts sont étatisés, présente un taux de prêts improductifs ou de prêts restructurés qui se situe à 14 %. C'est beaucoup! Autre cancre en la matière, la Chine. Selon le site Internet de Bloomberg (lire l'article « China's Troubled Credit Swells to Sweden-Sized $628 Billion ») les mauvaises créances du pays équivalent au PIB de la Suède.
  • Ajoutons à cela les problèmes de transparence de ces institutions bancaires. À l'égard, par exemple, de leurs mauvaises créances, certaines institutions bancaires tendent à officiellement minimiser le problème. C'est le cas du gouvernement chinois qui estime que ces dernières ne représentent que 1,6 % de la capitalisation bancaire du pays. Les connaisseurs en la matière estiment que ces mauvaises créances représenteraient plutôt 8 % de l'avoir des banques. Tout un décalage!
  • Et, finalement, l'inflation et la montée des taux d'intérêts que connaissent certaines de ces économies émergentes, notamment la Russie et le Brésil, pourrait empêcher certains emprunteurs de verser leurs mensualités, avec les conséquences que l'on imagine alors...

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À l'heure actuelle, les banques des pays émergents demeurent très profitables. Mais la croissance et l'appât du gain peuvent aussi faire en sorte que l'on soit parfois tenté de fermer les yeux sur certaines réalités, certaines façons de faire discutables. La crise des subprimes de 2008 est là pour nous rappeler qu'en matière de finance, et de finance internationale a fortiori, la vigilance et l'éthique sont toujours de rigueur...