Article publié le 12 novembre 2016

Grand parleur, petit faiseur ?

Le bon vieux principe de Peter... Vous connaissez ? Énoncé par les psychologues Laurence J. Peter et Raymond Hull dans un livre publié en 1970 et devenu un best-seller depuis, ledit principe énonce que « [...] dans une hiérarchie, tout employé a tendance à s'élever à son niveau d'incompétence ».

Le fait est, et nous pouvons sans doute tous témoigner de la chose tout au long de notre parcours professionnel, qu'il nous arrivera de tomber une fois sous les ordres (parfois incohérents !) d'un incompétent. C'est quasi inévitable ! Et lorsqu'une telle chose se produit, une question surgit immédiatement à notre esprit : « Comment se fait-il que cette personne ait été nommée à ce poste? ». Et cette question a son importance ! S'agit-il d'une erreur des experts en ressources humaines? De la haute direction? L'incompétent aurait-il réussi à dissimuler ses faiblesses à ce jour ?

Une partie de la réponse nous est apportée par Tomas Chamorro-Premuzic, dans son article « Why Do So Many Incompetent Men Become Leaders? », publié sur le site Internet de la Harvard Business Review. Selon le professeur à la University College de Londres, la présence d'un certain nombre d'incompétents aux postes clés d'une entreprise ou d'une organisation serait d'abord et avant tout le fait des hommes ! Surpris par la chose ? Peut-être pas, si l'on considère que, dans le cas des hommes, ces derniers seraient plus enclins, dans l'exercice de leurs fonctions et du leadership qui y est inhérent, à masquer leurs lacunes par des démonstrations d'arrogance ou de charisme, ce que nous avons aisément tendance à confondre avec les traits d'un meneur.

Arrogance, charisme... Ça évoque quelque chose ? Il s'agit là de caractéristiques associées à l'individu narcissique, individu dont nous avons cerné la nature dans l'un de nos précédents articles (lire « Le narcissique dans l'organisation »). Bon nombre d'études, dont celle menée par Amy B. Brunell et ses complices¹, indiquent que dans le cas de groupes dont le niveau de cohésion est faible, une personne porteuse de traits narcissiques a plus de chances d'émerger comme leader que dans le cas d'un groupe soudé ou cumulant plusieurs mois ou années d'existence. Et pour ajouter au portrait, certaines autres études démontrent également que les hommes ont tendance à surévaluer leur intelligence et leurs compétences, tout comme ils sont également plus enclins à mettre de l'avant des comportements ou des attitudes empreints d'arrogance et de manipulation.

Évidemment, nos patrons masculins ne sont pas tous à mettre dans le même panier ! Mais ce qui ressort de ces études, c'est que la qualité du leadership ne se définit pas en fonction d'un genre ou d'un autre, mais bien davantage par la présence (ou l'absence, c'est selon !) de traits de caractère tels l'humilité, l'empathie ou l'intelligence émotionnelle, pour ne nommer que ceux-ci. Et à ce compte, force nous est de reconnaître, messieurs, que ces dames sont sans doute mieux équipées que nous le sommes, et le montrent plus souvent dans le feu de l'action...

Méfions-nous donc de ceux qui claironnent fort et qui bombent le torse !


¹Brunell, A. B., Gentry, W. A., Campbell, W. K., Hoffman, B. J., Kuhnert, K. W., & DeMarree, K. G. (2008). « Leader emergence: The case of the narcissistic leader ». Personality and Social Psychology Bulletin, 34(12), pp. 1663-1676.