Organisations: quel est votre degré de maturité numérique?
2017-03-01
French
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2018-08-21
Organisations: quel est votre degré de maturité numérique?
Stratégie , Innovation , Technologie
Article publié dans l'édition printemps 2017 de Gestion
En quoi consiste la maturité numérique ? Comment la mesure-t-on ? Est-elle un préalable à une transformation numérique efficace des organisations ou constitue-t-elle un aboutissement en soi ? Et pourquoi est-il si important d’en acquérir ?
La notion de maturité numérique a pris une place importante dans le langage des gestionnaires. Elle forme d’ailleurs, avec les thèmes associés de transformation numérique et de stratégie numérique, un triptyque représentatif de la manière dont les dirigeants d’entreprise prennent en compte le rôle du numérique dans leur environnement et dans leurs pratiques d’affaires. Pourtant, ces concepts sont souvent mal compris et, de fait, mal exploités.
Malheureusement, dans le contexte actuel, on a tendance à « punir » sévèrement cette mauvaise compréhension. En effet, non seulement le taux de développement et de diffusion des innovations technologiques est fortement à la hausse (notamment en raison de la croissance exponentielle des capacités des technologies numériques en matière de traitement et de stockage de l’information, sans compter la démocratisation de l’utilisation de ces outils), mais cette « accélération » a surtout pour effet de fragiliser la position concurrentielle – voire de compromettre la survie – de nombreuses entreprises dans leur secteur d’activité. D’ailleurs, certains produits, solutions ou services élaborés en fonction du numérique bouleversent des pans entiers de l’économie, laissant les entreprises plus traditionnelles devant de nombreuses interrogations quant aux mesures adéquates à adopter.
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Le rôle de la maturité numérique
Les statistiques à cet égard sont éloquentes : 70 % des entreprises figurant au classement Fortune 1000 de 2004 pourraient avoir disparu en 2016 (McKinsey) et 75 % des entreprises du Standard & Poor’s 500 pourraient être rayées de la carte d’ici 2027 (Richard Foster, université Yale).
Par conséquent, afin de rester concurrentielles, les entreprises n’ont d’autre choix que de mettre en œuvre une transformation numérique ou, en d’autres termes, de se réinventer en utilisant les technologies numériques pour reconfigurer de manière fondamentale leur offre, les façons de leur donner accès et de mobiliser leurs clients ainsi que leurs modes de fonctionnement. On parle donc souvent de la transformation numérique en termes de transformation en ce qui concerne trois aspects fondamentaux d’une entreprise : ses produits et son modèle d’affaires, ses interfaces et ses processus de relations clients ainsi que ses processus internes de production et de travail.
Une stratégie numérique intervient quand arrive le temps, pour une organisation, de décider de l’orientation à donner à cette transformation numérique et de planifier ses efforts de transformation en établissant les priorités. En d’autres termes, une stratégie numérique comprend une vision et un plan de travail pour intégrer le numérique de manière cohérente au sein du modèle d’affaires d’une organisation dans le but d’acquérir un avantage compétitif.
Les orientations et les choix qui font l’objet d’une stratégie numérique reposent sur plusieurs facteurs, notamment la coordination avec la stratégie d’entreprise, les ressources financières disponibles, le leadership nécessaire pour transformer l’organisation, l’intensité concurrentielle dans le secteur d’activité, les atouts clés de l’organisation ainsi que la maturité numérique de celle-ci.
L’importance de bien définir la maturité numérique
De manière générale, la notion de maturité fait référence à un état de plein développement, voire au degré d’atteinte d’une certaine maîtrise (dans le cas d’une pratique, par exemple) après une période d’apprentissage et de croissance. Ainsi, on fait parfois référence à la maturité numérique en parlant d’un quotient numérique1, d’un degré de sophistication2 ou de la distance d’un « idéal », cet idéal étant une organisation qui aurait reconfiguré avec succès ses processus, ses talents et son modèle d’affaires par l’intermédiaire du numérique3.
Deuxièmement, à une échelle plus globale (celle d’un pays, par exemple), un indice de maturité numérique peut enrichir les réglementations et les politiques portant sur l’innovation en définissant les secteurs et les régions géographiques les plus en avance ou les plus en retard. De ce fait, les dimensions clés permettant d’évaluer le degré de maturité numérique d’une organisation doivent être indépendantes du secteur d’activité où celle-ci évolue.
Les indices et les stades de la maturité numérique
Il existe plusieurs indices de maturité numérique. Par exemple, l’indice de CapGemini comporte deux dimensions : l’intensité numérique, qui correspond au degré d’investissement dans des technologies qui permettent de changer les façons dont l’organisation fonctionne, et l’intensité de la transformation managériale, qui fait référence aux capacités de leadership pour mettre en œuvre la transformation numérique au sein de l’organisation.
La mesure de ces deux aspects permet de déterminer si une organisation est de type débutante (faible intensité à la fois numérique et transformationnelle), fashionista (haute intensité numérique, faible intensité transformationnelle), conservatrice (faible intensité numérique, haut degré d’intensité transformationnelle) ou digirati (haute intensité à la fois numérique et transformationnelle).
Un autre indice élaboré par l’institut de recherche Forrester se concentre sur quatre catégories de facteurs :
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Les aspects culturels, qui concernent l’approche qu’adopte une organisation en ce qui concerne le processus d’innovation et le développement de compétences internes (à savoir si cette organisation est dynamique, souple et suffisamment mobilisée pour acquérir les ressources nécessaires).
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Les aspects organisationnels, qui font référence au degré de coordination et de cohérence à l’intérieur de l’organisation en ce qui a trait au numérique, à la stratégie et au mode de gouvernance (à savoir quel est le degré de formalisation et de sophistication du processus de conception et de déploiement de la stratégie numérique).
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Les aspects technologiques, qui font référence à l’intensité d’adoption d’innovations technologiques au sein de l’organisation.
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Les aspects de connaissance, qui positionnent une organisation en fonction de la manière (plus ou moins systématique et détaillée) dont elle tient compte et prend des décisions basées sur les données qu’elle-même ou ses clients produisent.
De sceptique à différenciateur
Cet indice permet de définir quatre stades de maturité. Les organisations qui obtiennent les scores les plus bas sont désignées comme étant sceptiques : elles sont au début de leur transformation. Viennent ensuite les adopteurs, qui investissent dans les talents et les infrastructures technologiques. Le troisième stade comprend les collaborateurs, qui se mobilisent pour que l’organisation soit plus intégrée et plus efficiente. Enfin, le plus haut degré de maturité concerne les différenciateurs, qui se démarquent par leur habileté à intégrer les données de manière systématique dans leurs processus de décision.
Finalement, deux observations nous mènent à croire que l’improvisation n’a pas – ou n’a plus – sa place en matière de transformation numérique et qu’il est donc urgent que les organisations fassent le diagnostic de leur maturité numérique afin de cerner leurs faiblesses et leurs axes de levier, donc de mettre en œuvre de manière plus informée une stratégie numérique performante. Premièrement, il y a une forte corrélation entre le stade de maturité numérique et la croissance d’une organisation. Les différenciateurs ont trois fois plus de chances de connaître une croissance annuelle à deux chiffres comparativement aux sceptiques. Deuxièmement, le Global Agenda Council on the Future of Software and Society4 prévoit que, d’ici 2025, nous verrons apparaître le premier robot pharmacien (probabilité de 86,4 %), la première voiture de production imprimée en 3D (81,4 %), 30 % des audits d’entreprise effectués grâce à l’intelligence artificielle (75,4 %), les premières taxes collectées par nos gouvernements au moyen de blockchains (73,1 %), la première ville de plus de 50 000 habitants sans aucun feu de circulation (63,7 %) et le premier conseil d’administration doté d’une machine munie de l’intelligence artificielle (45,2 %).
Notes
1. Catlin, T., Scanlan, J., et Willmott, P., « Raising Your Digital Quotient », rapport de la firme McKinsey & Company, juin 2015.
2. Gill, M., et Van Boskirk, S., « The Digital Maturity Model 4.0. – Benchmarks : Digital Business Transformation Playbook », rapport de recherche de la firme Forrester, 22 janvier 2016.
3. Kane, G. C., Palmer, D., Philips, N., Kiron, D., et Buckley, N., « Strategy, not Technology, Drives Digital Transformation – Becoming a Digitally Mature Enterprise », rapport de recherche, MIT Sloan Management Review et Deloitte University Press, juillet 2015.
4. « Deep Shift, Technology Tipping Points and Societal Impact », rapport d’enquête du World Economic Forum, septembre 2015.
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