Pourquoi revaloriser l’intelligence collective en entreprise en éliminant les dysfonctionnements incompréhensibles et les règles insensées? Parce que «les assauts quotidiens contre le bon sens nous font perdre du temps, sapent notre énergie et nous mettent en colère», constate Martin Lindstrom, fondateur de la Lindstrom Company, une société spécialisée dans la transformation d’entreprises. L’auteur s’est donné pour mission d’éradiquer frustrations, procédures obsolètes et barrages internes dont les directions ne soupçonnent même pas l’existence.

Dans un contexte où la COVID-19 est devenue une justification universelle pour expliquer tous les choix d’une entreprise, comment échapper au risque de se laisser duper par tous ces faux prétextes? La réflexion de l’auteur commence le jour où il demande à un serveur pourquoi les œufs Benedict ne sont plus au menu. «À cause de la COVID», lui répond promptement l’employé en lui suggérant plutôt de prendre les œufs brouillés. Où est le bon sens là-dedans?

Ce qui frappe l’auteur, ce n’est pas la suppression de ce plat-phare du menu de son restaurant préféré : c’est davantage le phénomène du bullshit, qu’il définit comme «une véritable pandémie qui frappe le monde de l’entreprise» et qui va à l’encontre de tout bon sens. On ne s’en remet plus au jugement des gens, à leur intelligence et à leur intuition. Avant l’argument de la COVID-19, les motifs invoqués prenaient la forme de phrases tout aussi insignifiantes : «Le système m’oblige à procéder ainsi», entendait-on souvent.

Éradiquer le bullshit dans votre entreprise

Lindstrom, M., Éradiquer le bullshit dans votre entreprise – 90 jours pour retrouver le bon sens au travail, Paris, Éditions Alisio, 2022, 304 pages.

L’importance de l'empathie

Empêtrés dans les affaires bureaucratiques internes, les employés perdent de vue l’objectif fondamental du service rendu. Ce qui est évident pour un observateur de l’extérieur l’est moins pour un acteur à l’interne, constate l’auteur. Selon lui, il convient de rappeler cette règle d’or qui remonte à 500 ans avant notre ère : «Traitez les autres comme vous aimeriez qu’ils vous traitent. Ou plutôt, ne traitez pas les autres comme vous n’aimeriez pas qu’ils vous traitent.» Autrement dit, il faut concevoir et offrir des produits et des services de manière raisonnable, fiable, réaliste et pragmatique, en ayant le bon sens comme préoccupation centrale. L’empathie, cette aptitude à se mettre à la place de l’autre, réveille le jugement.

Se mettre à la place du client

Pour aller au-delà des enquêtes de satisfaction, les employés doivent être en mesure de vivre la même expérience que le client. Ils doivent voir le monde – ou leur service – avec les yeux de la clientèle. Voilà ce que l’auteur recommande pour sortir de «la myopie organisationnelle». Former le personnel à l’expérience-client permet de ressentir la frustration du client qui reçoit mille et une excuses de la part des employés : «Désolé, je ne peux rien faire pour vous», «Ce n’est pas de mon ressort», etc.

Le H2H

Martin Lindstrom rappelle que les clients, tout comme les employés, sont avant tout «des êtres humains, pas des chiffres dans un tableau Excel». Pour favoriser la relation d’humain à humain (H2H), il propose une méthode qui permet de repérer le genre d’obstacles que l’on trouve régulièrement en entreprise et d’engager une série de petits changements (qui sont autant de petites victoires faciles) dans un délai de 90 jours. Recruter des agents de changement et les lâcher dans l’organisation : voilà qui contribue aussi à encourager le gros bon sens!

Article publié dans l'édition Été 2023 de Gestion