Dans un monde professionnel en transition, le transfert des postes de direction aux jeunes générations secoue les fondements du leadership traditionnel et oblige les organisations à se remettre en question.

Les membres de ces générations, nés entre 1980 et le début des années 2000, prennent aujourd’hui la tête d’équipes et de départements, voire d’organisations entières, avec des attentes et des valeurs qui diffèrent radicalement de celles de leurs prédécesseurs. Face à cette nouvelle donne, les entreprises doivent surmonter un défi de taille, celui d’attirer et de retenir ces talents de demain. Toutefois, une question s’impose : leur modèle actuel de leadership est-il durable?

Un leadership en quête de sens et d’impact

Plusieurs études montrent que les nouvelles générations ne se contentent plus d'un simple salaire à la fin du mois. Elles recherchent un travail qui donne un sens au temps investi et qui leur permet d’avoir un impact positif sur leur environnement. On parle de plus en plus du concept de «vendre son temps». C’est pourquoi une valeur numérique financière ne suffit plus en tant que proposition d’employeur. Faire la différence dans la vie des membres de leur équipe, avoir un impact social et économique et contribuer à un monde meilleur ne peuvent plus être des slogans destinés à attirer les candidats, ils constituent désormais un cadre de valeurs dans lequel les nouvelles générations veulent bâtir leur vie, notamment professionnelle. Les attentes sont là.

La flexibilité : nouvelle norme ou droit acquis?

Le modèle du 9 h - 17 h au bureau a vécu. Les millénariaux et la génération Z aspirent à un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, voire à une intégration ou à une cohabitation de ces deux sphères. Les organisations avant-gardistes instaurent des horaires flexibles fondés sur les livrables, du télétravail à la carte ou encore des semaines de travail compressées. Les leaders nés au cours des quarante dernières années cherchent d’abord à faire confiance, guidés par la suprématie du résultat plutôt que par le présentéisme d’antan. «Faire ses heures» laisse place à «dépasser les résultats».

La hiérarchie pyramidale remise en question

Le leadership traditionnel, basé sur des structures hiérarchiques assez rigides, ne fait plus recette auprès des jeunes générations. Celles-ci préfèrent des environnements de travail horizontaux, au sein desquels la communication est fluide et où chacun peut exprimer ses idées sans devoir «connaître sa place». Les entreprises innovantes gagnent à expérimenter des modèles d’organisation plus «plats», dans lesquels les décisions sont prises de manière collaborative, où les idées circulent librement, indépendamment de l’organigramme, et où des promotions plus rapides aux employés sont justifiées par les résultats obtenus et non par le temps passé sur un poste ou au sein de l’entreprise.

L’apprentissage continu comme moteur de carrière

Les millénariaux et la génération Z ont grandi dans un monde en perpétuel changement, rapide et médiatisé, et sont donc conscients de la nécessité d’apprendre en continu pour rester compétitif. C’est certainement ce qui explique la popularité des programmes de formation sur mesure, des parcours de carrière flexibles ou encore des systèmes de mentorat inversé (où les plus jeunes transmettent leurs connaissances aux collègues plus expérimentés dans des domaines émergents), ce qui permet de créer un meilleur équilibre dans la transmission des savoirs et, par conséquent, du pouvoir. Les nouveaux leaders mettent l’accent sur la polyvalence, la facilité de changer de secteur et la possibilité d’acquérir l’essentiel des connaissances plus rapidement, sans avoir à recommencer à zéro et à gravir des échelons pendant des années.

La technologie au cœur du leadership

Nées avec le numérique, les jeunes générations s’attendent à travailler avec des outils technologiques de pointe. Pour les entreprises, être à jour de ce côté n’est plus un avantage compétitif, mais une norme de base. Celles qui voudraient retenir ces talents doivent donc investir dans des plateformes collaboratives innovantes, des outils d’intelligence artificielle ou encore des technologies de réalité virtuelle pour la formation et la collaboration à distance. Récompenser le travail accéléré par l’IA est plus pragmatique que l’installation de pare-feux pour interdire un changement en réalité inévitable.

L’authenticité et la transparence… pour de vrai

Les leaders d’aujourd’hui et de demain doivent faire preuve d’authenticité et de transparence. Les jeunes générations n’hésitent pas à remettre en question l’autorité et attendent de leurs supérieurs qu’ils soient intègres et cohérents. De plus en plus d’organisations encouragent les nouveaux dirigeants à communiquer ouvertement les défis de l’entreprise, à admettre leurs erreurs en toute vulnérabilité, et à solliciter une rétroaction de leurs équipes. Ce qui explique l’expression de commentaires beaucoup plus directs que par leur passé dans leurs évaluations de performance.

La diversité et l’inclusion : non négociables

Les millénariaux et la génération Z sont sensibles aux questions de diversité et d’inclusion. Les entreprises qui souhaitent attirer les meilleurs talents doivent être proactives en favorisant la  diversité des profils à tous les niveaux de l’organisation, créer des groupes de ressources avec de l’influence réelle pour les employés issus de minorités ou encore former les gestionnaires à une meilleure prise en compte de la diversité et à la lutte contre les préjugés. Personne ne sera dupe : si un gestionnaire fait semblant, il sera vite démasqué et se retrouvera bien seul dans ses fabules.

Le bien-être au travail, ce n’est plus un choix

Le bien-être professionnel n’est plus un luxe, mais bien une nécessité pour les jeunes générations. Les espaces de travail ergonomiques et conviviaux, les programmes de gestion du stress et de la santé mentale ainsi que la pratique sportive pendant les heures de travail font figure de pléonasmes lorsqu’ils sont vantés dans les brochures d’employeurs.

Conclusion : vers un leadership constamment réinventé

Face à l’arrivée massive des millénariaux et de la génération Z sur le marché du travail, les organisations n’ont d’autre choix que de réinventer leurs pratiques de leadership et d’attraction de talent. Les entreprises qui réussiront seront celles qui sauront trouver une transition harmonisée entre le meilleur des pratiques traditionnelles et les innovations apportées par les nouvelles générations, à laquelle devra se greffer le transfert de connaissances. C’est en acceptant ces changements que les organisations pourront non seulement survivre, mais aussi prospérer dans ce paysage professionnel profondément transformé.