Article publié dans l'édition printemps 2017 de Gestion

L’analyse de grands ensembles de données pour les traduire en connaissances et en décisions constitue aujourd’hui un défi majeur dans tous les secteurs de l’activité humaine. De concert avec l’industrie et ses institutions partenaires, Campus Montréal, par le truchement d’un projet phare élaboré avec l’Institut de valorisation des données, occupe une position idéale pour faire des percées d’envergure mondiale dans le domaine de l’innovation guidée par les données.

Générées à une vitesse toujours plus élevée, les données suscitent des occasions inédites pour faire de grandes découvertes et mettre au point des technologies, des processus et des produits révolutionnaires qui façonneront une toute nouvelle économie. Notre stratégie scientifique pour en arriver à une innovation aussi fondamentale se fonde sur les deux composants fondamentaux du comportement intelligent : la connaissance et la capacité de s’en servir.


LIRE AUSSI: Passer du rêve à la réalité: l'inadéquation du mobile


Pourquoi la connaissance et l’optimisation sont-elles si intimement liées ? L’apprentissage automatique pourrait par exemple contribuer à prédire le résultat médical d’une combinaison de traitements et de médicaments prescrits à des doses bien précises pour un patient sur une période donnée. Toutefois, il pourrait y avoir un nombre colossal de combinaisons et de contraintes de ce type (effets secondaires, rareté des ressources, etc.) dont il faudrait tenir compte. Il est actuellement impossible – et ce sera probablement le cas pendant très longtemps – d’énumérer de manière exhaustive l’ensemble extrêmement volumineux de ces combinaisons, et ce, peu importe les avancées informatiques en ce qui a trait à la vitesse de traitement des données ou à la parallélisation. Par conséquent, nous avons besoin d’algorithmes qui puissent chercher de manière efficace parmi ces innombrables combinaisons et en arriver à un choix relativement optimal. L’exemple suivant illustre bien comment l’apprentissage automatique et la recherche opérationnelle s’unissent pour faire émerger un paradigme qui changera les règles du jeu : l’intelligence artificielle (IA) requiert de la connaissance, ce que les algorithmes d’apprentissage automatique peuvent procurer, et elle requiert aussi la capacité d’utiliser cette connaissance efficacement (grâce aux nouvelles puissances de calcul des outils informatiques), ce que permettent les algorithmes de recherche opérationnelle.

Comment transmettre la connaissance à un ordinateur ? Ce qui a prouvé son efficacité bien au-delà des attentes et s’est imposé au cours des dernières décennies, c’est l’idée selon laquelle l’ordinateur peut acquérir des connaissances en observant le monde, c’est-à-dire en traitant de grands volumes de données et en les considérant comme une multitude d’exemples illustrant différents aspects de notre monde. L’apprentissage automatique est la discipline scientifique qui étudie les façons dont les ordinateurs peuvent tirer des apprentissages à partir des données. Des découvertes récentes ont démontré qu’avec plus de données, l’apprentissage automatique peut approcher le niveau de performance humain dans plusieurs domaines.

Comment peut-on utiliser la connaissance ainsi acquise à des fins utiles et pratiques ? Avec des connaissances sur le monde et dans un contexte précis (exemple : une question à laquelle l’ordinateur doit trouver une réponse), la prise de décision peut généralement être posée sous la forme d’un problème d’optimisation. Il s’agit alors de trouver, parmi toutes les solutions possibles, celle qui aura le meilleur résultat en fonction d’un critère prédéterminé et de prédictions fondées sur les connaissances acquises. En effet, la recherche opérationnelle est la discipline scientifique qui étudie les manières d’optimiser les décisions grâce à des algorithmes mathématiques.

L’exploitation adéquate de la synergie entre l’apprentissage automatique et la recherche opérationnelle constitue à la fois un défi et une nouvelle possibilité dans le domaine de l’intelligence artificielle. La connaissance sans la capacité de prise de décision entrave la libération du potentiel intrinsèque de l’IA. Le recours aux meilleurs algorithmes d’optimisation sans extraction suffisante des connaissances équivaudrait à passer à côté d’une occasion majeure et d’une connexion stratégique avec la réalité. L’intégration de l’apprentissage automatique et de la recherche opérationnelle permettra à l’immense potentiel de ces deux approches de se concrétiser, comme l’illustre la récente découverte faite avec notre partenaire DeepMind et son système AlphaGo. Fondé sur la synergie entre l’apprentissage profond et les décisions optimisées, le système AlphaGo a battu le champion mondial du jeu de go, Lee Sedol, en mars 2016. Cela illustre donc le lien étroit qui unit deux éléments de l’intelligence artificielle : les décisions peuvent influencer les données futures (et la situation à venir) de l’apprenant, ce qui crée une boucle de rétroaction qu’on doit absolument prendre en compte.

L’IVADO : un programme de recherche en innovation guidée par les données

Campus Montréal, résultat d’une alliance entre l’Université de Montréal, Polytechnique Montréal et HEC Montréal, a reçu en 2016 un important financement du Fonds d’excellence en recherche Apogée Canada pour réaliser un programme de recherche qui vise à exploiter la synergie entre l’apprentissage automatique et la recherche opérationnelle. L’objectif ? Effectuer des percées dans le domaine de l’innovation guidée par les données. Ce mandat est mené par l’Institut de valorisation des données (IVADO), pour lequel ce projet consiste, d’une part, à bâtir à Montréal un écosystème d’innovation qui carburera littéralement aux données et, d’autre part, à consolider le rôle de Montréal comme leader mondial dans le secteur des mégadonnées.

Campus Montréal y parviendra certes en exploitant, en premier lieu, sa grande expertise et son leadership reconnu à l’échelle internationale dans deux disciplines spécifiques. En effet, Campus Montréal est un pionnier de l’apprentissage profond (deep learning), le champ de recherche émergent dominant dans le domaine de l’apprentissage automatique. Il héberge aussi le plus important laboratoire de recherche universitaire en apprentissage profond au monde, avec le plus vaste et le plus productif de tous les bassins de scientifiques en recherche opérationnelle.


LIRE AUSSI: L'exploitation intelligente des données: une stratégie payante


Ce positionnement unique permet à Campus Montréal d’attirer les talents les plus brillants de la nouvelle génération de scientifiques de données. De plus, Campus Montréal et ses partenaires sont reconnus pour leur capacité de bâtir un écosystème d’intégration grâce à la collaboration de leurs équipes œuvrant dans les domaines de l’apprentissage automatique et de la recherche opérationnelle avec les secteurs d’application et l’industrie, celle-ci ayant absolument besoin d’intégrer des solutions innovantes pour relever les défis – et profiter des possibilités – suscités par les mégadonnées.

Campus Montréal est également à la fine pointe de la recherche en santé, en transports et logistique, en commerce et services d’information ainsi qu’en énergie. Ces secteurs, qui constituent les piliers de ses programmes de recherche, offrent des possibilités de tout premier plan en matière de création de valeur et sont désignés comme des domaines prioritaires par le Fonds d’excellence en recherche Apogée Canada. Enfin, la vision stratégique et l’engagement de Campus Montréal sont également portés par la création de la Chaire d’excellence en recherche du Canada sur la science des données pour la prise de décision en temps réel ainsi que par l’IVADO.

Mis sur pied pour développer la recherche fondamentale en apprentissage automatique et en recherche opérationnelle et pour faire le pont entre le milieu universitaire et l’industrie, l’IVADO contribue, grâce à son expertise de pointe, à l’essor de l’innovation canadienne dans ce domaine.