Malgré la crise vécue en 2020, de nombreuses entreprises ont encore des postes à combler. Mais comment recruter en période de confinement ou lorsque les règles de distanciation sociales sont de rigueur? Là encore, les organisations se sont adaptées.

Chez Desjardins, les entretiens d’embauche sont désormais effectués virtuellement. « Auparavant, les entrevues se faisaient en personne et par téléphone, et les tests psychométriques étaient réalisés en partie dans nos bureaux. On a dû évoluer rapidement et effectuer le virage virtuel à 100 %. Malgré la distance, nous tâchons de garder l’expérience la plus humaine et la plus flexible possible », témoigne Jennifer O’Donoughue, directrice principale du Centre d’acquisition de talents. Elle ajoute que lorsque la pandémie sera chose du passé, certains processus pourraient d’ailleurs être conservés. Car cette nécessaire évolution a aussi permis de faire émerger des aspects positifs.

Ce qui semblait impossible hier…

La crise a constitué un véritable coup d’accélérateur dans plusieurs domaines. « On a mis en place des pratiques qui semblaient impensables il y a quelques mois à peine. Par exemple, en généralisant le télétravail ou en ayant recours aux vidéoconférences pour mener des entretiens d’embauche. On pensait que ce n’était pas possible et finalement, ça fonctionne! », constate Anne Bourhis, professeure titulaire au Département de gestion des ressources humaines à HEC Montréal.

Cela a même fait apparaître des avantages insoupçonnés, indique Pierre-François Devaux, directeur, acquisition de talents chez Intact Corporation financière, entreprise où le recrutement est aussi passé en mode virtuel. « L’expérience est très positive, et cela nous ouvre également des bassins de main-d’œuvre auxquels nous n’avions pas accès auparavant. On a aussi gagné en efficacité, puisqu’il y a moins d’enjeux logistiques et plus de flexibilité, car les candidats n’ont pas besoin de se déplacer », affirme-t-il, estimant que la transition vers le virtuel a une réelle valeur ajoutée.

Il mentionne que le fait de se trouver dans cette situation si particulière de pandémie permet également d’amorcer l’entretien d’embauche sur un mode authentique, dans la mesure où tout le monde se trouve dans le même bateau. « Cela crée nécessairement un lien, ça rapproche les gens », soulève-t-il.

Du côté du grand épicier Metro, toutes les entrevues se déroulent désormais par vidéoconférence ou par téléphone. « Nous avons eu une très bonne collaboration de la part des gestionnaires, ils ont développé des habiletés et nous allons assurément continuer à utiliser cette méthode dans le futur. Pour certains postes, ce mode de fonctionnement nous permet également de recruter en Ontario ou même à l’international », indique pour sa part Lucy Rodrigues, directrice nationale, gestion des talents chez Metro.

Anne Bourhis souligne que ce mode de fonctionnement, combiné au télétravail, offre aussi des perspectives prometteuses pour les entreprises qui peinent à recruter. « Par exemple, on pourrait penser à embaucher quelqu’un de Québec pour un poste à Montréal. L’employé n’aurait à se rendre sur place que quelques jours par mois, et il ferait le reste du travail à distance », illustre-t-elle.

Des avantages bien réels

Le principe même de l’entrevue par vidéoconférence confère au processus un avantage sur les méthodes traditionnelles, estime aussi Anne Bourhis. « Lorsqu’on réalise les entretiens à distance, cela force le recruteur à mieux structurer son intervention et ses questions. On ne peut pas improviser ni lire le CV du candidat à la dernière minute. Il faut se préparer, car cela devient rapidement le chaos si on ne le fait pas. Or, depuis des années, les études ont montré que les entrevues structurées aident à sélectionner des personnes qui correspondent davantage aux exigences du poste », mentionne-t-elle. La professeure soutient d’ailleurs que lorsque la crise sera désamorcée, on ne renouera pas nécessairement avec toutes nos anciennes habitudes. « On pourrait effectuer un premier tri des candidatures par vidéoconférence, par exemple. Ensuite, les deux ou trois personnes retenues seraient rencontrées pour procéder au choix final », avance-t-elle.

Mais embaucher n’est pas tout, il faut aussi intégrer les nouveaux venus. « Là encore, nous avons dû revoir nos pratiques. L’accueil des nouveaux employés se fait désormais de façon virtuelle », indique Dominique Duguay, conseillère principale, développement organisationnel et expérience employé chez Desjardins. Ainsi, on a recommandé aux gestionnaires de mettre l’accent sur certains moments cruciaux, d’adopter un ton bienveillant, de faire preuve d’écoute et d’être authentiques, afin de pouvoir créer un lien de confiance.

« On a identifié des moments cruciaux visant à faciliter l’intégration, notamment la rencontre d’accueil, les réunions quotidiennes et un suivi régulier pendant les premières semaines. La présence et l’implication des gestionnaires sont importantes, et nous avons identifié des joueurs-clés – par exemple, des parrains ou marraines – pour soutenir les nouvelles recrues », précise Dominique Duguay.

Enfin, pour les organisations, cette crise est aussi l’occasion de repenser leurs pratiques d’embauche. « Nos clients ont redoublé de créativité. Certains ont par exemple organisé des journées d’emploi à l’extérieur et ont ajouté des parois de plexiglas pour pouvoir rencontrer les candidats dans le respect des normes sanitaires. Cela a donc permis de créer des événements inédits, qui ont d’ailleurs eu beaucoup de succès », souligne Laura Parent, directrice stratégie marketing RH chez sept24, une agence de marketing RH. Comme quoi, s’adapter peut aussi vouloir dire se réinventer, et même s’améliorer…