S’expatrier pour le travail entraîne de nombreux changements tant sur le plan personnel que professionnel. Comment vous préparer pour cette expérience afin qu’elle soit une réussite? Voici quelques conseils.

«L’expatriation, c’est un monde qui a beaucoup évolué», mentionne d’entrée de jeu Tania Saba, professeure titulaire à l’École de relations industrielles de l’Université de Montréal. Dans les années 1960, les travailleurs qui séjournaient à l’étranger le faisaient dans des conditions privilégiées. Aujourd’hui, une pression financière accrue, le développement d’outils technologiques et la démocratisation du recrutement mondiale ont forcé les entreprises à revoir leurs stratégies.

Les modèles d’expatriation se sont diversifiés au fil du temps. Ceux-ci s’adaptent à de nouvelles considérations économiques et organisationnelles. Plusieurs entreprises misent désormais sur le désir de leurs employés de partir à l’étranger, réduisant du même coup les allocations et l’accompagnement offerts.

Les individus sont ainsi appelés à prendre des initiatives personnelles et à être proactifs dans la démarche. «Les personnes qui sont intéressées par l’international ne devraient pas attendre après l’organisation pour se former», conseille Tania Saba.

Carrières

Des compétences recherchées

Vous souhaitez vivre à l’étranger? S’expatrier, «c’est un projet de vie, mais il faut un jour ou l’autre être capable de subvenir à ses besoins. À un certain moment, avoir un emploi devient nécessaire», rappelle Marilène Garceau, présidente et fondatrice de Kennedy Garceau, une firme gérant des projets de mobilité professionnelle entre l’Europe et le Canada.

Pour concrétiser votre projet, commencez par développer les compétences que les entreprises d’ici souhaitent exporter ou bien pour lesquelles il existe une demande à l’étranger. À cet égard, une expertise technique, notamment dans le domaine technologique, peut faciliter la réalisation de votre projet, compte tenu de la prédominance du transfert de connaissances comme motif d’expatriation.

Une multitude d’autres compétences peuvent être nécessaires, mais celles-ci dépendent des motivations qui incitent l’organisation à vouloir vous envoyer à l’étranger. Si votre travail à l’international consiste à expliquer un nouveau produit ou une nouvelle technologie, vous devrez développer vos capacités de communication. Si l’entreprise vous envoie pour effectuer du développement d’affaires, vous devrez probablement être formé sur le contexte socioculturel, économique et politique, souligne Tania Saba. Bref, si vous partez à l’étranger pour offrir du soutien technique, votre préparation sera bien différente de celle nécessaire pour occuper un rôle de gestion, par exemple.

Les incontournables de la démarche préparatoire

1. Développez vos compétences linguistiques

Voilà une considération pour le moins inévitable. Connaître la langue du pays est fondamental à une expérience internationale réussie.

2. Intéressez-vous à la culture du pays

«Si vous ne vous intéressez pas à la culture, il n’y a  aucun intérêt à aller ailleurs», fait valoir Marilène Garceau. Selon elle, les principaux bienfaits de la mobilité internationale relèvent de l’exposition à l’autre, du partage des cultures. «Il ne faut pas seulement s’intéresser à la manière dont ça va se passer au travail. Il faut aussi s’intéresser à l’histoire», précise-t-elle.

Il existe une variété d’outils pour vous exposer à une nouvelle culture. Le cinéma, la lecture (de biographies, par exemple) et les échanges avec des personnes d’autres origines sont de bons moyens d’en apprendre davantage sur la culture d’un autre pays.

Plusieurs mois avant votre départ, commencez à suivre l’actualité du pays d’accueil, suggère Marilène Garceau. En y consacrant une dizaine de minutes par jour, vous vous familiariserez avec les préoccupations, les enjeux et les principaux acteurs de la société à laquelle vous vous joindrez sous peu.

3. Pensez à la logistique du déménagement

Priorisez les préparatifs logistiques et légaux inhérents à votre déménagement à l’international. À cet égard, Marilène Garceau soutient qu’une aide professionnelle peut épargner bien des soucis.

4. Préparez votre famille

Bien que la mobilité internationale vise majoritairement les travailleurs en début ou en fin de carrière, ceux-ci ayant souvent des circonstances facilitantes, il n’est pas rare de voir des individus partir avec leur partenaire ou leur famille.

Face à une telle situation, Marilène Garceau préconise la vision d’un «projet commun, mais aussi d’un projet pour chacun». Il est ainsi important que les accompagnateurs se trouvent une occupation et des loisirs, au même titre que la personne amorçant son travail à l’étranger.

5. Faites une visite exploratoire

Marilène Garceau recommande aux futurs expatriés d’effectuer une visite exploratoire, même si celle-ci n’est pas offerte dans le contrat de travail. «Si vous déménagez à Joliette, vous allez prendre votre auto pour aller visiter la ville», illustre-t-elle. Le même réflexe doit s’appliquer pour une expatriation, bien que les degrés de complexification soient beaucoup plus élevés.

6. Demandez de l’accompagnement

L’ensemble des préparatifs mentionnés ci-haut nécessite de s’y prendre plusieurs mois à l’avance. Franchir les différentes étapes de la démarche préparatoire avant le départ n’est toutefois pas suffisant pour assurer le succès de votre expérience. Selon Tania Saba, il est important de continuer à suivre des formations lors du séjour en plus de recevoir de l’accompagnement une fois sur place.

«Le mentorat à l’international est incontournable. Le travailleur qui s’expatrie doit toujours avoir un point de repère, que ce soit un mentor local ou au siège social», précise Tania Saba. Un tel soutien est d’ailleurs primordial pour affronter les défis inattendus qui peuvent se présenter. 

Un retour à ne pas négliger

Certains modèles de mobilité n’impliquent pas de réinsertion au sein de l’entreprise lorsque le contrat se termine. Mieux vaut donc planifier vous-même votre retour.

Ainsi, avant de quitter un autre pays, Tania Saba recommande de vous questionner sur la valeur ajoutée qu’aura cette expérience. Plutôt que de remettre en doute ses bienfaits, réfléchissez aux répercussions positives qu’elle aura sur l’avancement de votre carrière. Cette réflexion s’impose d’ailleurs devant chaque décision professionnelle. «Posez-vous les mêmes questions que vous vous poseriez si vous acceptiez un emploi ici», conseille-t-elle.

Les expériences de travail à l’étranger resteront grandement valorisées dans les années à venir, notamment au Québec, croit Tania Sabia. «Regardez les créneaux valorisés dans l’économie québécoise : les technologies, l’intelligence artificielle, le contenu média. Tout cela est directement lié à des capacités de comprendre le monde», conclut-elle.