La musique classique a-t-elle une pertinence et un sens pour toute ville digne de ce nom, en 2017? C'’est l'’interrogation à laquelle Kent Nagano, le directeur musical de l'Orchestre symphonique de Montréal, a voulu répondre, en lever de rideau de C2 Montréal.

De l'incontournable nécessité de la musique classique...

Pour le très populaire et médiatique maestro, en conversation avec l'animateur Gregory Charles, la musique classique se doit d'être une composante vitale de cet organisme vivant qu'est Montréal. « Pour ceux et celles qui vivent dans de grandes villes, nous nous devons de penser que la musique et la vie artistique servent à nous définir », a-t-il lancé d'emblée. Car la seule richesse ne peut servir de socle à l'identité d'une ville ou d'une communauté. Elle demeure essentiellement un moyen qui doit servir d'autres fins. L'’exemple de la ville de Hambourg, métropole germanique dont il est l'un des deux millions de résidents est, à ce titre, éloquent. Avec l'accélération du commerce maritime au XVIIe siècle, Hambourg s'’est rapidement enrichie et les Hambourgeoises et les Hambourgeois ont décidé de mettre à profit la richesse ainsi accumulée pour construire la première maison d'’opéra d'Allemagne, le Hamburgische Staatsoper, ouverte en 1678.  « C'’est un bel exemple d’'une communauté qui se mobilise pour devenir autre chose que la richesse. Pour donner un sens à notre existence, nous avons besoin de quelque chose de plus. Et c'est là que l’'OSM entre en scène! » a-t-il dit en substance.

À cet égard, le maestro est enchanté par le dynamisme de Montréal : « Regardez ce que la communauté a produit avec la Maison symphonique. Ce sont la communauté, les citoyens et les gouvernements qui se sont unis pour construire cette salle en trois ans!»

...et des difficultés de la faire vivre en 2017!

Toutefois, les défis qui se dressent devant les institutions artistiques qui veulent faire vivre ce joyau qu'est la musique classique sont bien réels, et le maestro ne se défile pas devant ces derniers. « Comment pouvons-nous diversifier notre auditoire et faire en sorte que les gens viennent et reviennent à l'OSM? C’est une bonne question, et nous en cherchons la réponse à tous les instants! », a-t-il dit. La publicité pourrait être une solution, mais le procédé a ses limites, et notamment financières dans le cas de l'OSM.

Une partie de la réponse à cette réflexion cruciale est peut-être venue de la fille de Kent Nagano, Karin Kei Nagano (elle-même pianiste de concert!), qui a fait valoir à son illustre paternel trois pistes à explorer afin de raviver l'intérêt pour la musique classique :

  • Ne jamais compromettre la qualité du produit;
  • Ne jamais sous-estimer l’intelligence et la sensibilité du public;
  • Le statu quo ne signifie rien. Ce n’est pas parce que l’'on a fait les choses d'’une telle manière qu’'on doit les refaire systématiquement!

Et c'est ce statu quo que maestro Nagano et son ensemble symphonique entendent bien remettre en question, notamment lors de la prochaine saison. À cet effet, force est de reconnaître que l’'OSM a osé à cet égard, avec la présentation d'un concert à l'aveugle, alors que la salle sera plongée dans l'obscurité la plus totale. « Nous faisons des miracles au chapitre des effets visuels aujourd’hui. Et l'’un des problèmes que connaît l'’industrie de la musique et du son, c’'est que nous n’'avons pas encore trouvé un moyen de rendre de la manière la plus pure possible la qualité du son, dû entre autres aux procédés de compression du son. Nous avons voulu revenir à l’'essentiel. L'’idée de cette expérience, c'’est de se priver de la vision, et d’'ouvrir ses oreilles », explique Kent Nagano.

Si la musique classique compte maintenant plus de cinq siècles d'histoire, elle n'en continue pas moins pour autant de se renouveler avec de telles initiatives qui démontrent le dynamisme de l'OSM et de la communauté montréalaise qui le supporte!