Certaines entreprises versées dans l'énergie solaire sont en voie de se brûler les ailes...

Le solaire a le vent dans les voiles, pour ainsi dire! Cette énergie renouvelable, abondante à l'infini, possède auprès d'une vaste majorité de personnes une crédibilité sans pareille, si on la compare à l'hydroélectricité ou à l'énergie éolienne, par exemple, qui peuvent susciter leur lot de controverses. Cette popularité se traduit également par une croissance significative de l'énergie solaire, d'une perspective à la fois individuelle et collective.

Capacité énergétique mondiale du photovoltaïque

(Source : REN21)


Selon des données de REN21, un organisme sans but lucratif rattaché au Programme des Nations Unies pour l’environnement, la capacité de production énergétique mondiale du photovoltaïque est passée, en l'espace d'une décennie (2004 à 2014), d'environ quatre gigawatts à 177 gigawatts, soit un bond d'un facteur 48 et un taux de croissance annuel moyen d'environ 47%! L'énergie solaire représente aujourd'hui près de 11 % du total des énergies renouvelables produites sur la Terre, mais demeure toutefois extrêmement marginale si l'on considère l'ensemble de la production énergétique mondiale, soit moins de 1 %, les combustibles fossiles contribuant encore à plus des trois-quarts de la capacité énergétique mondiale.

Si, donc, les perspectives du solaire apparaissent rayonnantes, celles de certaines entreprises œuvrant dans ce domaine d'affaires le sont certes moins, s'il faut en croire le magazine britannique The Economist et son article « Blinded by the light ». L'article en question rapporte en effet que deux géant du photovoltaïque, l'américaine SunEdison et l'espagnole Abengoa, sont à l'heure actuelle dans des situations financières fort périlleuses.

Production énergétique mondiale des énergies renouvelables

(Source : REN21)

Pourquoi? D'une part, le contexte macroéconomique mondial n'aide pas ces géants à faire entrer de l'eau au moulin. Les prix à la baisse du baril de pétrole auront sans doute contribué à retarder la décision d'achat de panneaux solaires de bien des consommateurs, réduisant d'autant les revenus des deux entreprises sus mentionnées. D'autre part, la gestion interne de SunEdison et d'Abengoa n'aura aussi pas manqué de faire sourciller bien des observateurs attentifs. Dans le cas de SunEdison, il est fait mention, toujours dans l'article de The Economist, d'acquisitions massives et pas toujours bien avisées, de ratés organisationnels, d'une gouvernance douteuse et de livres comptables tout aussi douteux. Ajoutons à cela la décision de l'entreprise de retarder la publication de son rapport annuel 2015, et il n'en fallait pas plus pour alerter les places boursières. Selon Spencer Jakab, du Wall Street Journal (lire son article « SunEdison: Looking for Life in Its Orbit »), la faillite ne serait qu'une question de jours, voire même d'heures, le prix de l'action de l'entreprise étant passé de 32 dollars en juillet dernier à... 25 sous, en date d'hier.

SunEdison AbengoaEt ça ne va guère mieux de l'autre côté de l'Atlantique, chez Abengoa, qui, encore ici, aura probablement eu les yeux plus grands que la panse, dans la perspective d'un marché mondial du solaire en pleine croissance. Mathieu de Taillac, dans son article publié dans le quotidien français Le Figaro (lire son papier « Le crépuscule d'Abengoa »), fait état d'une perte nette de 1,2 milliard d'euros (1,8 milliard de dollars canadiens) pour 2015 et d'une monstrueuse dette accumulée de 9,3 milliards d'euros (presque 14 milliards de dollars canadiens). Encore ici, même recette catastrophique : acquisitions importantes, ralentissement économique mondial, notamment au Brésil où l'entreprise réalise le quart de son chiffre d'affaires, chute des cours du pétrole, gestion approximative de l'équipe de direction...

Bref, si le solaire se porte plutôt bien et la croissance du secteur est solide, les entreprises qui y œuvrent auraient-elles été aveuglées par les profits qu'il laisse miroiter? Paradoxal, quand même, pour ces entreprises qui n'hésitent pas, du fait de leurs préoccupations environnementales, à brandir haut et fort une éthique irréprochable...