Sous l’influence des contextes social, économique et démographique, notre façon d’aborder la gestion des ressources humaines (RH) a considérablement évolué ces dernières années. La pandémie et la crise de la main-d’œuvre, entre autres exemples, ont renversé des pratiques solidement ancrées dans le quotidien des organisations. Tour d’horizon et pistes pour agir.

L’avènement du télétravail a transformé la dynamique des relations employeur-employé, mais aussi celle entre les employés, sans oublier la collaboration entre les différentes équipes. Les organisations sont préoccupées par l’incidence de ces changements sur leur culture; ajoutons à cela l’arrivée sur le marché du travail d’une nouvelle génération dont les attentes sont différentes.

Les directions d’entreprise et les gestionnaires de la fonction RH — aussi nommée «talents et culture» ou encore «capital humain» — ont ainsi été amenés à redéfinir leur offre et leurs stratégies pour s’adapter à ces nouvelles réalités. Or les défis sont nombreux… La bonne nouvelle, c’est que les fonctions RH évoluent rapidement, jouant chaque jour un rôle plus stratégique pour la pérennité des organisations. 

Des consultations (source : Brio, boutique de management) menées auprès de nombreuses entreprises de moyenne et grande taille confirment que les enjeux en lien avec les ressources humaines se complexifient, nécessitant un ajustement des stratégies de même que de nouvelles façons de faire.

La fonction RH doit, d’abord et plus que jamais, s’inscrire dans un véritable partenariat d’affaires avec l’ensemble des unités de l’organisation; elle est alors en mesure d’agir comme un véritable levier pour réaliser les ambitions d’affaires. De plus, les personnes consultées estiment que cette fonction doit s’assurer que les gestionnaires sont adéquatement sensibilisés et formés aux défis liés à la gestion des talents.

Voici un aperçu des principaux enjeux que nous avons identifiés à cet égard et des pistes de solution à considérer.

Leadership et formation : deux éléments clés

La généralisation du travail à distance a transformé la façon dont les gestionnaires gèrent leurs équipes. Ils et elles n’ont cependant pas toujours la capacité ou les connaissances pour s’y adapter. Leur rôle devient davantage celui d’agents de transformation, de porteurs de sens et d’ambassadeurs de la culture d’entreprise. Moins vertical, le style de leadership doit mettre l’accent sur la coordination et l’alignement des forces.

Les organisations doivent, pour leur part, repenser leurs façons de faire en proposant un plus grand nombre de formations axées sur les différents types de leadership. Elles ont aussi avantage à mettre en place des mécanismes de communication efficaces et bidirectionnels avec les gestionnaires dont la tâche se complexifie.

La bonification du volet de développement des talents s’applique évidemment aussi à l’ensemble des employés, car il constitue un attrait certain pour les personnes en recherche d’emploi, en plus d’être essentiel pour le renouvellement des compétences qu’exigent les technologies numériques et l’automatisation.

Planification stratégique de la main-d’œuvre : voir plus loin

Agir de façon réactive ne suffit plus; il est désormais impératif de porter une attention soutenue à la planification stratégique de la main-d’œuvre (PSMO), d’autant que la démographie et la transformation numérique auront une incidence majeure sur de nombreux emplois et employés. Les organisations ont donc tout intérêt à prévoir les besoins afin de maintenir la qualité de leurs opérations et leur croissance.

La PSMO demeure pourtant négligée, car la fonction RH et les gestionnaires n’ont souvent pas les données nécessaires pour la mener à bien. Au sein de trop nombreuses entreprises, la récolte et l’exploitation de ces informations stratégiques sont encore embryonnaires ou inexistantes, alors que les systèmes d’information sur les RH (SIRH) permettent de disposer de ces données.

Dans les cas où les données sont disponibles, les gestionnaires manquent souvent d’expertise et de temps pour les utiliser efficacement. Le recours à l’intelligence artificielle et aux plus récentes méthodes d’analytique s’impose de plus en plus comme une nécessité, mais il exige du même coup de nouvelles compétences. En ce qui a trait à la fonction RH, trop d’entreprises se contentent aussi de mettre en place des indicateurs de performance strictement descriptifs dont les possibilités d’interprétation sont limitées, ce qui affecte la capacité à traduire les données en informations utiles à la prise de décisions. Enfin, des entreprises consultées ont mis en place des projets pilotes propres à un secteur de l’organisation, ce qui se veut une excellente façon de maîtriser le processus de PSMO avant de l’étendre à l’ensemble de l’entreprise.

Acquisition de talents : pleins feux sur la marque employeur

C’est un fait, la main-d’œuvre de qualité se fait rare et la compétition est de plus en plus féroce pour attirer les meilleurs candidats qui soient. Jouant la carte de la séduction, la majorité des entreprises portent une attention croissante à la promotion de leur marque employeur. Elles visent ainsi à mettre en valeur leur environnement de travail et la richesse des parcours possibles, notamment en plaçant leurs employés et leurs projets en vitrine sur les réseaux sociaux.

Malgré ces efforts, il demeure difficile de dénicher les bons talents. Une autre solution réside dans l’utilisation des technologies de pointe pour optimiser le repérage de candidats (ou sourcing en anglais) et le recrutement. Il peut s’agir par exemple de s’appuyer sur l’intelligence artificielle ainsi que sur la recherche de données pertinentes au marché ciblé. De façon surprenante toutefois, peu d’entreprises privilégient cette voie et montrent un retard significatif dans l’implantation de telles approches.

Expérience employé : l’équilibre et le bonheur à l’avant-plan

Certes, nous vivons dans une société où tout va très vite. Alors que les gens sont constamment sous pression, la notion de qualité de vie au travail gagne en importance. Résultat : les attentes en ce sens sont de plus en plus élevées. La formule hybride télétravail-bureau étant aujourd’hui largement privilégiée par les employés, les journées de présence en entreprise doivent proposer une expérience qui vaut le déplacement, que ce soit sur le plan de l’efficacité ou du point de vue des interactions sociales.

Aujourd’hui comme jamais, il importe de rechercher un équilibre entre la liberté de choix et la nécessité d’assurer la présence d’une masse critique de personnes, notamment pour éviter que celles-ci se retrouvent presque seules à faire l’équivalent d’une séance de télétravail au bureau. Ainsi donc, la détermination de journées de présence obligatoire ou de journées d’ancrage est susceptible de créer un climat positif, tout comme peut le faire la planification d’activités spéciales qui sont destinées à renforcer l’esprit d’équipe et l’adhésion à la culture d’entreprise. Comme la première impression n’est pas à négliger et que le marché offre de multiples occasions aux travailleurs, les processus de recrutement et d’accueil deviennent névralgiques et ont eux aussi à être actualisés.

Diversité et inclusion : être en phase avec la société

 Les stratégies pour renforcer la représentativité et l’inclusion se révèlent incontournables pour toute organisation qui désire attirer et retenir ses talents. Cette évolution revêt du même coup un caractère positif pour le personnel en place, lequel veut pouvoir s’identifier à une culture organisationnelle en phase avec l’évolution de la société. Ainsi, le volet «diversité et inclusion» n’est pas l’apanage de la fonction RH. De nombreuses entreprises créent des fonctions ou des équipes vouées aux facteurs ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) pour s’assurer d’une gestion coordonnée à l’échelle de l’organisation. Dans ce domaine, la volonté et l’exemple doivent émaner des plus hauts échelons, avec une intégration dans l’ensemble des opérations.

Rendre les modèles d’affaires RH plus performants

Alors que les préoccupations de la haute direction et celles de leaders RH convergent, il est plus que jamais essentiel d’assurer une coordination des trois grands secteurs de la fonction RH : partenaires d’affaires, expertises et opérations RH. Pour être en mesure de jouer leur rôle efficacement, les équipes des partenariats d’affaires et des centres d’expertise gagnent à mieux connaître les opérations de leurs clients et leurs objectifs. Elles doivent aussi convenir de leurs zones de collaboration.

L’évolution démographique, la transformation numérique et d’autres facteurs continueront d’affecter la disponibilité de la main-d’œuvre durant de nombreuses années. En conclusion, gardons en tête qu’il est crucial que les fonctions RH se dotent de nouvelles compétences. Cela s’avérera utile non seulement pour poursuivre leur propre transformation, mais aussi (et surtout) pour accompagner les gestionnaires qui en sont eux aussi à transformer leur organisation.