Partons d’un constat sur lequel tous s’accordent, en ce début de troisième millénaire : les organisations qui performent bien et qui sont dans le peloton de tête de leur domaine d’affaires respectif sont celles qui font preuve de souplesse et d’adaptation aux changements brusques et rapides de l’environnement.

Cet état de fait, la professeure Caroline Aubé, du Département de management de HEC Montréal, le partage également. À cet égard, la collaboration demeure sans conteste l’un des moyens qui peut permettre de surmonter les défis posés par ce nouveau contexte : « Le travail en équipe est plus que jamais important, car il permet aux organisations de gagner en efficacité et en agilité, tout en favorisant l’innovation », ajoute Mme Aubé.

Communiquer efficacement avec les membres d’une équipe de travail ou d’une organisation, faire preuve d’écoute et de considération à l’égard d’un collègue en difficulté, prévenir les conflits, les résoudre avec tact et doigté lorsqu’ils surviennent : voilà un échantillon des comportements que les gestionnaires qui souhaitent renforcer la collaboration dans leur équipe de travail peuvent encourager. Ces comportements, Caroline Aubé les connaît bien, elle qui les a constatés sur le terrain, recensés et étudiés dans le cadre de ses recherches1. Mais la professeure et chercheuse voit aussi plus loin…  

De fait, constate Caroline Aubé, lorsqu’une équipe fonctionne moins bien, le réflexe est souvent d’attribuer la cause à des facteurs individuels, tels qu’un manque de compétences relationnelles (soft skills) ou des traits de personnalité. « Il faut toutefois chercher à examiner le fonctionnement des équipes avec un pas de recul, prévient-elle, et éviter de conclure automatiquement que si l’équipe n’est pas efficace, c’est que les gens n’ont pas les soft skills nécessaires, ou qu’on est aux prises avec un ou des employés dont la personnalité est difficile. Ce sont des hypothèses probables, mais ce ne sont pas les seules hypothèses possibles », signale la professeure Aubé.

À cet effet, il faut examiner la problématique plus largement en adoptant une perspective systémique. Certes, le déploiement par les gestionnaires des compétences non techniques est important. Mais ces derniers doivent également prendre en considération d’autres éléments qui peuvent expliquer les dysfonctions d’une équipe de travail. La culture organisationnelle est sans conteste l’un de ces éléments. « Lorsqu’on crée des équipes de travail et qu’on souhaite encourager la collaboration entre les employés, il faut s’assurer que la culture organisationnelle et les pratiques de direction soient alignées avec les exigences du travail en équipe », souligne Caroline Aubé. Pour encourager la collaboration, il faut s’assurer de communiquer aux employés, par l’entremise des pratiques de gestion (sélection des employés, système d’évaluation et de reconnaissance, développement du talent), que le travail en équipe constitue une réelle valeur organisationnelle. Un manque de cohérence entre, d’une part, des pratiques organisationnelles axées sur la performance individuelle et la compétition et, d’autre part, les exigences du travail en équipe, en termes de collaboration, transmet un message contradictoire aux employés et risque de générer des dysfonctions au sein des équipes.

En somme, indique Caroline Aubé, les compétences non techniques demeureront toujours une incontournable condition à l’établissement de bonnes pratiques de collaboration au sein des équipes de travail. Mais le gestionnaire averti doit aussi s’assurer que le milieu organisationnel est en phase avec cette volonté de collaboration!


Notes

1. Lire à ce sujet Caroline Aubé et Vincent Rousseau (2009), « Des équipes de travail efficaces : ce qu’il faut faire et ne pas faire ». Gestion, 34(2), 60-67.