Mondialisation, mégadonnées, robotisation... L'ampleur des changements que connaît l'Humanité, en ce début de troisième millénaire, n'a d'égale que celle provoquée par ces avancées technologiques majeures que sont la roue, l'imprimerie, la machine à vapeur ou l'électricité. En somme, les changements dont nous sommes à l'heure actuelle témoins ont, et continueront d'avoir, des retombées majeures, notamment pour les entreprises et les organisations qui devront assimiler dans leurs processus et leurs procédés ces nouvelles et désormais incontournables réalités.

Et l'humain, dans tout ça?

La question, aussi banale puisse-t-elle paraître, a plus que jamais son importance! Car, comme nous le rappelle avec philosophie George Westerman dans son essai intitulé « Why Digital Transformation Needs a Heart » publié dans l'édition automnale de la MIT Sloan Management Review, « [...] we cannot forget that it is people who make companies work. » Certes, nous ne pouvons pas l'oublier, mais peut-être avons-nous tendance à le faire quand même... Car le difficile métier de gestionnaire et de leader est d'abord et avant tout un triptyque qui, affirment les professeurs Alain Gosselin et Éric Brunelle, tous deux de HEC Montréal, met en lumière les trois dimensions incontournables du leadership : la tête, le courage et le cœur (lire leur article « Tête, cœur et courage : un regard simplifié sur le leadership », publié dans le numéro de l'hiver 2016 de Gestion).

Pour la tête, pas de problème! Les entreprises et les organisations, tout comme les gestionnaires qui animent ces dernières, sont à comprendre et à intégrer progressivement ces nouvelles réalités technologiques dans leurs façons d'être et de faire. Idem pour le courage, alors que des décisions difficiles sont à prendre, et sont à l'heure actuelle prises, par les gestionnaires à l'égard de ces mêmes réalités : pertes d'emploi, délocalisations, qualifications et requalifications, voilà une partie des défis auxquels sont désormais confrontés les entreprises, les organisations et leurs employés... L'une des conséquences notables de ce maelstrom technologique se rapporte aux profondes modifications à prévoir sur le fond et la forme de la relation employeur-employé. Et à cet égard, les entreprises qui surfent actuellement avec grâce et aisance sur la vague technologique, signale George Westerman, sont aujourd'hui devenues des points focaux en matière d'emploi. De fait, les Amazon et Uber de ce monde ont par exemple intégré l'analyse fine des mégadonnées dans leurs décisions d'embauche et de rétention du personnel, pour plus d'efficacité et d'efficience au final. Mais qui de ces entreprises et de ces organisations, et elles forment un impressionnant contingent, qui n'ont pas les ressources et l'expertise afin de prendre ce taureau technologique par les cornes?

Le cœur à la rescousse

Les bouleversements actuels constatés au sein du monde du travail constitueront inévitablement une source d'anxiété auprès des employés. Qui ne vivrait pas un tel sentiment à la vue du tsunami qui s'abat sur les entreprises et les organisations? À cet égard, et puisque l'anxiété est une manifestation essentiellement émotive, c'est justement par l'émotion que le gestionnaire doit entraîner ses gens vers la poursuite des objectifs de l'organisation, même si ce dernier n'est pas en plein contrôle des changements qui s'y déroulent : « Et bien qu’il se trouve régulièrement devant des choix difficiles, parfois coincé entre les intérêts de l’organisation et ceux des personnes qu’il dirige, il sait traiter chacun avec respect et dignité, être à l’écoute et s’ouvrir aux idées des autres », rappellent avec acuité Alain Gosselin et Éric Brunelle. De la tête, oui! Du courage, bien sûr! Mais surtout du cœur, afin de donner aux employés un sens à qui ils sont et ce qu'ils font au sein de l'organisation en ces temps mouvants. Voilà sans doute là le défi le plus important du gestionnaire moderne!