Dire que l'Asie devient peu à peu le pôle économique mondial devient, de nos jours, banal. Après la Chine, l'Inde et le Viet Nam, dont nous vous parlions récemment (lire notre article « Le nouveau dragon venu d'Asie »), voilà que le Bangladesh, ce pays situé à la frontière orientale du géant indien, retient de plus en plus l'attention des économistes et des investisseurs, un fait corroboré par Jonathan Garber dans son article « There could be a new "Asian Tiger". Here's why », publié récemment sur le site Internet du Forum économique mondial.

Car il est ici question d'un pays au potentiel fort appréciable. De fait, la croissance du produit intérieur brut du pays, annoncée à 6,9 % pour 2016, s'est maintenue à 6,25 % en moyenne au cours des dix dernières années, un pourcentage qui ferait baver d'envie bien des ministres des Finances occidentaux ! Voilà certes des statistiques encourageantes pour les quelque 156 millions d'habitants du pays, l'un des plus pauvres du globe, qui ont vu leur niveau de vie s'élever progressivement au cours des dernières années. Le gouvernement entend par ailleurs maintenir cet élan salvateur, lui qui vise une croissance de son PIB de l'ordre de 8 % d'ici le début de la prochaine décennie.

L'inévitable diversification

Mais afin d'atteindre cet objectif ambitieux, les instances gouvernementales devront faire en sorte de diversifier une économie qui se caractérise par un degré certain de monolithisme. Le Bangladesh est en effet devenu, au fil des ans, l'atelier de couture de l'Occident, l'industrie du vêtement fournissant à elle seule plus de 80 % des exportations du pays. Et elles sont nombreuses, les entreprises occidentales, à se prévaloir d'une main-d'oeuvre à bas prix afin d'assembler leurs vêtements. Parfois pour le meilleur, surtout pour les actionnaires de ces entreprises, et souvent pour le pire, notamment pour une frange de la population active qui travaille dans ces ateliers aux conditions de travail douteuses. L'effondrement de l'édifice Rana Plaza, en avril 2013, témoigne de la chose : plus de 1 100 travailleuses et travailleurs trouvèrent la mort dans les ateliers qu'il renfermait. Parmi les vêtements fabriqués à cet endroit, on y retrouvait ceux de la marque Joe Fresh, propriété de la canadienne Loblaw, et de l'italienne Benetton...

Bien des obstacles à surmonter...

Tragique événement, qui illustre fort bien les énormes défis qui se dressent sur le parcours du Bangladesh vers une plus grande prospérité. L'un des pays les plus densément peuplés (1 052 habitants/km2 contre 3,5 habitants/km2 pour le Canada), le Bangladesh est aussi aux prises avec des problèmes endémiques de corruption, des infrastructures de transport et énergétiques souvent vétustes (20 % de la population n'a pas accès à l'électricité) et un contexte d'affaires franchement médiocre, le pays se classant au 176e rang sur 190 pays considérés par le Groupe de la Banque mondiale dans son classement annuel Doing Business, qui mesure la facilité à faire des affaires dans un pays donné. Ainsi résumé, vous venez de prendre connaissance des principaux éléments sur lesquels le gouvernement entend mettre ses énergies dans les années à venir afin de poursuivre le décollage économique du pays.

Mais la population et ses dirigeants devront aussi composer avec les caprices et les crises de Mère Nature, car la topographie du pays n'a rien pour aider. Le Bangladesh est en effet le lieu de passage de deux puissants fleuves, le Gange et le Brahmapoutre, qui se déversent en un large delta dans le golfe du Bengale. Le profil résolument plat du pays rend donc ce dernier particulièrement vulnérable aux inondations et à la montée des eaux due au réchauffement climatique. Voilà des données qui nous font apprécier à la fois la chance que nous avons de vivre au Québec et au Canada, et l'immense courage des dizaines de millions de Bangladaises et de Bangladais, en route vers des jours meilleurs...