Article publié dans l'édition Été 2011 de Gestion

Chacun de nous devra peut-être, au cours de sa vie, affronter certaines situations traumatisantes au travail comme dans sa vie personnelle.

Par exemple, au travail, il est possible que nous ayons à vivre les aléas d’une vaste restructuration, d’une fusion ou d’une fermeture d’entreprise, avec la suppression de personnel qu’elles entraînent. Nous sommes aussi sujets à subir une rétrogradation, une relocalisation, un déménagement, une surcharge de travail, une mesure disciplinaire, des problèmes financiers, et ainsi de suite. Sur le plan humain, nous vivrons peut-être à un moment donné le harcèlement, l’humiliation, l’indifférence, l’épuisement, l’isolement, la violence, les conflits ouverts ou latents, le divorce ou encore la perte, le décès ou la maladie d’un proche, d’un ami, d’un collègue.

Face à ces traumatismes, des auteurs ont récemment mis en avant le concept de résilience. Dans son livre intitulé Un merveilleux malheur, le neurologue, psychiatre, éthologue et psychanalyste français Boris Cyrulnik (2002 : 8) définit la résilience comme étant « la capacité à réussir à vivre et à se développer positivement de manière acceptable en dépit du stress ou d’une adversité qui comporte normalement un risque grave d’une issue négative ». Cette capacité à rebondir et à se reconstruire à la suite d’un événement traumatisant implique deux notions importantes : la reconstruction positive et le trauma. Il s’agit non seulement de résister ou de s’adapter, mais également de se transformer au contact du trauma vécu, d’où l’intérêt de la notion de résilience. Savoir résister, savoir absorber le choc est certes louable, mais cela ne suffit pas pour qu’il y ait réellement résilience. Il faut y ajouter la notion de transformation de nos façons d’être par suite de l’événement traumatisant. Comme l’indique Sylvie Rousseau (2010 : 20) : « En nous amenant à reprendre du pouvoir sur notre vie et à ne pas rester dans une position de victime après un coup dur, la résilience fait appel à nos ressources, aux parties qui existent en nous. »


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La résilience comparée avec d’autres stratégies d’adaptation et de protection face à un traumatisme

Pour faire face à un traumatisme, il existe une panoplie de techniques liées à la gestion du stress et à la gestion du changement. Parmi celles-ci, il y a les stratégies d’adaptation (coping strategies), qui nous aident à nous maintenir en équilibre, tels que les exercices physiques, une bonne nutrition, la méditation, le yoga ou les techniques de gestion des émotions. Ces stratégies sont fort utiles pour augmenter notre niveau de tolérance aux situations qui se présentent.

Pour nous aider à traverser une période de traumatisme, il existe aussi des stratégies de protection, qui ne favorisent cependant pas toutes la résilience de la personne. En effet, certaines la soutiennent, alors que d’autres ont pour effet de la retarder ou de la contrecarrer. Nous verrons quelques-unes de ces stratégies de protection.

L’hyperactivité consiste à se tenir occupé afin d’éviter de penser au traumatisme. Ce mécanisme de défense ne favorise toutefois pas une réelle résilience1. « Arrange-toi pour être occupé, et tu verras, tu n’y penseras plus. » Cette stratégie peut s’avérer efficace le temps nécessaire d’assurer la mise en action au cours de certaines situations, mais tôt ou tard, l’émotivité vécue lors du traumatisme émergera de nouveau.

Le déni est une stratégie de défense qui consiste à éviter ou à nier une réalité. Une personne pourrait se dire, par exemple : « L’entreprise ne vit pas réellement de crise. On nous dit cela seulement pour nous faire peur. » Cette stratégie peut être bénéfique temporairement pour amortir un choc traumatique et protéger de la souffrance. Toutefois, le maintien de cette stratégie, tout comme la stratégie de l’hyperactivité, ne mène pas à la résilience.

Quant à la banalisation, cette stratégie permet d’amoindrir la gravité d’une situation en la rendant presque normale : « Mais non, ce n’est pas grave. Que veux-tu, il a le droit de me traiter de la sorte. Après tout, c’est lui, le patron. »

L’intellectualisation est une stratégie qui consiste à généraliser afin d’éviter un affrontement qui nous engagerait trop sur le plan personnel : « Nous vivons une situation de changement important. Il est normal de réagir ainsi, il ne faut pas s’en faire avec ça. » Comme l’hyperactivité, le déni et la banalisation, l’intellectualisation maintient un certain équilibre émotionnel, mais elle ne permet pas de toucher à l’émotion réellement vécue, ce qui ralentit le processus de résilience.

L’anticipation est une approche qui vise à explorer différents scénarios potentiels afin de nous préparer mentalement et émotionnellement à une situation comportant un risque. Par exemple, Monique revient au travail après une absence d’un mois en raison du décès de son conjoint. Elle envisage d’éventuelles réactions de la part de ses collègues, et bien sûr ses propres réactions. Cette stratégie permet une préparation psychologique afin de diminuer les risques d’un nouveau trauma et préserve l’équilibre. Le défi que comporte cette stratégie est que, malgré les différents scénarios examinés, il est important de rester présent à la réalité vécue au moment du retour au travail. Les scénarios explorés n’ont souvent rien à voir avec la réalité telle qu’elle se présentera.

L’humour est une stratégie qui permet de libérer une partie de la tension éprouvée en soulignant des aspects loufoques ou amusants, et cela sans méchanceté ou intention de blesser l’autre. Le recours à l’humour dans des situations de tension, selon Cyrulnik (1999 : 67-68), peut donner une indication de la proximité affective des personnes présentes et offrir des conditions favorisant la résilience.

Enfin, la sublimation est une stratégie qui vise à transformer la blessure en actions créatives valorisées socialement. La personne consacre alors son énergie à organiser sa nouvelle existence pour lutter contre la blessure et apprendre à vivre autrement. Une nouvelle sensibilité apparaît et la personne utilise son expérience pour en faire quelque chose d’utile à d’autres personnes. Par exemple, Mario, qui était un professionnel de l’informatique, a subi du harcèlement psychologique de la part de sa gestionnaire pendant plus de cinq ans. Conséquemment à un processus thérapeutique, il a décidé de retourner aux études et de devenir gestionnaire à son tour pour pouvoir adopter et mettre en œuvre un style de gestion correspondant davantage à ses valeurs axées sur le respect. Cette stratégie de sublimation suscite la question suivante : « Qu’ai-je envie de faire de ma blessure ? » Cela favorise clairement la résilience.

En effet, pour parler de résilience, il faut qu’il se soit produit quelque chose de nouveau, il doit y avoir une transformation de quelque chose en une action positive permettant de se remettre en marche. Par exemple, plusieurs personnes qui font preuve de résilience ont développé des talents artistiques souvent inconnus jusqu’alors.

Les atouts de la résilience

Le concept de résilience s’appuie sur la confiance dans le potentiel des personnes de rebondir suite à l’épreuve. Emprunter le chemin de la résilience n’est pas le choix le plus facile, mais à moyen et à long terme, cela a un impact direct sur notre degré de sérénité, d’équilibre et de bien-être, ce qui est bénéfique pour soi et les autres. Comme l’exprime Cyrulnik (2002) : « Une vulnérabilité affective peut se transformer en force affectueuse, à condition d’y mettre le prix. »

Le fait de démontrer de la résilience ou de rechercher celle-ci entraîne des gains pour les personnes et pour les organisations. Ainsi, la résilience a les effets suivants :

  • Elle génère l’ouverture d’esprit et la flexibilité.
  • Elle génère l’innovation et la créativité.
  • Elle donne un sens aux actions.
  • Elle améliore les collaborations authentiques avec les autres.
  • Elle augmente le sentiment de satisfaction.
  • Elle révèle des talents souvent inexploités. Elle permet d’acquérir de la maturité, le sens de l’initiative et l’autonomie.

Reconnaître le caractère dynamique et personnalisé de la résilience

Le concept de résilience suggère une façon d’être, une attitude particulière par rapport à la vie. La résilience encourage non seulement à faire face aux difficultés de façon positive mais à y plonger les yeux ouverts, avec réalisme, avec du soutien et sans dramatisation. Elle nous invite à nous réconcilier avec le mouvement de la vie, avec ses surprises, ses joies, ses aléas et ses vents contraires. La résilience nous apprend à nous servir des situations traumatisantes comme des leviers de transformation personnelle. Elle nous redonne espoir et nous permet d’accéder de nouveau à notre pouvoir personnel. Rien n’étant acquis, il faut faire preuve de vigilance et tenter de réunir les conditions favorables pour mieux rebondir. Toujours selon Cyrulnik (2002) :

« Notre histoire n’est pas un destin. Ce qui est écrit ne l’est pas pour longtemps. Ce qui est vrai aujourd’hui ne le sera plus demain car les déterminismes humains sont de courte échéance. Nos souffrances nous contraignent à la métamorphose et nous espérons toujours changer notre manière de vivre. »

Ainsi, si l’on arrive à trouver les conditions qui favorisent la résilience à chaque étape de notre histoire, il existe une possibilité de réparation, et ce potentiel de résilience variera selon notre état émotionnel et notre rapport à l’environnement social et événementiel. En effet, ce qui est traumatisant pour une personne ne l’est pas nécessairement pour une autre. Chaque personne a ses propres filtres à travers lesquels elle voit et interprète la réalité et a des dispositions facilitant plus ou moins la résilience. Il existe trois grands paramètres qui influent sur le potentiel de résilience d’une personne : ses caractéristiques personnelles (son histoire, sa personnalité); son contexte et la nature même du trauma (l’événement qui est arrivé); son soutien social post-traumatique (le réseau de soutien ou la présence de « tuteurs de la résilience »).

Ainsi, le fait d’avoir démontré de la résilience dans une situation ne garantit pas notre capacité à rebondir dans une autre situation. Par exemple, Paul a perdu son emploi il y a sept ans à la suite de la fermeture de l’entreprise. À l’époque, il était un jeune marié, sans enfant et entouré de sa famille immédiate. Il a très bien traversé cette nouvelle période de recherche d’emploi et en a profité pour se spécialiser dans son domaine d’expertise. Quelques mois plus tard, il a trouvé un emploi correspondant à ses champs d’intérêt. Même si cet emploi était à plus de 500 kilomètres de sa ville natale, ce nouveau défi l’animait au plus haut point. Or, il a de nouveau perdu son emploi, mais cette fois il avait des jumeaux âgés de trois ans, dont l’un souffre d’une malformation congénitale. Cette situation a occasionné des tensions dans son couple et provoqué un endettement important. Épuisé, éloigné de sa famille et de ses amis, Paul a sombré dans une profonde dépression. Ce caractère dynamique et personnalisé de la résilience impose de l’humilité et de la vigilance face à soi de même qu’un grand respect envers la complexité et la mouvance des différents facteurs et conditions qui nous entourent.

Les recherches montrent aussi que le défi de la résilience est plus grand et les troubles engendrés plus persistants lorsque le traumatisme est interhumain, s’avère intentionnel et dure longtemps. Par exemple, si une personne a vécu une perte d’emploi à la suite d’une réorganisation de son entreprise, même si elle vit des émotions intenses, il sera plus facile pour elle de rebondir que si elle a perdu son emploi consécutivement à un épisode de harcèlement psychologique de la part de son supérieur immédiat (traumatisme interhumain, intentionnel et durable). La personne peut alors développer une hypersensibilité à certaines situations. Ainsi, une personne qui a été harcelée peut voir son traumatisme réactivé en présence de personnes en autorité qui haussent la voix.

Comment favoriser sa propre résilience face à l’épreuve ?

Se faire une représentation symbolique de son drame qui est positive et porteuse de sens

Jill Bolte Taylor, neuro-anatomiste de l’Université de l’Indiana, fait la distinction entre douleur et souffrance. Elle a découvert que le cerveau est capable de dissiper chimiquement en une minute et demie (eh oui, aussi peu que cela !) toutes les réactions de notre organisme (douleurs physiques, peurs, craintes, joies, déceptions, etc.). Selon lui, « il faut à tout prix prendre conscience que l’on peut très bien éprouver une douleur physique sans pour autant se laisser envahir par la souffrance émotionnelle. La douleur ne relève pas d’un choix conscient alors que la souffrance si2 ».

Similairement, selon Cyrulnik (2002), il y a deux sources de la souffrance humaine : la douleur vécue lors du drame et la représentation symbolique du drame. En ce qui concerne la première source, soit la douleur vécue au moment du trauma, l’anxiété générée, par exemple, par la perte d’un emploi est éprouvée dans les moments qui suivent l’événement. Selon le contexte de la perte d’emploi, cette anxiété pourra durer quelques heures ou quelques jours. L’autre source de la souffrance est la représentation symbolique que nous nous faisons du trauma et est influencée principalement par nos croyances et celles de notre milieu familial ou social. On se demandera, par exemple : « Que vont penser de moi ma famille et mon entourage maintenant que j’ai perdu mon emploi? Vont-ils croire que je suis un incompétent ou un irresponsable, que c’est ma faute ? Comment vais-je faire pour trouver un nouvel emploi à 54 ans? ».

Comme le trauma est vécu deux fois, et qu’il arrive souvent que la deuxième source soit génératrice de souffrances plus grandes encore que la première, le récit que l’on se fait de ce qui est arrivé apparaît donc très important. Les personnes ayant un fort potentiel de résilience ont en commun la construction de récits positifs, porteurs de sens. En tant que récit positif favorisant la résilience, reprenons l’exemple de la perte d’emploi de l’homme d’âge mûr : « Cette perte d’emploi est une occasion de revoir les priorités de ma vie, d’amorcer un dialogue dans mon couple et ma famille et de faire de nouveaux choix plus conformes à la personne que je suis à 54 ans. Et puis, j’ai encore de belles années devant moi. » Nous nous faisons tous des récits de ce qui se produit dans notre vie; nous en avons d’ailleurs besoin pour trouver un sens aux choses. Ce qui est intéressant, c’est la possibilité que nous avons comme adultes de choisir les scénarios de nos drames plutôt que d’en être victimes.


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Se questionner en profondeur et vouloir véritablement progresser en prenant les voies nécessaires

Aspirer à la résilience à la suite d’une épreuve exige aussi un questionnement en profondeur ainsi qu’une véritable volonté de progresser en prenant diverses voies. Peu importe les moyens pris une chose demeure dans le concept de résilience, il est essentiel d’accepter de toucher la douleur vécue lors du traumatisme (de ressentir et d’exprimer ce qui est ou a été vécu), d’accepter le bouleversement et d’y donner un sens, de bien se connaître soi-même, de garder espoir et de requestionner ses croyances. L’encadré 1 ci-dessous présente des exemples possibles de croyances personnelles non fondées qu’il est utile d’explorer afin de voir si elles ne limitent pas notre potentiel de résilience. Il est intéressant de s’interroger personnellement, de revoir nos convictions passées et de se demander s’il est toujours utile de les conserver dans notre vie ou au contraire, il faut les abandonner ou les actualiser.

Aspirer à la résilience à la suite d’une épreuve exige
un questionnement en profondeur, notamment réviser
nos croyances souvent non fondées qui nuisent
à notre résilience comme…

  • « Je suis la personne en autorité, je ne dois pas laisser paraître ma vulnérabilité. »
  • « Je suis un être responsable, je dois faire les choses moi-même. »
  • « Si je demande de l’aide, on va croire que je suis une personne incompétente. »
  • « Si j’avoue mes limites ou si je dis non à mon collègue, notre relation de complicité en sera affectée. »
  • « Je suis payé pour faire un travail, je dois le faire même si je suis en désaccord avec mon patron ou même si cela heurte mes valeurs. »
  • « Si je perds mon emploi, cela va briser mon couple ou je serai rejeté par ma famille. »
  • « À 54 ans, il n’est plus possible de trouver un emploi. »
  • « Je n’ai pas obtenu cette promotion; on vient donc de me mettre sur une voie d’évitement. »

Comment favoriser la résilience des autres et au sein de l’organisation?

La résilience d’une personne repose en partie sur son soutien social post-traumatique (le réseau de soutien), c’est-à-dire sur la présence adéquate de personnes, des « tuteurs de la résilience », qui communiquent l’espoir et le courage et qui voient dans la personne ce qu’elle a de meilleur. Comme le rapport à l’autre (le soutien social) est l’une des conditions essentielles de la résilience, nous pouvons devenir, en tant que personnes-ressources, des tuteurs de la résilience pour certaines personnes. Cela signifie que nous sommes en mesure d’exercer une influence déterminante comme amis, gestionnaires, collègues ou professionnels des ressources humaines. Un tutorat de la résilience ne peut être imposé; il s’établit par lui-même et ne peut se vivre que s’il existe une relation de confiance, d’empathie et d’estime mutuelle entre la personne blessée et le tuteur. Nous pouvons donc devenir des tuteurs de la résilience pour nos collègues, et souvent sans même le savoir. En effet, un tuteur est une personne jugée « significative » par l’individu qui vit une situation traumatisante et qu’il choisit consciemment ou inconsciemment.

À travers le regard, les mots et l’expérience d’un tuteur, il est possible pour la personne éprouvée de trouver le courage et l’inspiration nécessaires pour rebondir.

Déployer une culture favorable aux comportements de tutorat de la résilience

Par ailleurs, on sait maintenant qu’un tuteur de la résilience tend à adopter les comportements listés à l’encadré 23. Est-ce que mes comportements comme collègue, superviseur, ami, etc., ressemblent à ceux que contient cette liste? Est-ce que les dirigeants, les cadres et les professionnels dans mon organisation prônent ces comportements? Permet-on l’expression de ce qui a été vécu ? Sommes-nous habiletés à entendre et à recevoir la souffrance de nos collègues ou encore, à exprimer notre propre souffrance? Qui a la responsabilité de recevoir ces confidences au sein de l’entreprise (le gestionnaire, les collègues, les professionnels des ressources humaines, les professionnels du programme d’aide aux employés)? Quelle est la part de responsabilité du milieu de travail dans le cheminement de la personne éprouvée? Songeons-nous à offrir ce soutien aux personnes qui ont vécu ou vivent un traumatisme? Comment met-on en œuvre ce soutien social ? Veut-on déployer une véritable culture de la résilience de façon stratégique et structurée dans l’organisation? Si oui, comment le faire ? Quelles sont les conditions de succès ? Avons-nous des tuteurs de la résilience dans notre entourage ? Si oui, qui sont- ils ? Sinon, qui pourraient-ils être?

Aider es personnes éprouvées en leur permettant de rester en contact avec la réalité

L’expérience montre aux professionnels des ressources humaines qu’il est stratégique de permettre aux personnes éprouvées de rester actives et en contact avec la réalité vécue, même si les émotions ressenties sont difficiles, et de trouver avec elles des moyens de rebondir. À ce sujet, Boris Cyrulnik (1999) rappelle les quatre tremblements de terre que Naples a connus entre 1980 et 1987. Des chercheurs se sont intéressés à ce qui était arrivé à trois groupes de citoyens. Le premier groupe avait été protégé et éloigné lors du premier séisme en 1980, le deuxième groupe avait reçu de l’aide sur place lors de l’effondrement de 1980 et avait été mis à contribution pour l’organisation des secours, tandis que le troisième groupe était resté sur place mais n’avait reçu aucun soutien lors du premier séisme. Le groupe qui a eu le moins de séquelles de ces événements et qui a le mieux surmonté le tremblement de terre de 1987 est le deuxième, celui qui avait reçu à la fois de l’aide et qu’on avait impliqué dans les secours lors de l’effondrement de 1980.

Comportements du tuteur de la résilience
envers la personne traversant une épreuve

Il laisse à l’autre la liberté de parler ou de se taire selon son
rythme.

  • Il considère en priorité les côtés positifs de la personne.
  • Il facilite l’estime de soi, de sa propre valeur au regard d’autrui.
  • Il permet de découvrir des liens dans ce qui est arrivé, de trouver un sens.
  • Il fait preuve de patience malgré les échecs apparents.
  • Il manifeste de la bienveillance.

Résilience organisationnelle – institutionnaliser l’aide offerte aux personnes éprouvées (comités, responsables, etc.)

Dans leur ouvrage intitulé Résilience organisationnelle : rebondir face aux turbulences, Guy Koninckx et Gilles Teneau (2010) transposent le concept de résilience au sein des équipes et du management. S’appuyant sur des exemples, ils proposent les étapes à mettre en place au moment d’un changement afin de permettre à un plus grand nombre de personnes de traverser celui-ci avec un potentiel de résilience important. Pour ce faire, ils préconisent la création de cellules de résilience au sein de l’organisation, en nommant des révélateurs de la souffrance (toxics handlers) qui sont choisis pour leurs habiletés à recueillir et à entendre la souffrance détectée pendant l’instauration d’un changement et à traduire celle-ci dans des stratégies de gestion constructives et évolutives. Ces personnes, gestionnaires de la souffrance, sont nommées officiellement et sont invitées à siéger aux différents comités de gestion de l’entreprise. Pour qu’une telle structure de résilience soit possible, il faut évidemment que les leaders de l’organisation reconnaissent qu’un changement est susceptible de générer de la souffrance et qu’ils agissent de façon responsable afin de favoriser la résilience du personnel.


Notes

1 Cyrulnik (1999 : 59).

2 Source

3 Konincks et Teneau (2010 : 167).


Références

Bolte Taylor, J. (2008), Voyage au-delà de mon cerveau, Éditions Jean-Claude Lattès.

Cyrulnik, B. (1999), Autobiographie d’un épouvantail, Odile Jacob. Cyrulnik, B. (2002), Un merveilleux malheur, Odile Jacob.

Koninckx, G., Teneau, G. (2010), Résilience organisationnelle : rebondir face aux turbulences, Éditions de Boeck.

Rivest, R. (2004), Êtes-vous, Tintin, Milou, Haddock, l’aventure humaine au travail, Septembre Éditeur.

Gray, M. (1971), Au nom de tous les miens, Éditions Robert Laffont. Rousseau, S. (2010), Développer et renforcer sa résilience vivre heureux même si …, Les Éditions Quebecor.