Le rôle du secteur privé en santé continue de susciter bien des débats…

Lorsque l’on s’intéresse aux systèmes de santé publics les plus enviés dans le monde, comme ceux de la Grande-Bretagne, de l’Australie, de la Norvège, de la Suède, des Pays-Bas ou du Danemark, on constate que le privé détient une part non négligeable du panier de services offerts à la population. Dans ces pays, la mixité des prestations de services semble acceptée et considérée comme une saine avenue. Par exemple, en France, 60 % des opérations électives sont effectuées en privé, bien qu’elles soient remboursées en totalité par le public1.

Avec l’entrée en jeu au Québec de la tarification à l’activité et le virage vers une approche plus axée sur la performance annoncé par le ministre Barrette, il est souhaitable de repenser la création de valeur autrement. Il est donc important de trouver des modalités de prestation qui maximiseront notre retour sur investissement en santé et, surtout, qui créeront de la valeur pour les patients, la population et la société. Dans la perspective où des privés ou à but non lucratif participeraient davantage à la prestation des services de santé, il s’avère dès lors important de comprendre les conditions de succès et les obstacles aux ententes qui ont été négociées entre le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) et ces organismes par le passé afin d’en tirer un apprentissage pour l’avenir.

Le rôle du privé en santé

Au Québec, on confond souvent les fonctions de financement, de prestation, de législation et de surveillance des soins de santé pour la population. Dissocier les quatre composantes permet d’envisager le problème de la santé sous un tout autre angle et ouvre des avenues créatives pour repenser autrement notre réseau. Rappelons par ailleurs que le rôle fondamental de l’État n’est pas de fournir des soins et des services de santé à la population, mais plutôt d’en garantir l’accès et la qualité.

Pourtant, la plupart des autres biens et services que nous consommons ne sont pas fournis par l’État et on n’y voit pas là un problème. On mise sur le leadership entrepreneurial des entreprises privées, leur capacité d’innovation et leur excellence opérationnelle pour rendre les services adéquats de façon efficiente.

Le privé n’a pour autant pas carte blanche dans notre économie. La vente, la distribution et la qualité des prestations des entreprises sont encadrées par des lois et des règlements, dans l’intérêt des consommateurs et du public en général. Et ça fonctionne. À l’exception de cas particuliers, comme Hydro-Québec, nous avons décidé collectivement que nous pouvions être tout aussi bien servis, voire mieux, par les entreprises privées, dans la mesure où l’État exerce adéquatement ses fonctions de règlementation, de surveillance et de vigie nécessaires.

Dans le contexte de la santé, la présence du privé est incidemment sujette à de multiples lois et règlements. Les contrats sont essentiellement encadrés par des appels d’offres rigoureux.

Cependant, ces ententes sont souvent difficiles à développer et on identifie plusieurs embûches à ce mode de prestation. Puisque la grande majorité des pays qui nous coiffent en matière de performance de leur réseau de santé ont recours à un mode de livraison pluriel pour fournir les services à leur population, notre système pourrait sans doute bénéficier à son tour d’une plus grande ouverture sur ce plan. À cet effet, on a certainement intérêt à se pencher sérieusement sur les conditions qui font des partenariats et des collaborations réussis, tant pour la population que pour le réseau et les partenaires associés.

Identifier les conditions de succès des partenariats

C’est pour cette raison que le Pôle santé a accepté l’invitation du Conseil des entreprises en santé et mieux-être (CEPSEM) de mener une recherche sur différentes ententes de services qui ont été conclues entre le réseau public et des entreprises privées. Cinq organismes qui ont négocié des ententes ont été retenus : quatre sont à but lucratif et le cinquième est un OBNL. Les cinq cas étudiés ont connu ou connaissent des succès variables.

Nous avons voulu écrire l’histoire de ces partenariats et ainsi identifier les conditions de succès et les obstacles à des ententes réussies. Pour ce faire, nous avons questionné autant les principales parties prenantes chez le donneur d’ordre public que celles des organismes privés. Cette approche en dyade nous permet d’examiner ces partenariats du point de vue des entreprises privées, mais aussi selon la perspective du public et l’intérêt de la population.

Cette recherche arrive présentement à terme et les résultats seront dévoilés dans le cadre du colloque « Santé au pluriel : conjuguer privé et public » qui se tiendra à HEC Montréal le 4 février prochain. Ce colloque sera par ailleurs une occasion pour le ministère de la Santé et des Services sociaux de présenter les enjeux de la transformation du réseau. De plus, nous animerons un panel de gestionnaires du public et du privé qui ont été partie prenante dans des ententes de collaboration. Nous voulons ainsi ouvrir un dialogue constructif entre les prestataires du réseau pour trouver des solutions au bénéfice des usagers et des patients.


Notes

1 Séminaire du Dr Robert Ouellette, «  Avons-nous le meilleur système de santé au monde : vérité ou mensonge? »14 avril 2015, Pôle santé.

Colloque organisé par le Conseil des entreprises privées en santé et mieux-être (CEPSEM), la Fédération des chambres de commerce du Québec, Le Point en santé et services sociaux et le Pôle santé HEC Montréal.  Pour plus d’information  : http://bit.ly./ColloqueSantéAuPluriel .