Définir la diversité n’est pas chose facile, et cette complexité peut servir les gens qui critiquent les initiatives EDI mises de l’avant en entreprise. Il existe pourtant une catégorisation qui permet aux organisations de comprendre et d’agir sur les bons leviers pour atteindre les objectifs fixés par de telles politiques.

Une des principales critiques au sujet des initiatives visant l’équité, la diversité et l’inclusion (EDI) à émerger lors d'une conversation impromptue est que «tout le monde fait partie de la diversité, maintenant!» Cette déclaration effectuée avec peu de tact cherche en fait à souligner la visibilité récente de certains types de diversité historiquement moins connus, par exemple la neurodiversité et sa médiatisation grâce aux heures «calmes» de Walmart. Cela voudrait-il dire qu’un plan EDI doit désormais aborder la neurodiversité en plus de la diversité de sexes, de genres et d’origine ethnique? Répondre à cette question représente un défi qui se veut de taille pour les organisations et qui, surtout, ne date pas d’hier.

Brève histoire du foisonnement des types jusqu’au cadre simplifié

C’est en 1995 que l’auteure Susan E. Jackson a publié avec ses collègues l’un des premiers articles visant à catégoriser les types de diversité, intitulé «The consequences of diversity in multidisciplinary work teams». Les années subséquentes ont alors vu de nombreux autres cadres s’ajouter, basés tantôt sur l’observabilité de certains attributs (origine ethnique par opposition au statut social), tantôt sur l’incidence de ces derniers dans la définition de l'identité d’une personne (genre perçu par opposition au titre dans l’entreprise).

C’est dans cet esprit que des chercheuses italiennes ont répertorié en 2023 des mentions de 14 types différents de diversité dans la littérature scientifique et dans les rapports annuels des entreprises qui composent le classement international Great Place to Work. Elles ont pu par la suite proposer seulement quatre catégories se voulant accessibles tout en étant exhaustives. Malgré le fait que ces dernières aient été amenées par les auteures avec la lentille de la conception d’espace de travail en tête, elles peuvent tout de même servir à l’élaboration de politiques et, ainsi, faire office de cadre simplifié.

Comprendre les quatre grandes catégories de diversité et leurs ramifications

- Conditions psychophysiques : Cette catégorie rassemble certains des éléments les plus connus et les mieux maîtrisés actuellement dans les organisations, comme l’âge, la diversité fonctionnelle (handicaps physiques et mentaux), l’identité de genre et l’orientation sexuelle des personnes.

- Aspects culturels : Voilà une autre catégorie bien connue, dans laquelle se retrouvent les attributs d’une personne tels que sa religion, son origine ethnique, sa nationalité, les langues qu’elle parle et son identité culturelle de manière générale.

- Conditions socio-économiques : Il est ici question du statut familial d’une personne (en couple, avec enfants, célibataire, etc.), de ses conditions de travail précédentes, de son statut d’emploi et de ses statuts individuels passés (par exemple le statut de vétéran). La distance avec le lieu de travail en fait aussi partie, dans la mesure où une personne moins bien nantie n’aura potentiellement pas le choix d’être plus éloignée que d’autres.

- Habiletés, expériences et forces : Cette dernière catégorie rassemble des éléments quelque peu émergents d’un point de vue «EDI», dont les traits psychologiques et de personnalité, les aptitudes, les manières de penser ainsi que les compétences ou expertises acquises par une personne par le biais d’expériences précédentes.

Élaborer un mélange de politiques adaptées à son contexte

Bien que ces quatre catégories soient assez exhaustives, elles n’apportent pas de réponses au «comment», mais plus au «quoi». Au lieu de dresser une liste se voulant définitive, ou encore de proposer une approche universelle, regardons des exemples d’entreprises qui ont déployé avec succès des politiques touchant l’une ou plusieurs de ces catégories.

- Lors de sa dernière campagne annuelle d’auto-identification, la Banque de développement du Canada (BDC) a sollicité l’appui des groupes-ressources d’employés (en anglais : ERG, pour employee resource groups) tout en étendant de cinq semaines la période lors de laquelle son personnel pouvait déclarer son appartenance à un genre, à une origine ethnique ou autochtone et/ou à de la diversité fonctionnelle. En effet, ce type d’initiative permettant de mesurer la proportion d’employés qui appartiennent à une catégorie précise de diversité est généralement reconnu comme une bonne pratique pour démarrer ou actualiser un plan EDI, duquel pourront découler des politiques efficaces.

- La société de diffusion Radio-Canada a mis en place un programme de parrainage et marrainage destiné aux individus à fort potentiel venant de groupes sous-représentés, une initiative qui vise à bâtir pour ces personnes des lieux propices à l’apprentissage et au développement personnel. Plus précisément, le programme permet aux personnes en question d’être parrainées ou marrainées par de hauts dirigeants.

- Au Canadien National, une politique EDI très appréciée consiste à impliquer des membres de différents ERG lorsque vient le temps de rédiger des communications d’affaires. Celles-ci peuvent alors prendre la forme d’une fête culturelle – telle que le ramadan – à souligner, tout simplement, ou encore être plus formelles, comme dans le cas de l’annonce d’une nouvelle politique visant à soutenir les transitions de genre.

- Dans le but d’atteindre le taux de 40 % de femmes composant les équipes de la firme de services-conseils Capgemini, un programme de «retour en carrière» a été lancé. Il permet à celles qui ont quitté le marché de l’emploi pour fonder une famille de réintégrer la vie professionnelle. Ce programme, qui consiste en une formation de huit semaines permettant à l’employée de devenir une consultante, est connu à l’interne comme l’un des meilleurs de l’entreprise.

En conclusion, notons que c’est le mélange de ces politiques, adaptées au contexte spécifique d’une organisation, qui permettra à cette dernière d’atteindre efficacement toutes ses catégories de diversité. Il faut de plus chercher à créer des synergies entre les politiques qui émanent directement du bureau ou des responsables EDI (communications inclusives) et celles qui sont sous la responsabilité du service des ressources humaines (programme de «retour en carrière»). Ce sont de pareilles collaborations qui permettront de rédiger un plan EDI efficace, lequel sera perçu positivement à la fois par le personnel d’une entreprise et le public.