Bien des éléments sont à considérer lors d'une telle transactions, et ils ne sont pas toujours tangibles!

Croître…... Ce verbe d'’action est sur les lèvres de centaines de milliers d'’entrepreneurs et de dirigeants d’'entreprises. Certains en rêvent, d'autres feront les premiers pas en ce sens. Mais, doit-on préciser, la chose n'ira jamais de soi, car la croissance entraîne dans son sillage une pléthore de défis pour ceux qui s’'y engagent résolument. Qu’'on le fasse en tablant sur les forces vives à l'’interne, en s’alliant avec un concurrent ou un partenaire, ou bien en procédant à une acquisition, les variables à comprendre et à manipuler seront nombreuses. Et peut-être davantage dans le cas de la croissance par acquisition, qui exige de garder un oeœil sur ses propres affaires et ses propres actifs, tout comme sur ceux de la cible d'acquisition. À ce titre, les conseils avisés et les récits de personnes ou d'entreprises ayant procédé à de telles transactions seront, on le devine bien, précieux.

Où trouver ces conseils? Le colloque La croissance par acquisition. Une pratique d’affaires à démystifier, présenté par la Banque Nationale et l'’Institut d’entrepreneuriat Banque Nationale - HEC Montréal, s'est à ce titre révélé être une source d'information en or pour la centaine d'entrepreneurs et de curieux venus entendre les invités et les panélistes présents lors de cette activité. Animé par Sylvain Lafrance, le nouveau directeur de Gestion, ce happening, qui se déroulait ce matin au siège social de l’'institution financière à Montréal, aura donné l'occasion à l'auditoire de prendre la pleine mesure des défis reliés à la croissance par acquisition. Et, surtout, de constater que la manière de faire et le résultat final inhérents à ce mode de croissance sont loin de se résumer... à la seule couleur des billets verts qu'il peut éventuellement générer!

L'importance de l'intangible

Robert Coallier, le chef de la direction d’'Agropur, fut le premier témoin appelé à la barre de ce colloque. Le haut dirigeant de cette coopérative laitière, l'une des plus importantes du pays avec un chiffre d'affaires frôlant les six milliards de dollars, a d'emblée affirmé le rôle capital de la croissance par acquisition dans le bouquet des moyens de croissance offerts aux entreprises. À l'instar de la Coop fédérée, une autre coopérative agricole québécoise aux grandes ambitions, Agropur lorgne les marchés mondiaux afin de suivre ses clients, dont les activités se déploient tous azimuts : « Ce qui est important pour nous et pour nos clients principalement, c'est d'être un joueur significatif. On ne peut pas être un petit joueur et accompagner des grands clients. Ces gens-là s'attendent à ce qu'on ait la masse critique pour les appuyer et pour les aider à se développer », résume Robert Coallier. À cet effet, Agropur a procédé à pas moins de onze acquisitions au cours des quatre dernières années. Pour réaliser un profit rapide? Non! Essentiellement, à la manière d'un joueur d'échec, pour se positionner avantageusement sur les marchés visés et occuper le terrain! Bref, passer sur le rendement à court terme, et viser un positionnement appréciable pour le moyen et le long terme.


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Quant à Richard Speer, président de la firme Attraction Images et tête d'affiche de notre Portrait d'un leader (lire « Richard Speer, éternellement en mouvement » de notre numéro de l'hiver 2016), la croissance par acquisition est devenue, au fil des ans, une seconde nature. L'expérience aidant, l'homme d'affaires a développé, au fil des acquisitions, une perspective originale et éclairée sur le phénomène. Rapidement, M. Speer a mis le doigt sur l'un des plus gros écueils de toute acquisition, à savoir l'après-acquisition : « On oublie qu'une fois l'acquisition faite, c'est à ce moment que le travail commence! C'est l'intégration! » Ce faisant, le dirigeant a pointé du doigt la difficulté de créer une synergie au cours d'un processus de fusion ou d'acquisition, une chose à laquelle tous les intervenants de ce colloque ont acquiescé. Autre point pertinent à considérer en telle situation, à savoir la responsabilité de l'entrepreneur : « Dans le cas d'une société publique, en cas d'échec d'une acquisition, l'erreur est peut-être un peu moins dommageable que s'il s'agit de ton entreprise. Comme propriétaire, à chaque fois que tu fais une acquisition, est-ce que tu mets en péril les emplois qui sont chez toi?» Sage interrogation, qui fait remonter à la surface des considérations rarement abordées dans le cadre d'un processus d'acquisition.

« Je ne veux pas grossir! Je veux grandir! »

Avec un indéniable talent pour la formule-choc, voilà comment Richard Speer a résumé l'essentiel des propos de ce colloque matinal. Les acquisitions comme moyen de croissance doivent être encadrées dans une vision à long terme du développement de l'entreprise. Et, surtout, elles doivent viser le développement harmonieux des entités fusionnées, dans le respect des personnes et des façons de faire en place, et non seulement servir l'ego d'une grenouille entrepreneure qui voudrait se faire aussi grosse qu'un boeœuf!