On nous décrit souvent la situation des agricultrices et agriculteurs québécois comme étant précaire. On en convient! La charge de travail, la taille des exploitations, les difficultés rencontrées à l'égard de la reprise des exploitation et de la relève de la main-doeuvre : autant de défis qui sont bien présents pour celles et ceux qui s'affairent à remplir, et à bien remplir, nos assiettes, et ce quotidiennement.

Cela n'a toutefois pas empêché l'Union des producteurs agricoles (UPA), la plus importante organisation syndicale du Québec, à faire un tant soit peu abstraction des dures réalités du monde agricole d'ici afin de jeter un oeil compatissant vers d'autres parties du monde où les questions agricoles et la situation des agriculteurs sont sans doute encore plus cruciales, voire même problématiques. Voilà ce qui explique, entre autres choses, la mise sur pied de l'UPA Développement international (UPA DI), une excroissance du syndicat agricole, au début de la décennie 1990. 

De passage lors du Sommet international des coopératives, tenu à Québec en octobre dernier, M. André Beaudoin, secrétaire général de l'UPA DI, affirme et réaffirme l'importance de l'agriculture à petite échelle : « L'agriculture familiale a sa place dans le monde. Elle est même nécessaire plus que jamais, et ce malgré les difficultés de l'agriculture nord-américaine et mondiale». Car l'agriculture, et André Beaudoin a tôt fait de le préciser, n'est pas faite que de fermes géantes et d'exploitation intensive.

Au contraire, la diversité des types d'exploitation, tout comme celle des cultures, doit prévaloir, car se cantonner dans le modèle « industriel », c'est courir à l'épuisement des ressources. D'où la nécessité de donner un coup de pouce aux nations dont les capacités et les savoirs sont moindres, en ce qui a trait à la gestion des exploitations de petite taille. À cet égard, l'UPA DI fut amenée, au fil des ans, à oeuvrer sur le continent africain, dans des pays tels le Sénégal, la République centrafricaine, au Congo-Brazzaville, au Cameroun et au Bénin, mais également dans les Amériques (El Salvador, Haïti, Chili).

Un Québec agricole structurant

« Au Québec, nous avons la capacité de fédérer les bonnes idées », nous dit M. Beaudoin. Le mouvement coopératif et syndical est fort et bien vivant au Québec, comme en témoignent les succès du Mouvement Desjardins ou de la Coop fédérée, pour ne nommer que ces fleurons coopératifs du Québec. Cela témoigne, aux dires du gestionnaire et coopérant, d'une évidente capacité des acteurs québécois de tout acabit à faire la jonction entre les divers intérêts, capitalistes et sociétaux, pour ne pas les nommer. Voilà une compétence, une façon de voir et de faire, qui peut être exportée.

« Et justement, l'un des plus gros problèmes en agriculture familiale dans ces pays, c'est de mettre l'offre au service de la demande. Une multitude de petits exploitants qui n'arrivent pas à se parler, n'arriveront pas à se rendre aux marchés. »

À cet égard, le rôle de l'UPA DI, par l'entremise de ses diverses actions, aura permis aux agriculteurs familiaux de s'organiser en véritable force productive, et de mieux vivre de leur production agricole :

« C'est vrai pour des petits paysans pour des pays en voie de développement qui, il y a à peine 25 ans, ne savaient même pas qu'ils pouvaient vendre leurs produits à 50 kilomètres de leur exploitation. Et aujourd'hui, ces gens-là gèrent leurs exploitations et ils travaillent en concertation avec leur gouvernement. Ce sont des gens qui s'inscrivent dans l'économie réelle.»

Une menace, une occasion...

« Les gouvernements africains ont pris conscience, bien avant nos gouvernements, du risque agricole qui pèse sur eux. Facile à comprendre : la croissance démographique dans les pays africains est deux fois plus rapide que la croissance de la productivité agricole », rappelle André Beaudoin.

À ce titre, l'action de l'UPA DI, amorcée maintenant depuis un quart de siècle, contribue à prendre à bras-le-corps les immenses défis agricoles et alimentaires du continent africain et des pays en voie de développement, tout en exportant le savoir-faire et la crédibilité du Québec en telle matière. Bref, faire d'une pierre deux coups!