Préparez-vous à un changement complet de paragdime dans le secteur de l'assurance.

Bouleversements, révolution, urgence... Voilà quelques-uns des mots entendus lors du Forum FinTech Canada 2016, ce mercredi dernier, à propos du secteur de l'assurance. Car à n'en point douter, ce domaine d'affaires, comme bien d'autres également, sera mis sens dessus dessous par la révolution des technologies de l'information et des communications (TIC) et celle, majeure, de l'Internet des objets (Internet of things). Et le futur est ici indicatif car, à bien des égards, nous y sommes déjà!

Présentée par le Mouvement Desjardins, la conférence S’'assurer à l'’ère de l'’Internet des objets : un changement de paradigme aura permis, en tombée de rideau de l'édition 2016 du Forum FinTech 2016, aux participants de prendre la pleine mesure des changements à venir dans l'assurance de biens et de personnes. Mais attention, a indiqué le modérateur Christian Bieck, de l'IBM Institute for Business Value. Assurances2Ces changements ne viendront pas en un seul bloc. Ils sont davantage le fait de microsecousses qui transforment peu à peu le domaine de l'assurance. Le tableau ci-contre, présenté à l'occasion par M. Bieck et tiré du rapport Innovating insurance - Lessons from the world’s leading innovators, montre d'ailleurs de quelle manière toutes les étapes de la chaîne de valeur de l'industrie sont progressivement affectées par la technologie. Ces avancées en saut de puce traduisent bien, au demeurant, la culture professionnelle et, oserons-nous le dire, conservatrice de nombre d'entreprises du domaine d'affaires. Avec prudence, l'industrie pointe peu à peu le bout du gros orteil dans le bain technologique, mais on est encore loin de l'immersion totale! Comme le signale le rapport ci-haut mentionné, à peine le quart (23 %) des entreprises d'assurances sondées par IBM ont démontré une volonté claire d'embrasser l'innovation technologique et informationnelle. Et elles sont encore moins nombreuses (19 %) à pouvoir identifier un service spécialement consacré à l'innovation dans leur organigramme respectif...

De machines et d'humains

Si la présence et l'implantation progressive des TIC et de l'Internet des objets laisse entrevoir de grandes possibilités dans le domaine de l'assurance, il ne faudra toutefois pas, affirme Michel Laurin, président et chef de l'exploitation, assurance auto et habitation, à l'Industrielle Alliance, perdre de vue la relation avec le client : « Comment pouvons-nous utiliser la technologie afin de créer et d'améliorer la relation avec nos clients, et même entre nous? », demande-t-il. Ce ne sont pas les occasions qui manqueront, a fait remarquer Xavier Debane, vice-président, innovation et développement des affaires, à la Manuvie. « Nous avons créé non pas une police, mais un programme, Manulife Vitalité [voir la vidéo en tête d'article], afin d'aider nos clients à prendre leur santé en main. [...] Nous n'avions auparavant qu'un seul point de contact avec le client, nous en aurons plusieurs maintenant. Et c'est quelque chose de nouveau pour nous. Nous ne savons pas comment procéder, et c'est pourquoi devons nous appuyer sur un écosystème de partenaires [Garmin et Énergie Cardio] pour y parvenir », a-t-il fait savoir à l'auditoire. Le programme Ajusto, de Desjardins, illustre également fort bien la direction que prendra l'assurance d'ici quelques temps. Grâce à une application installée sur le téléphone intelligent du client, les habitudes de conduite de ce dernier sont analysées et se traduisent, ou non, en rabais sur la prime d'assurance à payer.

On le voit bien, dans un domaine d'affaire où le risque était traditionnellement mutualisé, supporté par l'ensemble des adhérents à une police donnée, les manières d'entrevoir ce même risque est en voie de se transformer radicalement : l'appréciation du risque sera désormais envisagée de manière individuelle et, avec les objets connectés, quasi immédiate. « Les gens veulent de la personnalisation, ils veulent des réponses rapides », prévient Venky Kulkarni , vice-président et chef des systèmes d’information, Solutions numériques pour la santé, à la Croix Bleue Medavie.

Changements culturels en vue...

La chose n'ira toutefois pas sans apporter son lot de changements majeurs pour les entreprises oeœuvrant en assurance et, in extenso, dans le domaine de la finance. Et à cet égard, signale Xavier Debane, beaucoup d'interrogations persistent, et peu de réponses franches et concluantes ont été à ce jour apportées : « Pour une entreprise plus que centenaire comme la nôtre, qui a connu beaucoup de succès jusqu'à maintenant, de quelle manière pouvons-nous continuer à faire ce que nous faisons, tout en changeant également? » Cela doit inévitablement passer par un changement au chapitre de la culture de l'organisation, ajoute Venky Kulkarni : « Nous devons acquérir le courage de laisser nos gens échouer », a-t-il lancé, en guise d'avertissement. Il s'agit là d'un incontournable préalable afin que l'innovation puisse prendre racine dans le long fleuve tranquille que constituait, jusqu'à ce jour, le monde de l'assurance.

Plus encore, a renchéri Michel Laurin, les assureurs doivent descendre de leur piédestal et comprendre que les choses changent, et à un rythme extrêmement rapide : « La technologie doit nous faire prendre conscience de l'urgence du moment. Au cours des 400 dernières années, nous avons été les experts de l'évaluation du risque. Maintenant, le pouvoir est en voie de revenir entre les mains de nos clients. » Jusqu'à quel point ces entreprises, solides, stables, rentables, sauront-elles se remettre en question afin de faire face aux défis du nouveau millénaire?