Gestionnaire : l'indispensable capacité à négocier
2025-03-11

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2025-03-20
Gestionnaire : l'indispensable capacité à négocier
Stratégie , Communication

Que ce soit pour fédérer leurs équipes ou décrocher un budget, chaque jour, les gestionnaires doivent mener nombre de négociations, parfois sans même s’en rendre compte! Conseils pour aiguiser leurs habiletés dans ce domaine.
Pour un gestionnaire, la négociation s’effectue sur une base quotidienne. «Parlementer pour réussir à marier des objectifs et des intérêts contradictoires fait littéralement partie de son travail. De plus, au sein d’une entreprise, chaque département est à l’œuvre pour négocier sa propre marge de manœuvre, financière par exemple», affirme Jacques Neatby, associé responsable des Amériques chez MindLab Global Solutions et coauteur de l’ouvrage Leadership Team Alignment : From Conflict to Collaboration.
Keven Hill, professeur agrégé au Département de gestion des ressources humaines à HEC Montréal, croit d’ailleurs que certains la pratiquent sans même en être conscients. «Dès que l’on cherche à obtenir quelque chose et qu’il faut inviter une autre partie à la table de discussion, il s’agit de négociation», estime-t-il. Dès lors, mieux vaut bien maîtriser cet outil auquel on a constamment recours.
Une vision trop restrictive
Si dans certaines cultures, un supérieur a toujours le dernier mot – ce qui tue dans l’œuf toute forme d’argumentation –, il n’en reste pas moins que la négociation donne habituellement de meilleurs résultats qu’une prise de décision unilatérale. «En imposant son choix, le gestionnaire manque une belle occasion. En effet, une entente aurait sans aucun doute pu être trouvée à travers des échanges, donnant à l’autre partie le sentiment d’avoir eu son mot à dire», indique Kevin Hill. Résultat : elle fera preuve d’engagement au lieu d’accepter la décision à contrecœur.
De plus, il est faux de croire qu’une négociation va forcément nuire aux relations avec nos collègues ou collaborateurs. Le professeur estime qu’au contraire, elle pourrait bien améliorer celles-ci en favorisant la recherche de solutions. «Notre vision de la négociation est souvent trop restrictive. On pense qu’elle est systématiquement conflictuelle, qu’elle obéit à une logique distributive où il y a un gagnant et un perdant», explique-t-il. Or, en instituant un vainqueur et un vaincu, on crée du même coup un terreau fertile pour de futurs conflits.
Inversement, une négociation collaborative dont chaque partie ressortira satisfaite s’avérera plus productive. En optimisant la coopération, on s’assure d’en arriver à un résultat avantageux pour tous, même si des compromis ont été effectués de part et d’autre.
Trouver un terrain d’entente
Pour établir une base de discussion, l’esprit d’ouverture et de collaboration est de mise, et ce, dans le but de créer des gains et bénéfices pour les deux parties. Comment procéder? En identifiant les points sur lesquels on peut faire preuve de flexibilité ainsi que les contreparties que l’on obtiendra en retour. «Réussir à générer de la valeur par rapport aux positions initiales favorise également les bonnes relations à long terme», observe Kevin Hill, qui insiste sur la nécessité d’élargir ses perspectives pour mener à bien une négociation fructueuse.
Jacques Neatby abonde dans le même sens et recommande la stratégie mise de l’avant dans le fameux ouvrage Getting to Yes : Negotiating Agreement Without Giving In des auteurs américains Roger Fisher et William Ury. «Il est possible de négocier et de parvenir à un accord, même avec ceux qui ont davantage de pouvoir que nous. Pour cela, il faut bien saisir les intérêts de chacun, comprendre ce qui nous unit, pour ultimement trouver un terrain d‘entente», conseille-t-il. Mieux connue sous le nom de «gagnant-gagnant», cette négociation intégrative vise à générer des bénéfices mutuels et repose sur les intérêts communs plutôt que sur les positions individuelles.
Développer son expérience et ses connaissances
C’est en forgeant que l’on devient forgeron, dit le proverbe. Il en va de même en négociation, où l’expérience pèse lourd dans la balance. «Des recherches ont analysé la façon dont un novice négocie, comparativement à une personne chevronnée. Cette dernière aura tendance à guider la négociation, à démontrer à l’autre partie les raisons pour lesquelles sa proposition peut être avantageuse», explique Kevin Hill.
Pour éviter les frictions, il suggère aussi de bien cerner les motivations sous-jacentes de chacun et de réfléchir aux actions concrètes qui permettraient de les concilier. Autre option : identifier les divergences au niveau des priorités – par exemple les coûts, les délais de livraison, l’entreposage, etc. – et proposer des compromis. En tout état de cause, il faudra se montrer créatif, flexible et insister sur la collaboration plutôt que sur la confrontation.
Les deux experts soulignent que dans ce domaine, il est hasardeux de s’improviser et que négocier requiert une bonne base de connaissances. Suivre une formation, lire des ouvrages à ce sujet et se perfectionner aideront assurément à développer de précieuses habiletés.
Pour aller plus loin
- Influence Without Authority, Allan R. Cohen et David L. Bradford, Wiley, 2017, 320 pages.
- Negotiating at Work: Turn Small Wins Into Big Gains, Deborah M. Kolb et Jessica L. Porter, Jossey-Bass, 2015, 288 pages.
- Les gestionnaires et la négociation, David A. Lax et James K. Sebenius, Gaétan Morin éditeur, 1995, 438 pages.
- Getting to Yes: Negotiating Agreement Without Giving In, Roger Fisher et William Ury, Penguin Books, 2011, 240 pages.
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