Plus d’un travailleur sur quatre au Canada dit avoir un quotidien très stressant1 et 58 % des Québécois se disent surmenés au travail2. Le stress professionnel est une réalité vécue par la majorité de la population. Mais heureusement, on peut apprendre à gérer son stress au travail!

Soldat, pompier, pilote d’avion, coordonnateur d’événement, journaliste reporter, dirigeant d’entreprise… voici quelques-uns des métiers les plus stressants. En fait, tous les métiers peuvent s’avérer stressants car « c’est une question très subjective », indique Estelle M. Morin, psychologue et professeur au département de management de HEC Montréal.

Le stress négatif peut être causé par une surcharge de travail, un climat professionnel toxique, des tâches trop difficiles, des responsabilités importantes. Ou tout ça à la fois. C’est le cas de Dominique Labelle. À 39 ans, il dirige une entreprise manufacturière dans l’électronique, Labo Circuits. Il a racheté la société alors au bord de la faillite il y a quatre ans. Les débuts ont été très difficiles jusqu’à ce que la croissance revienne enfin. Sa conjointe travaille à temps plein et le couple a quatre enfants de moins de 10 ans.

Insomnies, angoisses… Dominique Labelle a tout vécu. « Le plus difficile, c’est la perte de contrôle. Tu as l’impression que tout s’effondre. Tu perds confiance. » Il imagine souvent le pire et échafaude « des plans B, C, etc. », plaisante-t-il. Ses sources de stress sont nombreuses, mais la plus forte, « c’est le fait que ma maison soit en garantie », lance-t-il. Si l’entreprise fait faillite, les banques peuvent vendre la maison pour rembourser les prêts faits à Labo Circuits. « Vu ce contexte, les premières années, quand je rentrais à la maison, je n’osais pas dire quand ça n’allait pas bien au travail parce que ça aurait forcément créé une angoisse énorme chez ma conjointe », témoigne l’entrepreneur.


LIRE AUSSI : « La mesure du stress »


Un pot de billes au bord de l’explosion

Au travail, outre les soucis financiers, c’est l’accumulation des tâches à effectuer qui submerge parfois Dominique Labelle. « Le travail s’empile comme des billes dans un pot en verre. C’est un cercle vicieux : comme tu manques de temps, tu ne fais plus d’activité physique, tu ne manges plus bien, tu ne dors plus bien. J’ai eu des maux de ventre pendant des mois », raconte l’entrepreneur. Sa plus grande peur : « Que le pot de billes explose ! » Ça serait synonyme de dépression. Il a déjà débordé, jamais explosé.

Pour éviter l’explosion, il lui a fallu trouver des façons de le vider régulièrement. En effectuant les tâches bien sûr, mais aussi en s’octroyant des pauses, des respirations « pour se vider la tête ». Un vrai défi avec un travail aussi prenant et quatre enfants en bas âge. Ses trucs : « planifier et optimiser le temps. » L’entrepreneur note tout et a des applications plein son téléphone intelligent qui l’aident à s’organiser. Avec le retour à la croissance, il a aussi pu embaucher deux personnes, ce qui lui a permis d’alléger ses tâches quotidiennes. Il a également appris à accepter l’imperfection et à revoir ses objectifs quand ils étaient trop ambitieux.

Mauvais sommeil, impression d’être dépassé, perte de confiance sont des signes habituels de stress. Mais difficile, quand on est pris dans une période de tensions, de s’en rendre compte et de prendre du recul.

4 trucs pour apprendre à gérer son stress

1- S’occuper de soi

Pour ne pas tomber trop bas, « faire du sport, manger équilibré, dormir suffisamment, prendre du temps pour soi et sa famille », c’est essentiel, selon Linda Arsenault, coach de gestion chez LA Communication. Le choix de l’activité dépend des goûts de chacun. Mais le principal, c’est de « se vider la tête pour ne pas être habité par plein de préoccupations et être pris dans un tourbillon de stress », poursuit la coach.

2- Reconnaître les signes du stress

Certains peuvent paraître évidents : mains moites, accélération de la fréquence cardiaque, souffle court. Mais d’autres sont plus ardus à dépister, comme la difficulté à se concentrer, l’irritabilité, le manque de patience, les troubles du sommeil, etc. Même « reporter est une réaction normale au stress », avance Estelle M. Morin. Faire du ménage plutôt que de se mettre à un travail qu’on appréhende est une stratégie d’évitement. Comprendre les réactions au stress permet de désamorcer rapidement la situation.

Afin de ne pas tomber dans l’angoisse et d’éviter que le stress vous envahisse totalement et atteigne votre santé, c’est primordial d’apprendre à reconnaître ces états et d’en prendre conscience. « C’est important de nommer ses émotions négatives, de trouver les mots pour les décrire », souligne Estelle M. Morin.

3- Apprendre à se connaître

Ensuite, « il faut se demander pourquoi cette situation est stressante pour moi, qu’est-ce qui me fait peur », explique la psychologue. « Les émotions négatives signalent qu’il y a un problème à résoudre. La façon de gérer la situation est de comprendre ses émotions afin que le cerveau prenne le pas sur le biologique. Ce n’est pas en poussant ses émotions sous le tapis qu’on les évacue », poursuit-elle. Au contraire, c’est ensuite un cercle vicieux : elles nourrissent l’anxiété, qui fait voir les choses négativement. Le fait de comprendre ce qui dérange ou fait peur permet de prendre de la distance et de rationaliser la situation, ce qui contribue à baisser le niveau de stress.

Apprendre à se connaître, c’est aussi avoir conscience de ses valeurs. « Identifier ses valeurs et les communiquer enlèvent beaucoup de stress parce qu’alors, on est capable de poser ses limites, de dire non et de prendre les bonnes décisions, celles qui généreront moins de stress négatif », estime Linda Arsenault. Si quelqu’un, pour qui il est fondamental de passer du temps avec ses enfants le soir et le week-end, accepte un emploi qui va demander de travailler à ces moments-là, cela risque de générer beaucoup de stress. S’il se connaît bien, il sera capable de le refuser ou d’indiquer d’emblée ses limites pour respecter ses priorités.

4- Agir

Il n’est évidemment pas possible d’éliminer tout le stress négatif de la vie, mais on peut le réduire. Certaines sources sont indépendantes de soi et donc hors de contrôle. Mais, dans toutes les situations, l’individu peut poser des actions pour le gérer et le réduire.

Mais agir « demande de l’énergie qu’on n’a pas toujours, justement parce que le stress nous a épuisés », reconnaît Estelle M. Morin. Dans ce cas, faire des pauses, partir en vacances, prendre du temps pour soi est prescrit ! C’est comme ça que le cerveau se vide, qu’on recharge les batteries et qu’on peut rationaliser et faire les bons gestes pour réduire, voire éviter, le stress négatif. « Vivre des expériences authentiques comme aller voir un concert par exemple (plutôt que le regarder à la télévision) permet d’avoir du plaisir et donc de sécréter les hormones du bonheur comme la sérotonine », explique Estelle Morin.


LIRE AUSSI : « La résilience : apprendre à rebondir après l'épreuve »


Trouver ses propres trucs efficaces

Chacun peut trouver ses propres stratégies personnelles. Si le trop-plein de tâches au travail submerge, prévoir les moments dans l’agenda pour les faire diminue l’angoisse de ne pas y arriver. D’autres écrivent tous les soirs avant de quitter le bureau tout ce qui n’a pas été résolu dans la journée et qui devra être repris le lendemain. Ainsi, le cerveau peut l’oublier pour la nuit : c’est noté.

L’individu peut arriver à prévenir le stress négatif. Quand on se trouve plongé malgré tout dans un cercle vicieux, il faut savoir en sortir en prenant une pause afin de reprendre de l’énergie, d’être capable de faire face à la situation stressante et de trouver des solutions.


Notes

Enquête sociale générale – 2010.

2 Enquête de Léger pour Monster Canada-2017