FOPO, JOMO et autres YOLO : les acronymes s’invitent au travail
2024-12-26
French
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2024-11-14
FOPO, JOMO et autres YOLO : les acronymes s’invitent au travail
Ressources humaines , Communication
Ces dernières années, ces acronymes ont fait leur apparition dans le monde du travail. Que signifient-ils? Des experts décryptent ces expressions qui révèlent les tendances, les tensions à l’œuvre et les mutations en cours.
Les acronymes permettent de capter et de donner à voir des réalités de manière concise. «Derrière ces expressions souvent très imagées se cachent des tendances auxquelles les employeurs devraient être attentifs», estime Annie Boilard, CRHA et présidente du Réseau Annie RH. Poser un regard sur ces expressions en vaut donc la peine.
FOPO (ou la peur de l’opinion des autres, Fear of other people's opinions)
Du fait de l’essor des médias sociaux, on se trouve presque constamment exposé au jugement des autres, observe Florian Pradon, consultant en gestion du capital humain chez Florian Pradon conseil. «On a toujours été soucieux de la perception des autres. Mais avant, on était exposé à l’opinion de notre tante, de notre cousine, de nos parents, de nos amis, de notre conjoint. Maintenant, à travers les différentes plateformes, nous sommes soumis à la perception, à la validation de tout le monde, y compris des gens que nous ne connaissons pas.»
La distance créée par le télétravail peut aussi brouiller nos perceptions. En effet, plusieurs informations qui permettent de décoder les sentiments des autres se trouvent dans les discussions de corridor, le non-verbal, etc. Se fier seulement à des conversations sur Slack ou à des courriels peut donc mener à des malentendus. Pour se prémunir contre le FOPO, Florian Pradon nous invite à limiter son exposition, même professionnelle, sur les réseaux sociaux. «De plus, si je veux savoir ce que les gens pensent de mon travail, je vais leur demander directement. Je solliciterai alors l’opinion de personnes dont je valorise le point de vue et qui ont à cœur de m’aider à grandir.»
C’est d’ailleurs l’un des conseils du psychologue américain Michael Gervais, à qui l'on doit l’origine de cette expression. Dans un texte publié dans la Harvard Business Review, il propose une série de conseils pour aider les travailleurs à passer outre cette peur qui peut parfois paralyser, en développant par exemple une meilleure conscience de soi-même.
Pour Alexandre Rousseau, avocat, chargé de cours au Département de management de HEC Montréal et consultant en affaires, les gestionnaires devraient prendre au sérieux le FOPO. «Le concept de sécurité psychologique est l’un des facteurs de succès des équipes, selon plusieurs recherches. Concrètement, cela signifie que les personnes doivent se sentir à l’aise de contribuer à un projet, d’échanger, de discuter, sans craindre de se faire juger. Cela fait en sorte que tout le monde au sein de l’équipe contribue avec ses talents, ses forces, ses aptitudes» et permet d’éviter ainsi que le FOPO affecte le climat propice à la créativité et à l’innovation.
FOMO (ou la peur de manquer quelque chose, Fear of Missing Out)
Dans un monde où l'information circule en permanence, il est facile de se sentir dépassé et d’avoir peur de rater une occasion. Cette crainte peut pousser les travailleurs à vouloir tout savoir, tout voir et être partout à la fois. Un phénomène qui est accentué en télétravail, estime Florian Pradon, alors que les conversations informelles disparaissent. «Je pourrais avoir peur de manquer tous ces éléments d'information qui font généralement la richesse de mon travail, qui peuvent avoir une influence sur mon parcours professionnel. Est-ce que j’ai peur de passer à côté, de ne pas être informé à temps? Et si c’est le cas, est-ce que c'est parce que je ne mérite pas d'avoir l'information ou tout simplement parce que j’aurais dû faire un effort pour être au courant?»
Si les travailleurs ont une part de responsabilité dans le fait de rester informés, ils se trouvent parfois noyés dans cette surabondance d’informations, observe Alexandre Rousseau. «Ce besoin d’être connecté en permanence crée une surcharge mentale qui peut entraîner de la fatigue et du stress. Surtout que les technologies ont facilité la collaboration et les échanges au sein des organisations, si bien qu’il n’y a plus de limites», ajoute-t-il. Il faut donc repenser la gestion de son temps, de son énergie et de son attention, conseille-t-il.
FOBO (ou la peur d’être dépassé, Fear of Being Obsolete)
Annie Boilard relie directement cette peur de manquer quelque chose au FOMO qui est exacerbé par l’émergence de technologies comme l’intelligence artificielle. Dans les deux cas, les employés craignent de ne plus être dans le coup. «Cela signifie qu’il est nécessaire d’embrasser le changement, de faire preuve de résilience, et les gestionnaires ont un rôle clé à jouer, affirme-t-elle. Toutefois, c’est aussi la responsabilité de l’employé de s’adapter et de développer son propre coffre à outils pour faire face à ce défi.»
JOMO (ou la joie de se déconnecter, Joy of Missing Out)
À l'opposé du FOMO, le JOMO valorise le plaisir de la déconnexion. «Il y a une grande valeur à se recentrer sur ce qui est important, à se mettre sur les lignes de côté pour se concentrer sur nos tâches, nos projets, nos responsabilités pour ensuite revenir vers les autres», fait valoir Alexandre Rousseau.
Plus encore : pour créer, innover, il faut être capable de se soustraire du brouhaha ambiant, car les idées émergent généralement dans le calme, note-t-il. Une responsabilité qui n’incombe pas qu’aux employés, mais aussi aux gestionnaires, qui doivent permettre à leur équipe de conserver une saine distance vis-à-vis la technologie. «Les bénéfices de la déconnexion sont prouvés scientifiquement, tant pour la santé et le bien-être des travailleurs que pour le succès des projets menés en équipe.»
YOLO (pour profiter de l’instant présent, You Only Live Once)
Souvent associé au fait de prendre des décisions impulsives – et parfois risquées –, le fameux YOLO peut aussi évoquer l’importance de se réaliser pleinement. «C’est très important d'avoir des projets professionnels en accord avec ses principes, qui sont plus grands que nous, rappelle Alexandre Rousseau. Le YOLO est directement lié au fait de prendre conscience qu'on n’a qu’une seule vie à vivre.» La brièveté de l’existence nous pousse donc à chercher du sens tant sur le plan personnel que professionnel, insiste-t-il. Et les études montrent que vivre au diapason de ses valeurs a des effets positifs sur la santé physique et mentale.
Ressources humaines , Communication