Pendant longtemps, pour faire face à la guerre des talents, les recruteurs des entreprises internationales ont recouru aux services de chasseur de têtes pour s’approprier les meilleurs candidats. Aujourd’hui, le Web et les médias sociaux permettent d’avoir accès gratuitement, facilement et rapidement à des répertoires de candidats. Plusieurs organisations se demandent si l’utilisation des services de chasse de têtes est encore pertinente.

Des impératifs financiers à l’origine de nouvelles stratégies de recrutement

Les faits ne manquent pas : l’emploi des médias sociaux pour le recrutement est efficace dans l’approvisionnement des talents, que ce soit au niveau de la réduction du coût comme du délai moyen de recrutement. C’est d’ailleurs l’une des conclusions de l’étude de cas menée auprès de la multinationale Camso, dont l’objectif était de mieux comprendre la mouvance numérique et contribuer à l’enrichissement des connaissances1.

De façon générale, ce sont les impératifs financiers et stratégiques qui poussent les équipes de recrutement à revoir leur stratégie de dotation en mettant de l’avant l’utilisation des médias sociaux et en réacheminant à l’interne les activités liées au sourcing. Au nombre de ces activités, on retrouve principalement la recherche, le tri, l’analyse des profils, la création de viviers de candidats, ainsi que la sollicitation des candidats passifs.

En adoptant ce type de stratégie de recrutement, il est possible de réaliser des économies importantes. C’est d’ailleurs l’orientation qu’a prise Camso, une entreprise manufacturière dans le domaine des pneus et des chenilles en caoutchouc destinés au marché hors route, dont le siège social est situé en Estrie.

En 2015, l’équipe de recrutement a lancé un projet pilote où l’utilisation des chasseurs de têtes a été exclue de la stratégie pour les postes d’employés-cadres en technologie de l’information (TI), pour être notamment remplacée par le recours au recrutement par les médias sociaux. Les résultats sont sans équivoque : on parle d’une diminution de 90% du coût moyen de recrutement par poste, à la fois au Canada et au Sri Lanka.


LIRE AUSSI : « Chasse aux talents : oser l'innovation dans le recrutement »


Faire plus avec moins

Cette réduction des coûts peut être qualifiée de multifactorielle, puisque le simple abandon de l’utilisation de la chasse de têtes n’explique pas tout. Le fait que les sites comme LinkedIn ou Facebook soient gratuits ou peu dispendieux est aussi un facteur à considérer. D’un côté, les candidats s’assurent d’une visibilité gratuite moyennant le minimum d’efforts requis pour créer un profil, tandis que de l’autre côté, les organisations ont accès à peu près aux mêmes outils que les chasseurs de têtes, à très peu de frais.

Pour appliquer la stratégie de sourcing par les médias sociaux dans les périodes où le volume est trop grand, l’équipe de recrutement a parfois eu recours à une sourceuse externe, dont les services se sont révélés beaucoup moins dispendieux que l’utilisation de chasseurs de têtes. Un autre facteur à considérer est la participation active des employés-ambassadeurs. Tout porte à croire que la communication entre les employés-ambassadeurs et les chercheurs d'emploi est bénéfique, au sens où elle permet aux candidats de se faire une idée claire et réaliste du poste offert et de l’organisation en tant qu’employeur.

Dans le cas énoncé plus tôt, l’utilisation des médias sociaux a eu d’autres effets positifs, comme la réduction du délai moyen de recrutement. Ces résultats sont valables autant au Canada qu’au Sri Lanka, malgré certaines différences culturelles. Chez Camso, depuis 2015 la méthode de recrutement utilisant les médias sociaux a été officiellement adoptée pour les postes d’employés-cadres des fonctions administratives et de l’ingénierie. Les résultats sur les indicateurs de performance à l’échelle mondiale sont très concluants.


LIRE AUSSI : « Worldsourcing 2.0 : à la recherche de talents à l'échelle mondiale des médias sociaux »

Donc, est-ce que les LinkedIn et Facebook ont sonné le glas de la fin pour les chasseurs de têtes? Si ce n’est pas le cas, le rôle du chercheur de têtes sera certainement appelé à se redéfinir au cours des prochaines années. Cela dit, pour certaines entreprises et catégories professionnelles, il est possible que l’utilisation des Facebook et LinkedIn de ce monde ne soit pas suffisante et que le recours à de tels services demeure pertinent. Il faut également tenir compte que les médias sociaux doivent faire partie d’une stratégie de dotation globale incluant aussi des méthodes traditionnelles qui ont démontré leur efficacité dans les conditions culturelles données.

Les organisations qui souhaitent prendre le virage du recrutement par les médias sociaux devraient prioriser la formation de l’équipe de recrutement sur les techniques de sourcing. Elles devraient aussi accompagner et former ses employés sur leur rôle sur le Web, afin d’éviter la perte de contrôle de l’image corporative. En ce sens, le développement de messages clés en accord avec la promesse employeur doit être mis à l'ordre du jour. Enfin, la méthode utilisée pour le transfert de la pratique vers les filiales internationales doit également être considérée, autant au niveau des processus que du contexte culturel.