La ligne peut parfois sembler mince entre ce que l'on peut, ou ne peut pas, faire! 

Peut-être avez-vous parfois l'impression de marcher sur le fil du rasoir avec vos employés... Ai-je le droit de dire ceci, de lui faire valoir cela, d'imposer une chose, d'en interdire une autre? Où commence le droit de gérance et où se termine-t-il? Toutes ces interrogations se bousculent à l'esprit de bon nombre de gestionnaires, avec comme incessant bruit de fond la peur de tomber dans le piège du harcèlement. Qu'en est-il exactement?

Une définition à l'appui

La réalité est probablement moins terrifiante qu'elle n'y paraît, à condition évidemment de bien connaître au départ ce que constitue le droit de gérance. La Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail du Québec (CNESST) le définit comme le « Droit de l'employeur de mettre en place des mécanismes lui permettant de contrôler et de surveiller le comportement et le rendement de ses employés. Il prend donc des décisions liées à la profitabilité de l'entreprise dans l'intérêt de la bonne marche des affaires, mais non dans le but de nuire à ses employés. » Dans les faits, cela signifie donc que l'employeur peut prendre toute décision qu'il juge appropriée pour la bonne marche de son entreprise. Mais attention! Ce droit ainsi énoncé ne constituera jamais une carte blanche donnée au patron pour faire tout ce qui lui plaît. Le droit de gérance s'applique dans certains domaines bien précis et est limité par certaines dispositions légales tout aussi précises :

  • Par exemple, l'élaboration des horaires relève du droit de gérance. L'exercice de ce droit est toutefois restreint par les articles de la Loi sur les normes du travail relatifs au repos hebdomadaire ou au droit de refus de travail que peut exercer un employé dans certaines conditions bien précises;
  • Il en va de même pour le port d'un uniforme ou d'une tenue vestimentaire, que l'employeur peut exiger en vertu de son droit de gérance. Ce dernier ne peut toutefois pas, tel que prévu par la loi, demander à ses employés de payer ledit uniforme ou la tenue si ses employés sont payés au salaire minimum, ou si le vêtement exigé est identifié à l'entreprise ou à l'organisation, par un logo par exemple;

Le droit de gérance s'applique également aux décisions qui ont trait à la définition et l'’attribution des tâches, aux opérations courantes de l'entreprise ou de l'organisation, aux questions touchant à l'absentéisme ou à l'assiduité au poste, à la discipline dans le lieu de travail, y compris les sanctions, les mises à pied ou, en dernier recours, le congédiement. 

Et le harcèlement, dans tout ça? 

Certes, prendre une décision à l'égard d'un employé, suggérer un correctif à ce dernier ou, à la limite, lui faire une remontrance peut s'avérer difficile et requérir de la part du gestionnaire une bonne dose de courage. Certains hésiteront même à agir, de peur de tomber dans la zone interdite du harcèlement psychologique. Ces craintes sont-elles justifiées?

Encore là, une définition devrait aider à mieux cerner ce qui constitue, ou pas, du harcèlement psychologique. Cette conduite est définie par la CNESST comme : « une conduite vexatoire se manifestant soit par des comportements, des paroles, des actes ou des gestes répétés, qui sont hostiles ou non désirés, laquelle porte atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique du salarié et qui entraîne, pour celui-ci, un milieu de travail néfaste ». On le constate donc à la lecture de cette définition, les critères sont nombreux avant de constater une situation de harcèlement psychologique. En somme, comme employeur, il faut vraiment le vouloir pour se placer dans une telle situation!

On peut toutefois se poser une question : invoquer ouvertement le droit de gérance ou tomber dans le piège du harcèlement psychologique n'est-il pas symptomatique, en quelque sorte, d'un manque de communication au sein de l'organisation ou de l'équipe? Il y a fort à parier que des bonnes mesures de prévention en matière de harcèlement psychologique, des canaux de communication ouverts et un dialogue franc et constructif préviendront bien des maux!