Nous ne réfléchissons jamais assez à améliorer certains processus; c’est particulièrement vrai pour les évaluations de performance, alors que nos biais inconscients s'activent fortement, ce qui peut désavantager un employé ou une employée pour des raisons pas toujours objectives. Explications et appel à la vigilance.

Pourquoi nous questionner ici sur les évaluations de performance? Parce que de nombreuses études mettent en évidence l'importance des biais dans de tels processus. Les critères d'évaluation étant souvent vagues et ouverts, il est facile pour notre subjectivité de se glisser dans ces processus et pour les gestionnaires de se laisser guider par leurs préjugés inconscients. Après tout, tout le monde est partial, et personne ne peut s'empêcher de l'être! Le seul contrôle que nous avons est lié à notre volonté de nous livrer à une introspection (ainsi qu’à notre capacité à le faire au départ) et de nous questionner à savoir si la décision que nous nous apprêtons à prendre est la plus impartiale possible. L'objectif, ici, est de ne pas nous retrouver avec des évaluations erronées qui inciteraient des membres du personnel à vouloir quitter l'organisation.

Les évaluations de performance prennent beaucoup de temps aux gestionnaires, et tout un chacun est déjà bien occupé! Volontairement synthétiques, les conseils suivants permettront à ces cadres de surmonter pareil obstacle et de commencer à développer leur vigilance, dans un objectif d’encourager la meilleure inclusion qui soit.

Conseil vigilance no 1 : le fait de devoir «le prouver deux fois plus»

Dans le monde du travail, certains groupes de personnes ont tendance à être considérés comme étant moins compétents que d’autres : les femmes; les personnes de couleur; celles qui sont en situation de handicap; les personnes plus âgées; celles qui sont issues de la diversité sexuelle et de genre; les personnes autochtones… et plusieurs autres! Ces individus se retrouvent souvent à devoir faire leurs preuves, encore et encore. Cela se traduit dans les évaluations de performance par le fait que les groupes qui doivent «le prouver deux fois plus» ont l’habitude de voir leurs erreurs être remarquées davantage par rapport à d’autres personnes, et que nous avons tendance à nous en souvenir plus longtemps. À l’opposé, d'autres groupes sont plutôt jugés sur leur potentiel à mieux faire les choses dans le futur.

Les questions à nous poser comme gestionnaires : des erreurs sont-elles souvent mentionnées dans les évaluations? Le sont-elles chez tout le monde ou chez un groupe en particulier, et de façon répétée?

Conseil vigilance no 2 : le double standard

Le groupe des femmes et celui des personnes racialisées peuvent se retrouver à avoir à leur disposition un éventail plus restreint de comportements que nous considérons comme acceptables sur le lieu de travail. Par exemple, un homme dont les gestes et les paroles paraîtraient autoritaires ferait preuve d'«autorité» et de «leadership», tandis qu'une femme noire qui présenterait les mêmes attributs serait perçue comme étant en colère ou agressive.

Les questions qui doivent émerger ici en tant que gestionnaires : des commentaires sur la personnalité des membres du personnel sont-ils écrits dans les évaluations de performance? Un même comportement est-il perçu de la même façon, peu importe la personne qui le manifeste?

Conseil vigilance no 3 : Le biais de récence

Le biais de récence, c’est notre propension à nous concentrer sur l’espace de temps le plus récent plutôt que sur la période totale à évaluer. Et c'est bien normal; mine de rien, notre cerveau fait face à une quantité colossale d'informations chaque minute qui s’écoule! Il est donc impossible de nous imaginer capables de tout retenir sur une période de 12 mois. Si une personne a récemment fait une mauvaise présentation ou n'a pas réussi à signer un contrat avec un client prometteur, cette performance récente aura tendance à être plus importante que d’autres dans l'esprit des gestionnaires. Pourquoi? Parce qu'il nous est plus facile de nous rappeler les choses qui se sont produites récemment.

Un conseil à retenir pour atténuer ce préjugé: il est avantageux de collecter de l'information sur le travail des membres du personnel tout au long de l'année en gardant un document ouvert dans lequel nous pouvons ajouter des notes, au lieu de nous y prendre les dernières semaines avant l'évaluation.

Conseil vigilance no 4 : Le biais de centralité

Ce préjugé consiste en cette tendance qu’ont les gens à classer la plupart des éléments au milieu d'une échelle d'évaluation.

Si la modération est de mise dans la plupart des cas, les situations aux enjeux importants, telles que les évaluations de performance, exigent souvent une prise de position ferme. Lorsque nous recevons une note moyenne depuis plusieurs années, il devient difficile de savoir si nous devons bel et bien nous améliorer, et, le cas échéant, comment y arriver.

Un conseil à prendre en considération pour atténuer le biais : le moyen le plus simple d’y parvenir, c’est d'éliminer l'option «neutre» de l'échelle d'évaluation, par exemple en passant d'une échelle de cinq points à une autre de quatre points. De cette manière, nous nous retrouvons à devoir faire un choix dans un sens ou dans l'autre, mais pas entre les deux.

Malheureusement, rares sont les personnes qui se montrent plutôt douées pour connaître leurs propres préjugés. Des recherches ont en effet suggéré que plus nous avons besoin d'aide dans ce domaine, plus il est difficile de le reconnaître. Les gens sous-estiment leur propre subjectivité, et les personnes les plus partiales d'entre nous la méconnaissent le plus.

Une première étape consiste donc à nous autoévaluer. Voici un questionnaire – élaboré par l'Institut EDI2, de l'Université Laval – pour nous permettre de nous éveiller à nos propres angles morts. À garder en tête : il ne faut pas oublier de nous donner la permission d'être humain et de percevoir les limites de notre propre jugement!