Pour contrer l'oubli provoqué par la succession ininterrompue des nouvelles quotidiennes, Gestion propose un peu de recul afin de décortiquer les enjeux qui se cachent derrière les grands titres.

Offshore Leaks en 2013, Luxembourg Leaks en 2014, Swiss Leaks en 2015, Panama Papers en 2016 et Paradise Papers en 2017 : pas une année ne s’écoule sans que la fraude fiscale prenne d’assaut la une de nos quotidiens.

À l’occasion de ces révélations, plusieurs ont laissé entendre que le fait de se soustraire à l’impôt en ayant recours à des montages fiscaux et aux paradis fiscaux serait légal bien qu’immoral. C’est faux. La fraude fiscale consiste à ne pas déclarer un revenu qui aurait dû l’être. Elle est toujours illégale. Le
défi réside plutôt dans l’accessibilité de l’information.

Pour que la justice puisse condamner les fraudeurs, il faut avant toute chose que la fraude dont ils sont accusés puisse être prouvée. Et c’est là toute la difficulté en ce qui concerne les paradis fiscaux. Deux caractéristiques définissent un paradis fiscal : tout d’abord, c’est un endroit où les impôts sont faibles, voire inexistants. Ensuite, et c’est là l’élément le plus important, c’est un pays où il existe une loi du secret à toute épreuve. Or, comment condamner quelque chose qui ne se sait pas ? Notons ici que les pouvoirs publics n’ont pas attendu les révélations faites dans les médias pour agir. Conscients du déficit d’information qui entrave leurs actions, ils travaillent à une amélioration de la transparence depuis une vingtaine d’années. Par exemple, depuis 2009, le Canada a conclu 22 accords d’échange de renseignements en matière fiscale avec certains pays qui ont mauvaise presse, par exemple les îles Caïmans, le Panamá, le Liechtenstein ou les Bermudes.

Depuis lors, des pas de géant en matière d’échange d’informations ont été accomplis. Les avancées sont telles que, selon moi, la fraude fiscale comme nous la connaissons aujourd’hui n’existera plus d’ici environ deux décennies.

Point de vue publié dans l'édition printemps 2018 de Gestion