Pour contrer l’oubli provoqué par la succession ininterrompue des nouvelles quotidiennes, Gestion propose un peu de recul afin de décortiquer les enjeux qui se cachent derrière les grands titres.

Ruade dans les brancards : la loi 10 sur la réforme du réseau de la santé et des services sociauxRuade dans les brancards : la loi 10 sur la réforme du réseau de la santé et des services sociaux

Alain Rondeau

Pour comprendre la plus récente réforme du système de soins de santé entreprise par le ministre Gaétan Barrette avec son projet de loi 10, un retour en arrière s’impose. Avant 1985, le modèle du Québec dans ce domaine était un système très traditionnel, rigide et cloisonné.

Il a fallu attendre 2005 et la réforme entreprise par Philippe Couillard, alors ministre de la Santé, pour qu’un grand coup soit donné dans un système alors sclérosé. Le virage de 2005 s’appuyait sur des études démontrant que les soins de proximité étaient les mieux organisés. Mais la réforme qui a mené à la parcellisation du système n’a pas été sans failles. En effet, 95 réseaux locaux, ce sont 95 façons de faire différentes, avec la multiplication des cadres-gestionnaires que cela induit.

Arrive en scène Gaétan Barrette. S’il est un fin négociateur, il n’est pas un gestionnaire et, à ses yeux, les gestionnaires sont trop nombreux. Il faut alléger les processus, ce qu’il a fait. Avec la loi 10, M. Barrette a stoppé net le virage entrepris par la réforme Couillard, qui privilégiait l’intégration des soins, c’est-à-dire un système où les différents réseaux travaillent de concert pour offrir des services coordonnés à une population déterminée. La nouvelle loi a plutôt favorisé un modèle fondé sur la concentration des décisions.

Cette réforme controversée aura pourtant eu le mérite de mettre en évidence la mauvaise organisation du système de santé et de donner des résultats. On sait aujourd’hui que les meilleurs soins sont ceux qui s’inscrivent dans une logique de trajectoire, c’est-à-dire quand la prise en charge du patient est pensée de manière globale et non en silo, chacun de son côté.

Or, nos soins de santé sont encore conçus selon une vision de services. La concentration des organismes de gestion introduite par la réforme de Gaétan Barrette n’arrange pas les choses. Elle agit plutôt comme un obstacle au travail collaboratif. Et c’est pourtant vers une culture de la collaboration que nous devons tendre.

Transcontinental : 93 publications vendues

Louis Hébert

L’imprimé est sous haute tension chez Transcontinental, qui recentre actuellement ses activités et remet en question l’intégration, dite verticale, de ses divers groupes sous une seule enseigne.

Cette vente s’inscrit plus largement dans le phénomène des bouleversements majeurs qui touchent l’ensemble de la presse écrite. Auparavant, la publication papier payante était la norme, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. À l’heure actuelle, le marché subit une fragmentation qui lui est néfaste entre les publications imprimées et numériques, qu’elles soient gratuites ou payantes.

L’imprimé ne va pas disparaître pour autant, mais il y en aura beaucoup moins. Certains médias ont plus de chances de se tirer d’affaire, notamment ceux qui proposent des contenus spécialisés. Ces derniers réussissent en effet à se démarquer et à conserver leurs annonceurs. Et la publicité, c’est le nerf de la guerre. Les annonceurs ne sont pas des philanthropes et leur raisonnement est fort simple : pourquoi investir dans quelque chose que personne ne lit ?

Il est d’ores et déjà acquis que certains segments sont appelés à disparaître, tandis que d’autres vont devoir se restructurer. Toutefois, le déclin de ce secteur d’activité pourra être très profitable à certains de ses joueurs, notamment parce que le nombre de concurrents diminue. Transcontinental espère bien être de ce nombre. Ses dirigeants ne sont pas naïfs pour autant. Pour le comprendre, on peut examiner ce qu’ils font ailleurs, notamment du côté des publications numériques ou dans le domaine de l’emballage.

de l'élection de trump à l'explosion des fausses nouvellesDe l’élection de Donald Trump à l’explosion des fausses nouvelles

Alain Saulnier

Les fausses nouvelles, dites fake news dans le contexte actuel, ont toujours existé et s’apparentent à la rumeur publique. Ce phénomène a pris de l’ampleur avec l’avènement d’Internet et, aujourd’hui, les médias sociaux sont devenus des haut-parleurs de fausses nouvelles dont la portée est incontrôlable.

Avec son élection à la présidence américaine, Donald Trump a érigé en héros des menteurs professionnels. Il leur a offert un auditoire incomparable et a permis à des charlatans de bâtir de véritables entreprises du mensonge.

Cette explosion des fake news n’est pourtant pas de son seul fait. Le problème est plus profond. On assiste plutôt à une véritable crise de confiance entre une partie de la population américaine et les médias traditionnels. Donald Trump surfe ainsi sur la vague de méfiance envers les élites et l’establishment, dont les journalistes font partie. En effet, le milieu journalistique s’est souvent acoquiné avec le milieu politique par le passé, les uns et les autres sautant allégrement la clôture pourtant essentielle entre leurs sphères d’activité respectives. Cela ne leur a pas rendu service.

Les journalistes doivent travailler à rétablir cette confiance. Ils vont devoir démontrer qu’ils sont indépendants de la classe politique, que leur utilité est non seulement réelle mais aussi essentielle pour nos démocraties et, surtout, que leur rôle ne se résume pas à être de simples passeurs de nouvelles ni de vulgaires relais. Cela requiert bien sûr la vérification systématique des faits, la mise en contexte de l’actualité, des enquêtes journalistiques. Le combat se joue et continuera de se jouer entre information et désinformation.

Les propos de ces trois points de vue ont été recueillis par Eléonore Genolhac, édimestre et rédactrice web de Gestion