Que ce soit au niveau des entreprises, des gestionnaires ou des employés, la créativité fait partie des compétences incontournables pour réussir. Oui, mais comment la développer au sein de ses équipes?

La créativité a gagné ses lettres de noblesse et apparaît désormais en bonne place dans plusieurs palmarès. Ainsi, on la retrouve dans le modèle Compétences pour réussir, lancé par le gouvernement fédéral pour aider les Canadiens à s’adapter à l’évolution du marché du travail. Elle est également présente parmi les 10 principales compétences professionnelles de demain, une liste établie par le World Economic Forum.

Pas étonnant que les entreprises cherchent à la développer chez leur main-d’œuvre. Voici quelques pistes pour aider à créer un terreau fertile.

Leadership collaboratif et sécurité psychologique

«La créativité, c’est s’ouvrir à ce qui n’est pas soi-même, c’est un voyage d’apprentissage», soutient Laurent Simon, professeur titulaire au Département d’entrepreneuriat et innovation à HEC Montréal. En ce sens, cette compétence doit être portée par un environnement où elle s’épanouira, où ce «muscle» pourra s’exercer autant chez les individus que dans les équipes.

Mais pour cela, encore faut-il instaurer des conditions gagnantes. Tout d’abord, cela part du sommet. «Toute la chaîne de décision doit être alignée. De plus, notre façon de nous comporter en tant que patron et gestionnaire a un impact direct sur la créativité à l’interne», remarque Marc Fortin, associé, chef du produit chez LG2, une agence de création, de marketing et de communications.

Pour y parvenir, une forme de leadership collaboratif qui valorise l’apport des employés est un atout. «Il faut que le gestionnaire leur donne la parole et qu’il écoute ce qu’ils ont à dire. Il est également primordial d'induire la créativité à partir du haut, en alimentant les équipes avec des défis», ajoute Laurent Simon.

De l’avis de Marine Agogué, professeure agrégée au Département de management de HEC Montréal, en plus de donner l’exemple et de proposer eux-mêmes des idées créatives, les gestionnaires ont aussi tout intérêt à prendre conscience que l’organisation elle-même peut nourrir cette compétence. «Il faut inspirer ses équipes, les sortir de devant leur écran et les exposer à autre chose. On doit créer et saisir des occasions pour que le muscle de la créativité se développe», avance-t-elle. Elle recommande toutefois de se pratiquer dans des contextes où il n’y a pas d’enjeux. «Si l’on est en situation de crise ou d’urgence, ce n’est pas un bon moment pour s’entraîner», indique-t-elle

La sécurité psychologique est également un élément clé pour encourager la créativité, souligne Marc Fortin. «Il est essentiel d’instaurer des conditions d’ouverture, où on a le droit d’explorer et de se tromper. La peur de commettre une erreur nuit assurément à la créativité», mentionne-t-il. Un facteur sur lequel Marine Agogué insiste tout particulièrement. «Des recherches, notamment celles d’Amy Edmondson, professeure à Harvard, ont démontré que l’une des composantes les plus importantes est la sécurité psychologique. Il s’agit de la croyance intrinsèque que si l’on pose une question ou que l’on commet une erreur, il n’y aura pas de conséquences. Elle a d’ailleurs démontré que lorsqu’on met en place un climat de travail où l’erreur est perçue comme une source d’apprentissage, c’est là que l’on retrouve les équipes les plus performantes et les plus créatives. Et en tant que gestionnaire, on a un réel pouvoir à ce point de vue», illustre-t-elle

Les bons outils

Mettre des outils à la disposition des employés est tout aussi essentiel, note Marc Fortin. «Il faut les aider à partager l’inspiration et les bons coups, proposer des conférences, aller voir ce qui se fait ailleurs, créer de la fluidité dans les échanges par le biais d’espaces de travail collaboratifs notamment», soutient-il. Autrement dit, on met en place un contexte où les interactions seront favorisées.

Implanter différentes pratiques d’idéation, comme le design thinking, permet aussi à la créativité de se déployer. Mais il existe plusieurs autres méthodes. Simon Bourdeau, professeur au Département d’analytique, opérations et technologies de l’information de l’ESG UQAM, utilise fréquemment le Lego Serious Play lors des sessions où il agit en tant que maître d’atelier à la Factry, une école des sciences de la créativité. «L’idée c’est de développer un véritable couteau suisse mental, une façon de voir les choses, d’embrasser l’inconnu et de faire des parallèles entre les différents domaines», mentionne-t-il.

D’un point de vue individuel, il y a également plusieurs façons d’alimenter et de stimuler sa créativité. Marine Agogué recommande de faire preuve de curiosité et de s’exposer de différentes façons à des univers avec lesquels on n’est pas familier. «Lire, aller au musée, voir des films, se forcer à sortir de ses routines et de sa zone de confort aident à mettre en place des conditions favorables», énumère-t-elle. Mais il y a bien d’autres façons d’y parvenir, au gré des goûts et des intérêts de chacun. L’essentiel est de mettre en place un contexte propice à l’impulsion créatrice.